Fonction de l’artisan-poète

boukinoli

Avoir main d’oiseleur
Et mine de vagabond

Rendre à la vie les miettes
Du festin des dieux

Rendre possible l’invitation
A refaire les pas surgissant

Vocaliser son désir
Focaliser l’infini
En ce ciel qui pardonne
Qui prie et n’oublie jamais.

Avoir main de potier
Ferveur de terrien
Renaitre au vœu d’argile
Chercher la profondeur
Du vase d’origine
Trouver la forme pure
La cuisson juste
L’indispensable usage
L’ordre immédiat et bon

Avoir main de tisserand
De fil et d’espace
Reprendre l’enchainement
Piégeant le temps qui passe
En sa nappe tranquille
Faire l’étoffe du jour
Le dessin de la vie

Avoir main d’orpailleur
Géant de boue et de fatigue
Fourmi de l’or
Filtrant de l’onde
Dans l’indécis torrent du rêve
Verser la sueur et le baume
De trois mille ans heures et secondes
Qui ont traversés tes reins

Avoir main de semeur
Mains magiques de quelques riens
Le monde autour d’une vareuse
Le pain le sel et le don
D’accorder une chanson
Au vent de la plaine
Dans la ronde féconde
Des saisons qui s’unissent

Grains et sortilèges
Ruches et sillons
Pluie qui ruisselle
Soleil qui flamboie
Meule qui broie
Nouvel enfant
Et terre blonde

Avoir main de femmes
S’unir aux berges
s’ouvrir aux rives
Qui s’affrontent
Séparer-joindre
Mêler rires et salives
Bouches et pleurs
Les mains du cœur
Font une croix de bâtisseur
Sur ton offrande

Avoir enfin    Main de clameur
                   Main de partage

Main qui couronne et qui supplie
Main d’homme simple
Caresse et poigne d’accoucheur

Sourire au temps qui se prépare
Dans toutes les demeures.

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