Fugue d'été

aile68

Temps mort, black out, poésie, Mathieu dans les cieux, Ludivine divin mausolée en papier mâché. Que savions-nous de leurs rêves, les connaissions-nous vraiment? Parce qu'ils sont partis, envie de fugue, envie de fuir le temps présent, vers quelles échappées belles, quels châteaux enfouis? Au fil du temps qui passe, danse, court, qu'ont-ils fait de leurs quinze ans? C'était l'été, il faisait chaud, ils ont pris un chien à la SPA et ils sont partis. Je croyais qu'ils étaient sages pour leur âge, je croyais qu'ils reviendraient vite. L'hélico a longtemps tourné au-dessus de l'étang, de la ville en feu. Qu'est-ce qui leur a pris? Envie d'aventure autant que moi, je suis resté les bras ballants quand j'ai appris la nouvelle, j'en ai eu mal au ventre. On les croyait tous deux morts en fait on les a retrouvés la face cachée par un foulard en pleine nuit deux mois après. Leur chien en a alerté d'autres, plus futés, mieux dressés. Cachés dans un vieux fort, parmi d'autres squatteurs, ils n'en menaient pas large, marre de faire la manche, de vivre comme des clochards. Deux mois d'errance, deux mois de galère, ils voulaient louper la rentrée, ils n'osaient plus rentrer. On m'a interrogé, on m'a cuisiné, j'ai dit que je ne savais rien, que pouvais-je dire? Ils s'aimaient tout le monde le savait. 

Aujourd'hui quand je pense à cette histoire, je me dis qu'ils auraient dû m'emmener avec eux, moi aussi j'avais des rêves, des envies de fugue. Les vacances dans la ville ramollie par le soleil me semblaient bien ennuyeuses. J'aurais dû me trouver un travail, une haie à tailler, des cageots à décharger tout sauf glander sous le soleil et les voir s'en aller main dans la main avec leur sac à dos. Moi je croyais qu'ils allaient à la piscine. Ecrasé comme j'étais par le soleil je ne me suis même pas demandé pourquoi ils avaient un chien avec eux.

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