Hannah Baker et ses cassettes? Elle avait raison!

lune-noire

"On devrait tous être des Hannah Baker et faire des vidéos pour les gens qui nous ont fait souffrir".

    Je ne sais pas exactement quand ça a commencé. Je dirais que ça fait peut-être un peu plus d'un an, quand j'ai décidé de réaliser un rêve, celui de partir en erasmus à Barcelone.

  Je suis montée dans cet avion le 09 Septembre 2016, imaginant déjà une année merveilleuse, où tout le monde allait prendre de mes nouvelles. J'avais même imaginé qui seraient les personnes qui viendraient me rendre visite (inutile de préciser que j'avais tout faux!).

 Septembre-Octobre, premiers abandons. C'est dur, l'expérience erasmus, quand tu n'as jamais vécu loin de ta famille et que les choses se compliquent à cause de problèmes administratifs que tu ne peux pas gérer à distance. Et puis finalement, tu tentes de garder la face, t'essaies de donner des nouvelles à tes copines, qui visiblement n'ont même pas le temps de te donner l'heure. Oui, premiers abandons, MA et JO. On avait trop une vie différente, voyez, je suis qu'une pauvre étudiante, célibataire, qui rêve d'autres horizons, alors qu'elles travaillent, qu'elles sont presque déjà mariées et qu'elles finiront par pleurer dans dix ans quand elles feront les femmes d'intérieur!

    D'autres abandons ont suivi. Et je vous avoue que la sensation du "on s'y habitue", elle est vraie. Je suis rentrée chez moi, pendant les fêtes de fin d'année. J'étais contente de rentrer, ouais, de retrouver mes proches..Que je pouvais désormais compter sur mes doigts, parce qu'en étant partie trois mois à l'étranger, j'avais perdu 90% des gens que je considérais "importants" pour moi. Et j'ai pourtant essayé de vous parler. Mais soit vous n'aviez pas le temps, soit j'étais trop loin, déjà inexistante pour vous. Pauvres salopards, j'espère qu'on vous lâchera aussi, dans les moments les plus importants de votre vie.

      En janvier, je suis repartie, direction Barcelone, et tout a visiblement basculé pour moi. Je me suis sociabilisée avec des gens du monde entier (rien que pour la sensation de faire des nouvelles rencontres, ça fait du bien!). Alors avec Kath, nous nous sommes rapprochées. Elle m'a pris sous son aile, et dieu sait combien de fois, on a passé des nuits dehors, à danser, à rigoler, à s'amuser. A être heureuse. Kath, c'était mon petit rayon de soleil en erasmus. Et grâce à elle, j'ai oublié tous mes potes pourris de France, subitement remplacés par des amis géniaux catalans, boliviens, équatoriens, et même taïwanais. Le bonheur à Barcelone. 

     Au fil des mois, j'ai encore perdu des personnes. Certaines se sont éloignées. Ça a été ton cas, Rémy. Et si je devais t'enregistrer une cassette façon Hannah Baker, crois-moi, la tienne serait longue. Les premiers mois, t'étais relativement présent pour moi, et je l'étais aussi beaucoup pour toi. T'es même venu me chercher à l'aéroport avec mes parents, en décembre. Et puis je suis repartie et tout a changé. Tu prenais moins de mes nouvelles. Tu répondais brièvement, ou très longtemps après, quand je te demandais comment tu allais. Tu m'as appelée une fois, sur un an (parce que tu attendais ton bus, pour tuer l'ennui). Naïvement, j'ai cru que c'était moi qui me faisais des films. Mais non. Tu étais même venu me rendre visite, en octobre, pour réaliser ton putain de projet d'art. Tu t'en souviens? Tu te souviens comment tu m'as fait traverser la ville, de long en large, juste pour planter un putain de sapin dans des lieux connus de Barcelone? Vraisemblablement, tu n'étais même pas venu pour me voir. J'ai fini par te laisser prendre de la distance, parce que tu me disais que tu travaillais beaucoup, et que j'en avais marre de m'inquiéter de tout ça, alors que j'étais censée vivre la meilleure année de ma vie. Je pensais qu'on allait régler ça quand j'allais rentrer, et j'avais tort. La preuve? Tu ne t'es même pas inquiété de savoir quand je rentrais. Je suis rentrée le 21 juin, t'as pris le temps de m'accorder une soirée le 08 juillet (alors qu'on vit à 500 mètres l'un de chez l'autre). Ensuite? Silence radio. Plus aucune nouvelle, jusqu'aux attentats de Barcelone. Je t'ai souhaité une bonne rentrée, et j'ai senti que je n'existais déjà plus, dans ton univers. Il y a quelques jours, c'était ton anniversaire. Et j'ai pas pu te le souhaiter. Parce que je refuse d'accorder de l'importance à quelqu'un qui m'a laissé tomber, et qui se dira être mon "meilleur ami". T'as foutu en l'air vingt ans d'amitié. Par jalousie, c'est ce que je pense. Parce que je n'ai pas oublié ce soir de juillet, où quand je t'ai parlé de mon expérience à Barcelone, pour que toi, tu appréhendes mieux la tienne, à Buenos Aires, tu t'es senti supérieur à moi, et tu m'as balancé un "Ouais, mais bon, c'est Barcelone quoi..". VA TE FAIRE FOUTRE. Et si tu crois qu'un jour tu pourras croire que je mérite encore que tu m'accordes du temps, sache que de mon côté, c'est terminé, tu redeviens un parfait inconnu qui n'existe plus dans mon univers..

    Et puis il y en a eu deux autres, sur lesquels j'aurais jamais parié qu'ils me soutiendraient, de septembre à juin. Y a eu toi, Gaëtan, qui a débarqué comme un cheveu sur la soupe et avec qui j'aimais bien parler, rire, et me rappeler que la France avait encore de belles rencontres à m'accorder. Mais là encore, tu te dévoiles un peu trop aux gens, et ils en profitent. Maintenant, tu ne cesses de me faire des blagues douteuses et de me rabaisser quant à mes études. C'est pour rire, comme tu dis. Mais tu ne peux pas t'imaginer à quel point, quand tu n'as plus personne comme ami, c'est dur de prendre un "Fais pas semblant de bosser", et de voir que même les gens comme ça n'ont pas confiance en qui tu es, ni en ce que tu fais. Alors Gaëtan, je te remercie d'avoir été chiant, et de m'avoir tenue compagnie pendant toute une année. Mais je pense que toi aussi, tu devrais t'en aller.

   Y a eu aussi toi, Axel. La plus grosse surprise de mon erasmus. Quand même lui arrive à plus me parler que mon meilleur ami. Quand il me parle tous les jours, et qu'il arrive même à me calmer dans les moments difficiles. Et puis quand ce mec si génial te fait un mal de chien, alors que tu te trouves à 1500 putains de km de chez toi. Toi aussi tu mérites un paragraphe. Parce que toi aussi, tu m'as lâchée. Tu m'as lâchée en me faisant payer pour tes conneries. J'avais peut-être pas envie qu'on arrête de se parler, moi. J'avais peut-être encore besoin de ton épaule solide pour y verser mes larmes. Et tu m'as abandonnée. Pourquoi? Parce que monsieur, qui avait une copine, n'était pas capable de se comporter comme un simple ami avec moi. Et c'est moi qui ai récolté les pots cassés, pendant tout ce temps. Alors tu vois, toi, même si t'es sûrement le plus gros connard que j'ai pu rencontrer dans ma vie (quoique j'ai bien envie de décerner ce trophée à Rémy), j'aurais apprécié, pouvoir avoir encore toutes ces heures à converser, pour qu'au moins pendant quelques temps, je me sente un peu moins seule, et un peu plus comprise.

     Voilà, je pense que j'ai fait le tour. A l'heure actuelle, je n'ai plus AUCUN ami. Mon seul ami, c'est moi. Vous m'avez tous salement lâchée parce que j'ai réalisé un rêve, parce que je vous ai aimée, parce que j'ai été trop gentille avec vous. 

     Mais j'ai des bonnes étoiles, qui veillent sur moi, alors que je me situe à 1500 km d'eux, actuellement. Des bonnes étoiles qui prennent de mes nouvelles, qui me demandent quand je reviens, et surtout, des bonnes étoiles qui continuent de briller dans mon ciel. Merci à "mis locos de Barcelona" : Kath, Nico, Paula, Chris, Alexis..

    Alors traitez-moi d'actrice de mélodrama, si vous voulez. Mais vous savez tous que vous m'avez lâchement laissée tomber, alors que j'aurais déplacé des montagnes pour vous.

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