For House Cats and Sea Fans de Elysian Fields

Hervé Pizon

chronique album For House Cats and Sea Fans de Elysian Fields

Héritiers de la Knitting Factory (club avant-gardiste situé dans le quartier de TriBeCa à New York), depuis Bleed your Cedar en 1996, Elysian Fields a développé un style unique entre folk, jazz, rock noir, expérimental, indé et intello.

Oren Bloedow excelle dans l'art du middle tempo et ses compositions sont celles embrumées, vaporeuses et enivrantes des clubs. Dans For House Cats and Sea Fans, il y est aidé par nombre de musiciens et guests qui, de près ou de loin, font partie de la famille : Thomas Bartlett,Ed Pastorini, Matt Johnson, James Chance, Ben Perowsky, James Genus, etc. Famille encore, au pinceau : la couverture réalisée par John Lurie (acteur de Jim Jarmush et ex Lounge Lizards).

Jennifer Charles, couchée dans l'herbe le long des rivages, chante avec langueur des textes souvent sombres, illuminés à la seule lueur de sa voix éthérée et nonchalante. Le filet de voix sensuel de la sirène – celle dont le chant méduse – vous fracasse contre les récifs dès la première écoute.

"Come Down From The Ceiling" ouvre l'album comme "un murmure dans le vide" avec des chœurs éclatants. "Aims For Your Love" le poursuit sous la forme d'un madrigal, un très beau poème médiéval qui dit la quête désespérée de l'amour. "Next Year In Jerusalem" est porté par Matt Johnson, batteur de Jeff Buckley et inspiré du même. "She Gets Down" est furieusement jazzy alors que "Channeling" plus nerveux, est une chanson d'amour psychédélique. "Madeleine", superbe balade piano écrite par Ed Pastorini et entendue en tournée ces dernières années, là avec un arrangement de violoncelle. "Escape From New York" narre les regrets et remords du nouveau visage de New York, homogénéisé. "This Project" et sa guitare acérée nous rappellent à leur façon et avec ironie qu'Elysian Fields, c'est déjà presque vingt ans de musique. "Frank, You Ruined Me" revient aux influences du cabaret de Weimar. La lune errante qui entre en collision avec nos vies – ça laisse des traces – de "Hit By A Wandering Moon" est la perle duo enchantée de ce disque qui se clôt par le feu sacré jazzy brûlant de "Love Me Darling".

For House Cats and Sea Fans est résolument au sommet des Champs Élyséens mytho-musico-logiques du duo de Brooklyn, affleurant Enfers et vertus. Elysian Fields, comme les Gorgones, habitent par delà l'Océan fameux, dans les régions extrêmes, près de la nuit. La nuit inspirée.

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