Fractales

Cocalos roi de Sicile 

La salle du trône est austère. De grandes tentures rouges couvrent sobrement les murs de granit. Une simple chaise de bois est placée sur une estrade de pierre. Derrière, deux braséros timides tentent de donner un peu de chaleur et de lumière. Le symbole du nouveau royaume de Sicile, une tête de gorgone au centre d'un triskèle est gravé dans la pierre au fond de la salle. 

L'homme est seul, assis, une coupe de vin à la main, il semble agité. L'air est frais mais chargé des odeurs de la mer. On entend le bruit des vagues qui palpitent comme une lente respiration. 

« Ah ! mon fils, approche ! 

J'ai une mission délicate pour toi. 

Tu n'es pas sans savoir qu'un homme s'est présenté à nous récemment. 

Il demande asile. 

Sais-tu de qui il s'agit ? 

Oui, bien sûr que tu le sais, tu es mon fils ! 

Il s'agit du plus grand génie que le monde ait connu ! Les poètes chantent déjà ses exploits légendaires ! 

C'est une aubaine qu'il ait choisi notre royaume comme refuge. 

Cet inventeur de renom a fait un choix judicieux, la Sicile en sortira grandie c'est certain. 

Je ne lui ai parlé que deux fois, mais il a déjà trouvé des astuces pour améliorer les voiles de nos navires. Nous serons plus rapides que nos ennemis et nos concurrents. Il m'a aussi montré comment nous pourrions débarquer nos marchandises plus efficacement et comment fortifier encore mieux nos villes. 

Imagine seulement ce qu'il serait capable de faire en un an ou en dix ! Nous surpasserions tout le monde dans la région, même les Crétois ! 

Mais mon fils, toi et moi nous faisons du commerce et nous savons qu'une offre trop alléchante peut être trompeuse. Cette légende vivante a tout de même fui la Crète et les foudres de Minos. 

Je veux savoir, mon fils ! Tu m'entends ? Je veux savoir ! Je veux savoir ce que je risque à le garder près de nous. 

Pouvons-nous tirer profit de son génie au risque d'entrer en conflit ouvert avec les Crétois ? 

Je te demande d'évaluer le coût d'un homme, le coût du plus grand inventeur que les dieux ont jamais donné à cette terre. 

Va, mon fils ! Va rencontrer discrètement ceux qui l'ont connu. Va ! Va et dis-moi si le talent de Dédale vaut le prix de la guerre ! » 

*

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