Goéland.
Claude Cotard
Goéland, tu voles haut dans le ciel.
Libre et joyeux.
Tu aimerais te poser parfois.
Tu regardes vers le sol.
Mais tu connais l'homme,
Sot et cruel quelques fois,
Si souvent.
Alors, tu voles. Tu tournoies.
Goéland épris de liberté.
Celui que tu aperçois en bas a l'air
Différent, mais tu te méfies.
Il a l'air doux et gentil,
Mais tu ne veux pas te brûler les ailes,
Ni qu'il te les coupe.
Alors, tu voles, haut, toujours plus haut.
Goéland de mon cœur, inaccessible,
Hors d'atteinte.
Si tu savais combien je t'aime.
Je t'aime assez, pour te laisser voler
Sans jamais essayer de te saisir.
Vole, vole, et ne te laisse pas attraper.
Te voir heureux, libre, déjà réjouit mon cœur
Et c'est ce bonheur, ton bonheur
Qui m'enchante et me ravit!
Et si un jour tu trouves le courage,
Mon cœur sera là pour t'y poser.
Il est là, regardant l'horizon
Les pieds bien sur terre sur cette falaise.
Au loin la mer agitée.
Ton chant, ton ombre sur la peur.
Quel hasard l'a conduit là ?
Des blessures, une douleur.
Le besoin d'enfin se reposer.
Il voit bien ce qui l'entoure et pour lui ce n'a pas été facile.
Pas facile d'oublier le passé et de croire en l'avenir. Alors, il attend.
Il attend que le soleil entre a nouveau dans son cœur.
Il attend de redevenir souple et résistant contre le vent
Contre les marées. Tel un roseau qui plie, mais ne rompt pas.
Comme le Phœnix, il renaît de ses cendres au chant de cet oiseau.
Cet oiseau qui survole au-dessus de lui.
Encore si jeune, si fluet, si fragile.
Ses ailes déployées le font planer dans le ciel azur.
L'oiseau blanc se rapproche un peu plus chaque fois,
s'habitue à cet homme immobile, qui attend.
Pas un geste brusque, juste un doux regard.
Ne pas l'effrayer, ne pas l'apeurer.
Le laisser s'approcher, le laisser s'habituer,
Et l'aimer comme on peut aimer la vie.
L'oiseau est craintif. L'homme aussi.
L'oiseau se pose sur sa main.
Rien. L'homme ne fait rien
pour le retenir, pour l'emprisonner.
Ils se regardent. S'observent.
Pas un bruit, pas un mot.
Pas utile. Ils se comprennent.
Une cage dorée serait sa mort.
L'homme le sait.
Comment d'ailleurs pourra t-il, lui,
lui offrir l'air, le ciel, l'embrun?
Comment pourrait-il lui offrir l'horizon ?
L'homme ne fait rien,
mais l'oiseau sait.
Mais l'homme sait.
Libre tous les deux, complémentaire tous les deux.
L'oiseau s'envole.
L'homme n'a pas bougé pour le retenir.
Pas un geste, pas un souffle, à peine un soupir.
Un soupir inexprimable.
Lequel vole ?
Les deux peut être.
L'homme n'était-il lui-même un goéland ?
Un goéland à qui on a coupé les ailes.
On n'apprivoise pas un être incapable de voler.
L'errance devient alors son amie
L'errance devient son créneau.
Son regard, son oreille, tous ses sens deviennent
ses ailes.
Et il vole, il vole, à travers cet oiseau
Épris de liberté.
Il l'accompagne. Vole à ses côtés.
Ils ne font qu'un, entre la mer et le ciel.
Entre la terre et le rêve.
Le temps... le temps est le seul à savoir.
Ce qui était hier.
Ce qui sera demain.