"HALE"(troisième partie)

H ate

A nd

L ove

E ver

3

Et puis les jours ont passé, et No est partie. J’étais en ébullition, un brasier intense et sacré me brûlait le corps, le cœur. Ces quelques jours furent une épreuve, mon chemin de croix. Plus les jours approchaient plus quelque chose en moi basculait. J'avais lavé mon plus beau jean's, ciré mes pompes et tondu ma face quarante huit heures avant le rendez-vous fatidique. Je savais que la barbe de trois jours m'allait bien, que mes pompes me faisaient un look...J'avais juste gardé un tee-shirt sale, pour ne pas arriver tel un coq en pâte, ou un jeune puceau. Nous avions convenus de nous retrouver à "la pleine lune", la ou nous nous étions croisés.

C'est fébrile et tout enrobé de discrétion que je suis arrivé, bien sur en avance. Je me suis attablé, j'ai attendu. Le serveur est venu me saluer, à pris ma commande et m'a servis. Quelques jours avaient passé, mais tout était différent. Était ce quelque chose dans l'air, ou simplement moi ? Je ne sais pas. Quoi qu'il en soit, ces quelques jours à attendre, loin de m’apaiser, avaient fait monter un moi un désir, une attente... J’étais un collégien et j'attendais à la sortie des classes mon premier amour, ma première vibration. Quelques jours, de simples journées pourtant, mais un pré-sentiment ou quelque chose de cet ordre s'imposait à moi. Je sentais que j’étais a l'orée d'un instant qui bouleverserai ma vie. L'intuition était bonne.

Après trente minutes d'attente et quelques bières, elle arriva. Je la revois comme si c’était hier : Débardeur sombre, jupe courte et beige, les jambes nues que recouvraient des guêtres noires, des talons. Toute en simplicité exquise, elle fendit l'instant et l'espace même s'estompa pour la laisser passer. Elle traversa la terrasse en me cherchant du regard, mais sans me voir puis s’engouffra dans le bar. J'attendis un moment pour la rejoindre, car dans le fond rien ne pressait. Je voulais savourer l'instant, croire que j’étais encore maître de moi. Un garçon ouvrit la porte et me laissa entrer. Je la suivait de loin en loin, presque méfiant car après tout je n’étais peut être pas son seul rendez vous, elle était si belle... Je surveillais sa crinière sombre de loin en loin, et pas de doutes elle me cherchait. Mon cœur battait la chamade au rythme de mes mains qui tremblaient. Qui était cette fille ? Pourquoi me bouleversait elle autant ? Ce n’étais pas la première, pas un premier amour ! Étais je le seul à "voir" ce que je voyais ? Une ouverture sur l’Éden, un petit morceau d'ange sexué...Salomé, la reine Saba elle même.Oui c'est moi qu'elle cherchait, moi qu'elle venait rejoindre. C’était fou, et je ne comprenais pas. Je me suis approché, j'ai posé ma main sur son épaule, tout doucement, puis j'ai murmuré à son oreille : "Bonsoir Hale"

Elle se retourna en faisant virevolter son parfum dans l'air. L'ombre de la salle devint lumière, la musique se tut et le temps marqua une pause. Un sourire comme une lame, traversa toute ma vie. Elle était heureuse de me voir et c’était évident, et comme elle était Turc, et que la méditerranée coulait dans ses veines, c'est d'un baiser chaud et entier qu'elle me saluât, sans fausse pudeur et sans retenue. Cette spontanéité me fit oublier en un instant tout le trac, toute appréhension. J’étais bien et à l'aise comme avec une amie de toujours : " Tu vas bien ? Je t'ai vu rentrer dans le bar et j'ai pris le temps de regarder. Tu est très belle ce soir, je suis très content de te voir". Elle ne répondit rien de particulier, sinon un regard qui valait tous les mots , puis elle me présenta ses amis avec qui elle partageait une collocation. Le temps de commander à boire et nous étions dehors. Il faisait si doux et la nuit nous portait. Le son des client discutant et entrechoquant leurs verres, couvrait nos mots, nous étions à cette table comme dans une alcôve, cachés de tous. Je serai bien incapable aujourd'hui de dire de quoi nous avons parlé, tant les mots étaient obsolètes , tant je n'entendais rien. Seul comptait son regard, ses jambes et ses gestes; Tout ce que déjà elle me donnait, dans la simplicité de l'instant. J’étais si important. C’était moi qu'elle regardait, moi à qui elle offrait son temps, et moi encore à qui elle donnait son attention. J’étais son rendez-vous, elle était le miens. Le reste n'avait aucune d'importance.

Les heures passèrent comme passent les étés : Tout en douceur. Nous étions la, à rire et boire à cette soirée printanière, qui ne faisait que commencer. Bières sur bières, sourires sur sourires, quelques cigarettes. J’étais détendu et dans mon élément. Cette fille avait cette capacité incroyable à vous mettre à l'aise dans l'instant, comme si tout était évident et simple. La tension, le stress de l'enjeu avaient disparu immédiatement. Après des jours à penser à ce moment, c’était juste incroyable et surréaliste. J’étais un homme presque sur de lui, comme pour la première fois de ma vie. Je brûlais de désir pour cette fille, qui se transformait alors en femme, tant son assurance simple me mettait à l'aise. Elle était "pour moi" et c’était évident. Elle faisait tout pour que cela clair et limpide. C'est inexplicable, presque irrationnel...Mais c’était la, dans l'air, dans sa voix et dans ses yeux. Oui, elle me mettait à l'aise, et à la fois me déstabilisait...Comme les femmes sont fortes a ce genre de jeux.

Comme j'allais aimer cette femme.

Le bar allait fermer, et c'est par un "bonsoir" complice, que nous décidâmes de fausser compagnie à ses amis, pour nous rendre tous les deux dans un club sélecte des nuits Montpellieraines...