Helena Kork 10
Bob Tass
Trebor Lucas
Je reviens de la zone d’emprunt quand j’aperçois la voiture de César et je lève un peu le pied pour qu’il puisse arriver avant moi. Autant lui laisser l’illusion qu’elle domine la situation à cette Mme Kork.
Je me demande quelle est son expérience en matière de barrage ?
Si c’est le cas elle va me traiter de fou furieux et rendra compte à Investment Fund qui risque alors de suspendre les paiements, quelle merde ce sera. En plus de l’angoisse d’imaginer la flotte dépasser la crête du barrage… Gérer ce fiasco ça va être du sport !
Mais non mon vieux, le barrage est trop avancé ils peuvent plus rien arrêter maintenant sans créer un désastre, c’est toi qui est condamné à réussir.
César vient de s’arrêter et je la vois descendre de la voiture, je m’arrête et je descends moi aussi et marche vers elle.
Maintenant va falloir être bon mon cher Lucas.
Je suis sale je viens de passer une bonne heure avec Thierry au milieu des engins à étudier les prochains bancs de latérite que nous allons exploiter.
Elle doit être propre ça c’est sur, propre et fatiguée par les six heures de route pour remonter de Cotonou jusqu’ici.
Elle fait quelque pas vers moi et nous nous serrons la main, putain qu’elle est belle….
Un peu plus grande que moi, châtain aux yeux bleus, jean beige et chemise bleu ciel, plutôt mince avec des rondeurs là où il faut, son regard comme sa poignée de main est directe et son sourire s’évanouit sitôt ma main lâchée.
Je demande à César si tout va bien et j’invite Kork à me suivre pour contempler la retenue, je sais que le spectacle est saisissant alors autant commencer par quelque chose de beau à regarder.
Sitôt dépassé la crête elle lâche un petit cri de surprise.
C’est plutôt bon signe qu’elle reste ouverte à ce genre d’émotion.
Et puis je l’oublie, je m’envole, le soleil est au couchant et la surface plane et légèrement irisée de l’eau se teinte de tous les reflets dorés des derniers rayons de soleil.
Je reviens à la réalité, si elle aime ce paysage elle aimera la maison, elle comprendra mes arguments quand j’expliquerai comment j’en suis arrivé à démarrer le barrage au moment le moins favorable et elle me donnera le chèque de 700 000 $ pour pouvoir continuer les travaux, et surtout elle ne pensera pas que c’est moi qui ai tué John Andrews.
C’est la relève du soir qui me tire de mes songes.
Venez, partons, je n’aime pas voir quand tout s’arrête.
La maison
Nous prenons sur la gauche une piste qui longe la retenue, la pente est assez forte et très vite nous surplombons cette petite mer intérieure. C’est magnifique.
Quelle sera la superficie de la retenue à son niveau maximum ?
160 km2, soit plus ou moins trois milliards de m3.
Au fait qu’est ce que vous avez prévu pour mon ébergement ?
Pour votre hébergement Madame Korc nous avons deux solutions, soit vous pourrez loger et travailler chez moi, soit vous pourrez loger dans un hôtel convenable à Parakou qui est à 50 kilomètres.
Chez vous ?
Oui, c’est à 4 kms d’ici sur les hauteurs, vous y avez si vous le voulez une chambre avec salle de bain et un bureau qui vous est réservé.
Très bien allons voir ça de plus prés.
La piste continue de monter mollement à flanc du coteau et je la trouve drôlement construite cette piste sans toutefois pouvoir dire à quoi tiens cette impression, je me demande aussi quel type d’hébergement va bien pouvoir me proposer Lucas ?
La piste redescend un peu et nous arrivons enfin sur un vaste terrain plat peuplé de grands et gros arbres, visiblement l’herbe est tondue et la maison est sans doute proche. Lucas ralenti et quand il s’arrête et que quelques lumières s’allument je comprends que nous sommes juste devant la maison.
Je suis épaté comment elle se fond dans son environnement, c’est une construction en longueur bâtie tout en bois sur un soubassement en pierre de taille, sur la façade court une sorte de perron dépourvu de balustrade qui fait penser à la devanture d’un saloon de western, la couleur du bois est d’un brun rouge très chaleureux et le toit est visiblement recouvert de chaume.
Elle à l’air vraiment très belle votre maison Monsieur Lucas.
Merci du compliment mais ce n’est pas ma maison, ce sera celle du directeur de l’usine quand cette dernière sera terminée.
C’est vous qui l’avez construite ?
Oui, imaginée, dessinée et construite.
Nous descendons et Lucas élève la voix :
Antoine………….
Une voix répond :
Oui patron .
S’il te plait, allume les lumières !
En un instant une bonne dizaine d’ampoules illuminent l’espace et c’est vraiment beau.
Allons, venez visiter et voir si elle vous plait autant de l’intérieur.
Lucas me précède puis me cède le passage pour monter les trois marches qui donnent accès au perron. Assez curieusement cette maison n’a pas de porte et je constate que le salon dans lequel nous entrons a été construit autour d’un gros arbre toujours debout, tout est construit en bois, plancher, mur, il n’y a pas de faux plafond et la charpente est visible avec au dessus sa couverture de chaume, je trouve décidément ce lieu très sympa.
Un vieux Monsieur noir apparaît qui me salue.
Je vous présente Antoine Madame Korc, c’est lui qui veille sur le gîte et le couvert, Antoine je te présente Madame Korc, elle va peut être rester quelques jours avec nous.
Je me rends compte tout à coup que je n’ai plus mes bagages.
Mais où sont mes bagages ?
Je les ai mis dans la chambre Madame, si vous voulez bien me suivre………..