Guerre

anthony-lonewolf-ecrivaillon

La guerre. La guerre change, mais reste la même. Déjà dix ans que je parcours les champs de bataille d’une guerre permanente, en tant que soldat d’un nouveau genre. Une allégeance ? Un idéal ? Dites-moi à quoi ça sert quand la survie n’est assurée nulle part. Et pourquoi s’engager ainsi quand l’ennemi est partout dans l’ombre, à l’intérieur comme à l’extérieur ?
La guerre, ça a jamais été chouette… Mais là… Je crois que l’être humain a touché le fond. Peut-on même encore parler d’êtres humains ?

L’ennemi n’est plus identifié, dit-on, et je viens de vous le dire… Et si l’ennemi, c’était soi-même ? Et si cette guerre contre un ennemi invisible devait simplement se solder par la destruction de l’Humanité, à tous les sens du terme ? Personne ne veut s’y résoudre, mais moi, je sais… Je sais qu’il n’y aura cette fois ni vainqueurs ni vaincus. Juste des morts, du sang et des larmes.
Cette union d’États terroristes était sans nul doute un immense danger… Mais cela justifiait-il cet assaut nucléaire global ? Tous ces morts… Cet environnement détruit… L’Homme est revenu à un état plus que primitif. La loi du plus fort et la loi du talion ont repris le dessus. Et moi, je fais celui qui ne voit rien, me vendant au plus offrant, acceptant n’importe quel travail… Qu’est-ce qu’on ferait pas pour survivre, hein ?

Le champ de bataille est jonché de cadavres, y compris de femmes et d’enfants. Ouais, la guerre, c’est moche. Mais je passe de l’un à l’autre, sans me poser de questions, vidant méticuleusement les poches des morts. Après tout, là où ils sont, ils n’ont plus besoin de rien.
J’entrai alors dans un bâtiment en ruines, éventré par les bombes. On peut encore voir quelques shrapnels sur les murs. Si quelqu’un avait été sur la trajectoire, on ne retrouverait rien d’autre que des flaques de sang et un peu de lambeaux de chair. Une aubaine pour les cannibales qui se sont développés depuis que ce merdier a commencé.
La tapisserie avait brûlé, par endroits, mais elle restait le dernier symbole joyeux et vivant de l’endroit. Sur la place, un charnier creusé à la hâte entassait les cadavres faits au dernier assaut ennemi. On pouvait les compter par centaines… Que peuvent faire de simples civils avec de misérables fusils d’assaut rouillés face à des drones d’une précision exemplaire et dotés d’un arsenal capable de détruire une ville ? Rien, évidemment…

La guerre n’a pas changé. Elle devait devenir propre, n’impliquer que des machines… Mais une guerre ne peut pas être propre, et elle reste une affaire d’hommes. Pas de calculs. Même si c’est souvent la même chose pour les généraux…

Après avoir compté mon maigre butin, je décidai de descendre. Une femme en robe rouge m’attira l’œil. Elle s’occupait d’une tulipe noire, l’un des derniers vestiges de nature… L’un des derniers symboles d’espoir. Dix ans de conflit ininterrompu. J’avais perdu toute foi en l’Homme, elle me le rendit. Un coup de tonnerre retentit soudain, suivi d’un éclair aveuglant… L’Humanité ne méritait décidément aucune foi…

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