Gagner mes Pâques
Jean Claude Blanc
Gagner mes Pâques
En fidèle chrétien, je dois gagner mes Pâques
Bedeau en mon village, aux offices me consacre
Catholique baptisé, à grands coups de taloches
Gamin, diable infernal, me suis fait sonner les cloches
A la veille du trépas, du ciel, je me rapproche
La Pâques, énième rituel, qui tombe à pic des cieux
Pour hérétique inculte, et facétieux curieux
C'est le jour idéal, pour dénicher des œufs
Pondus par lapins blancs, en Allemagne, en Alsace
Avec jolis rubans, coquilles multicolores
Des inepties de ce style, j'en ai plein ma besace
Tradition germanique, dont mon humour s'honore
Comme ça ne suffit pas, pour distraire les foules
Au Tyrol, œufs de Pâques, sont commis par les poules
Fatal, me direz-vous, rien d'extraordinaire
Ces autrichiens savants, tournent trop à la bière
Enfonçant portes ouvertes, comment pas être charmé
Par ce petit poussin, qui par miracle, parait
On en fait tout un plat, mais pas une omelette
Symbole de vie nouvelle, gagnée à coups de bec
Me complais du sacré, qui tourne en sacrilège
Les contes de ma mère-grand, qui me tiennent en haleine
Aussi, mes écoutilles, n'en perdent pas une miette
Pour dépasser l'absurde, comptez sur moi, je guette
Semaine Sainte arrive, je m'apprête, à jeûner
Privé de viande fraiche, vendredi toute la journée
Excepté le poisson, qui n'en fait qu'à sa loi
Lui, il sait bien nager, ça craint pas qu'il se noie
Chez les fervents cathos, formellement interdit
Bouffer de la bidoche, en ce triste vendredi
Serait croquer Jésus, ma mère, m'a averti
Me gavant d'haricots et de sardines à l'huile
Dimanche, finie la diète, c'est même l'opulence
Faut dire, mon estomac, longtemps en pénitence
S'offre sans sourciller, une tranche d'agneau Pascal
Sacrifié à la place, du fils d'Abraham
Comme quoi les plus petits, sont les boucs émissaires
Des vices, des puissants, aux souveraines manières
Ce pauvre agnelet, servi à toutes les sauces
Rappelle chez les juifs, le désert, l'holocauste
Les chrétiens, quant à eux, sûrement par complaisance
Voient en lui innocence, candeur, obéissance
Invité à la table, mais c'est lui qui régale
On le dévore bien cuit, pour conjurer le mal
Ne manque que la Cène, l'autel où on le zigouille
Pour que cette tragédie, ne parte pas en couille
Notre calendrier, recèle de tas de prénoms
Pas possibles tous des saints, dépassent ma raison
Le gus de la météo, n'en évoque plus le titre
C'est que la fête d'un païen, en version République
Au-delà du religieux, on doit fouiller plus loin
Pâques agnostique, jadis, avant d'être chrétienne
Renouveau renaissance, sempiternels refrains
La légende plus connue, issue de la Grèce ancienne
Leçon de mythologie, offerte pour pas cher
Perséphone, jadis, fille de la déesse Terre
Curieuse, la gonzesse, a visité l'Enfer
Ne pouvant ressortir, a appelé sa mère
Celle-ci bien démontée, a semé le bordel
Dans le royaume des anges, sacrée vengeresse, femelle
Si bien que le démon, finalement a cédé
Concluant un accord, pour lui rendre sa pépée
Saisi à cet instant, d'un trait d'actualité
Les petits arrangements, entre nous, on connait
Nos zélés gouvernants, ils n'ont rien inventé
Diplomates, médiateurs, s'engueulent avec respect
La Pâque est de retour, c'est le sacre du printemps
Se consolent comme ils peuvent, les naïfs croyants
L'hiver, c'est la tristesse et la désolation
En mars renait l'espoir, de la belle saison
De ces sermons simplets, nous, on s'en bat le fion
Rapide tour d'horizon, autour des œufs de Pâques
Coquilles en chocolat, qu'on planque, pleines de surprises
C'est encore pour nos gosses, qu'on joue à cache-cache
Mais eux s'en contrefichent, des rites s'en affranchissent
Les cloches parties à Rome, me laissent encore sonné
Vendredi Saint funeste, créateur crucifié
En avait dans le crâne, pour tant élucubrer
Mais avait tout prévu, pour être ressuscité
Croyants ou mécréants, on se plie volontiers
A ces sorcelleries, qui nous viennent du passé
De peur d'être condamnés, au jugement dernier
On se fend de mimiques, épelant le chapelet
M'efforce, de faire tout bien, quelques jours dans l'année
Citoyen anonyme, de la race des blaireaux
Je ne vais pas me plaindre, c'est journée de repos
Après dindon de Noël, c'est la noce à l'agneau
Attendant que la Vierge, réserve l'été au chaud
Utiles ces religions, ces sectes qui prospèrent
Pour le simple fonctionnaire, qui compte ses jours fériés
Laïque, la République, mais ne peut rien y faire
Les Eglises s'imposent, sur les règles, les décrets
On condamne l'Islam, mais on devrait se taire
A Pâques, nos religieux, se font chocolatiers
Ainsi lundi qui vient, vais rester dans mon lit
Car mon eucharistie, c'est qu'une parodie
Avec ma chérie, on va sûr communier
Passion commune niquée, pour nos corps enlacés
D'amour répété, ça vaut l'éternité
Aller gagner ses Pâques, en mon pays d'Auvergne
Veut dire se confesser, avec l'humeur en berne
Pour mériter l'Hostie, de ce sacré calice
Surtout pas la croquer, l'avaler, sans malice
Gavé de chocolat, m'a foutu mal au foie
Gavé de bondieuseries, j'en ai perdu la foi
Je crois, ce que je crois, mon âme s'en lasse pas
A contempler le ciel, elle interroge son Moi
Si j'ai les pieds sur Terre, ma tête divague en l'air
Sachant que mon existence, est séjour éphémère
Philosophe angoissé, le doute toujours m'habite
M'accroche à mon étoile, qui le soir me visite
Les religions, les bibles, inconsciemment nous guident
Nous comblent d'espérance, quand en nous c'est le vide
Ne sont que des symboles, ces divines euphories
Mais qui nous en apprennent, sur notre propre vie
Il nous reste l'énigme, sur notre ascendance
On cherche nos origines, à renfort de sciences
La vérité, par chance, on la saura jamais
En poète abstrait, préfère l'imaginer
On fuit réalité, en ce monde intrépide
En se tournant vers Dieu, on échappe aux misères
C'est pour cela, qu'on dit, que ce siècle est mystique
Gaffe aux faux missionnaires, qui prêchent les saintes guerres
Termine gravement, ce texte qui se voulait drôle
Je ne suis qu'un candide, qui se saoule de paroles
Impénitent farceur, vous surprendre, c'est mon rôle JC Blanc mars 2015