Helena Kork 15
Bob Tass
On arrive enfin au chantier, Anne me dis qu’elle va dire bonjour à Thierry et moi je me pose avec Léonie, on regarde ensemble le travail que je lui ai demandé, son travail est excellent et je lui demande de me préparer un recollement des estimatifs financiers et situations réelles.
Mon tableau est à jour je vous l’imprime.
Mais c’est formidable Léonie !
Non non c’est pas formidable, c’est mon travail, j’ai un diplôme de comptabilité vous savez.
Bravo, félicitations. Votre travail est remarquable. Il y a longtemps que vous travaillez ici ?
Ca fait six mois, avant j’aidais Solange et quand elle est partie je l’ai remplacée.
Vous savez où elle est partie ?
Elle baisse les yeux et je sens que ma question la met mal à l’aise. Elle répond tout de même un « Je ne sais pas » qui manque pour le moins de conviction. J’entends Anne parler au-dehors et je me promets de la questionner un peu plus cet après midi.
Dis donc Liana, je meurs de faim, on y va ?
Et vous Thierry vous ne venez pas ?
Non merci je fais la journée continue, je casse la croûte sur place.
Alors bon appétit.
A vous aussi.
Anne progresse à travers le trafic des camions et quelques minutes plus tard on se gare devant la maison que je trouve encore plus belle qu’hier en pleine lumière. La Range est garée devant, j’espère que je vais rencontrer Ludo le chasseur.
On grimpe le perron et le salon est vide, la tête d’Antoine dépasse de la porte de la cuisine .
Bonjour Madame. Bonjour Anne.
Salut Antoine, tu vas bien ?
Oui ça va. Le patron est dans le bureau.
Trebor Lucas
Je regarde partir le Volvo qui tangue comme un doris dans la houle, et prends la piste du nord.
En route je demande à deux chauffeurs de camions s’ils ont vu Ludo, l’un d’entre eux l’a vu sur le lac il y a pas une heure. Inutile de perdre mon temps. Je fais demi-tour, je le verrai probablement ce midi.
Mon esprit s’envole. Son sourire, ses cheveux, ses seins…
Laisse tomber Lucas, cette femme est un flic, elle est là rien que pour voir si tu veux toujours construire ce barrage ou alors te tirer au Venezuela avec le fric.
Arrivé au bureau je fais un petit point avec Léonie et Thierry et je monte à la maison pour voir si les deux turbines Kaplan et l’hydromécanique seront bientôt mise à l’embarquement et reprendre le planning pour répondre aux questions qui vont pas tarder à être posée.
Kork
C’est Anne qui lance :
Dis donc Lucas, tu te montres ?
Je suis au bureau, vous pouvez venir.
On entre et c’est presque comme le mien, le plus : des dossiers ouvert un peu partout.
Le moins : apparemment pas de musique.
Au mur un autre Schiele beaucoup plus hot que le mien, une très belle reproduction de Cranach et une autre inconnue que je mettrai bien sur le dos de Caravage.
Son fauteuil de trois quarts il a les pieds sur le bureau et de la paperasse à la main.
Alors Lian ? Vous avez vue l’usine ?
Oui. Je suis Impressionnée.
Y a pas que vous.
Bon vous allez arrêtez tous les deux… Dis donc Lucas est ce que tu pourrai m’aider ?
Je fais que ça depuis 8 mois….
Toi au moins tu manques pas de culot ! Enfin… C’est que Jeanne d’Arc se plaint d’avoir trop de cash, elle voudrait qu’on passe prendre le fric deux fois par jour, je lui ai dit que ton comptable passerait à 11h et à 16 h.
Et bien voyons… arrange toi avec le comptable, moi je veux pas en entendre parler. En plus tu dois avoir de sacrés paquets de fric ?
Oui, entre quinze et vingt briques tout les jours.
Et avec un minimum de frais en plus….
Ce qui explique que je passe pas ma vie à me plaindre comme toi.
Je vois que tu es en forme. C’est bien.
Tu as vu Ludo ?
Même pas, un de tes chauffeurs m’a dit qu’il était sur le lac ce matin, alors fait demi tour.
Tout en les écoutant parler je m’aperçoit que le regard de Lucas me déshabille littéralement, un regard léger et complètement assumé. Il sait que je sais et ça ne semble pas le déranger le moins du monde. Peut être que je lui plait ? Pourquoi après tout ?
Je dois être finalement aussi légère que lui et nos regards ne cessent de se croiser.
Antoine vient nous dire que le repas est servi et nous passons à table.
Nous commençons à peine une salade verte qu’une voiture se fait entendre et s’arrête dans la cour.
Bon et bien le voila. Lian, vous allez faire la connaissance de Ludo.
Je ne bouge pas puisque personne ne se lève et je vois rentrer un super beau mec, taillé comme un athlète et tout sourire dehors.
Salut tout le monde, bonjour Madame…
Lucas fait les présentations et il s’asseoit avec nous.
En mangeant Ludo nous explique comment il s’y est pris pour capturer sa femelle phaco et ses deux rejetons, visiblement son boulot est plutôt sportif et au vu de son physique je ne doute pas qu’il y arrive très bien.
Lucas me propose du vin que je décline et accepte une bière comme les autres. La suite est excellente, côte de zébu et igname pilé que je découvre pour la première fois.
En parlant je comprends qu’Anne gagne beaucoup d’argent, une fois tout ses frais payés sans doute plus de 20 000 $ par jour. Lucas est certainement un sacré bonhomme pour lui avoir confié ce contrat, il aurait pu le prendre pour lui et n’en a rien fait.
Mais j’ai compris que le fric ne représente rien pour lui. Même pas pour sa propre liberté. Un homme comme lui n’a certainement pas besoin de fric pour se sentir libre.
La complicité qui règne entre eux est réjouissante, visiblement Ludo l’aime beaucoup et je me demande si Anne ne l’aime pas beaucoup plus qu’elle veut bien le reconnaître ?
On finit le repas avec une mangue et un café et Ludo avant de partir m’invite à venir visiter son campement quand j’aurai le temps.
Puis c’est Anne qui prend congé.
Lian, je vais m’allonger une demi heure, à quelle heure je vous envoie la voiture ?
Appelez moi je descendrai avec vous.
D’accord, à tout à l’heure.
Allongée sur mon lit je suis complètement subjuguée par l’odeur de l’ylang ylang qui rentre par la fenêtre ouverte. Glisser ma main dans mon pantalon et appeler Lucas pour l’inviter à profiter d’un petit aparté entre adultes consentants…
J’oserai jamais. Chez Hilman on ne baise pas avec les clients ! Même après deux semaines d’abstinence ?
Lucas me sort de ma rêverie en m’invitant à prendre un café avant de descendre au chantier.
Il fait grand soleil dehors et Lucas me propose de nous asseoir sur le perron, à travers les arbres on aperçoit en contrebas quelques touches de bleu, la retenue.
Comment en arrive t’on à se retrouver dans un bled pareil ?
Dites donc Treb, comment faut faire pour se retrouver ici et y construire un barrage ?
Faut peut être y être poussé par quelque chose…
Je reformule ma question, comment avez-vous fait pour vous retrouver ici et y construire ce barrage ?
Peut être seulement une histoire de volonté !
Devant autant de réticence à me donner une vraie réponse je décide de laisse tomber pour l’instant.
Dix minutes plus tard nous arrivons au bureau.
- Lian, j’ai du boulot à la maison vous pouvez garder César si vous avez envie de bouger.
Ok Treb on fait comme ça.
Je m’assois avec Léonie et on passe une bonne heure à vérifier son travail, je modifie certains détails de présentation et me lance dans la rédaction de mon rapport.
Quand je lève le nez il est 16 h 30.
Léonie elle, a levé le pied et je lui propose d’aller se promener pour décompresser, elle accepte et César nous dépose au bord du lac à cinq minutes du bureau.
C’est ton premier boulot Léonie ?
Non, avant je travaillais pour un commerçant de Parakou, un jour j’ai entendu dire que Solange cherchait quelqu’une pour l’aider, comme ma différence de salaire était conséquente je me suis présentée.
Tu t’entendais bien avec elle ?
Oui très bien.
Tu dois être déçue qu’elle soit partie ?
Oui un peu mais en même temps ça m’a donné accès à plus de responsabilité.
Tu t’y attendais un peu non à son départ avec John ?
Pardon de vous dire ça Madame, mais je n’y crois pas du tout à cette histoire. Pour moi Solange n’est pas partie avec John. A mon avis il sont partis chacun de leur côté parce que je ne crois pas qu’ils étaient amants. Ca doit être juste une coïncidence.
Est-ce que Monsieur Lucas et John s’entendaient bien ?
Au début très mal, Monsieur John disait qu’il allait faire arrêter les travaux à cause de la pluie. La dispute a été très forte et puis Monsieur Lucas lui a proposé d’attendre deux semaines avant de faire une grosse bêtise. Après ces 15 jours il m’a semblé qu’ils s’entendaient bien.
Et comment il était John ?
Très gentils avec tout le monde.
Il restait toujours ici ?
Non, il dormait en ville. J’ai entendu dire qu’il avait une amie à Parakou, une métisse qui tient l’Hôtel Paradisio, Mademoiselle Josiane. C’est pour ça que je ne crois pas que Solange soit partie avec Monsieur John. Mais César est au courant, il en sait beaucoup plus que moi, vous pourrez le lui demander si vous voulez. Et puis….
Et puis quoi ?
Je sens que Léonie est bien embarrassée pour poursuivre.
Léonie, je te promets que ce que tu as à dire restera entre nous…
Promis ?
Oui, je te promets.
Alors voila, une semaine après son départ elle a été vue seule au marché de Parakou, et récemment, peut être une dizaine de jours Monsieur Lucas a été vu avec elle à Cotonou. Voila ce que je sais Madame Héléna.
Je te remercie Léonie. Allez on rentre il est 17 h 30 !