Helena Kork 6
Bob Tass
Quelle soirée de merde que ce soir là, envie que d’impossible, envie que d’attention. D’écoute et d’écouter devant une bouteille de vin français, l’espace d’un instant j’eus envie d’appeler Kill et de lui dire que je venais d’ouvrir une bouteille de Palette et que ça m’embêtais de la boire toute seule……..Non je vais pas lui faire un coup pareil. Appeler qui alors ? Franck, mon dernier petit ami shooté à la coke pour lui faire surmonter ses angoisses prises à acheter et vendre ses produits dérivés, l’écouter me parler interminablement de ses derniers coups sur 500 000 tonnes de soja brésilien ou sur 200 000 tonnes d’aluminium russe ou encore sur la dernière Porsche que ses affaires lui ont permis d’acheter ? Appeler Laurette pour savoir si elle est à Paris ? Ou alors Clara pour voir si elle est à Genève, si je peux pas faire un aller retour vite fait au bord du lac ?
Et puis je me met à rêver……………..Haiphong Station, 45 minutes de voiture, rentrer dans ce bar, embrasser Nando, Wall et John, parler à Burny et aux serveuses si gentilles, regarder John à la dérobée, croiser son regard et lui dire des yeux que je le désire, que je voudrai bien connaître le goût de sa peau et de son sexe. L’écouter parler, essayer de panser après si longtemps sa blessure encore béante.
Quand je me réveille il est quatre heure du matin. Comment j’ai fait pour m’endormir sur le canapé ? La bouteille vide de château Simone qui traîne sur la table basse est une explication.
Il me reste des heures de sommeil à prendre, je me glisse dans mon lit et j’étreins mon oreiller qui me réponds que lui aussi il m’aime et qu’il part demain pour le Sud de l’Afrique, qu’il ne peut pas me donner de numéro de téléphone mais qu’il me rappellera si je lui donne le mien.
Je me réveille vers 7 h et je reste à traîner au lit, il est 8 h quand je me lève pour de bon, de savoir que Kill va passer me met de bonne humeur, j’ouvre le dossier « Dékoussou » devant un café et je passe deux bonnes heures dessus, c’est vraiment un petit truc, un barrage poids de quatre millions de m3 avec deux petites turbines de 6 mégawatts, la retenue elle est très grande ce qui va permettre de turbiner à fond la caisse 12 mois sur 12 malgré 8 mois par an sans une goutte de pluie, vraiment pas mal ce projet, petit et malin. Au planning ils doivent être en train de réunir les équipements et de terminer les plans d’exécution en attendant la fin de la saison des pluies qui bat son plein en ce moment. Il est 10 heure quand j’appelle Laurette, elle est en Suède pour la semaine, j’essaie Clara, son assistante me répond quelle est au bureau et qu’elle va rappeler. A onze heure je suis sous la douche puis je m’habille et à onze heure quarante cinq je remets le nez dans « Dékoussou » pour voir si j’ai rien oublié.
Un moment plus tard ça sonne et je dis à Kill de monter.
Il cogne à la porte et je lui ouvre.
Salut Kill, ça va ?
Oui pas trop mal, tiens voilà ton ordre de mission, ton passeport avec les visas France et Bénin ainsi que 5 000 $ en liquide pour ta caisse.
Merci, tu prends un verre ? Rouge ou blanc ?
Dis donc tu carbures toujours au …………comment y disent déjà les français ? Au binard ? C’est ça ?
Oui c’est ça : je carbure au binard comme tu dis !
Alors ce sera du rouge !
Je vais à la réserve et sort deux bouteilles, une d’un très bon Irouléguy et une autre de Corbières, je sais que Kill n’est pas très connaisseur en vin et je profite de l’occasion pour parfaire sa culture, je lui explique les origines, les climats et les cépages. Il vote pour le Basque et je l’ouvre.
Alors ma jolie fin prête ?
Oui, j’ai bossé un peu le truc, c’est pas gros et plutôt bien ficelé, tu connais le promoteur ?
Pas du tout, mais j’en ai entendu causé par John et Barley, un drôle de mec avec un sacré tempérament d’après lui, une vie agitée, bourré de courage, pas un mec d’ici… Au début John disait que ce mec était fou, quinze jours après il pensait le contraire. Enfin quoi tu verras bien ! Tu nous raconteras.
Et toi tu fais quoi ces quinze jours ?
Rien de spécial, quelques réunions à Washington, la routine. Ça marche bien en ce moment pour nous, c’est plutôt Barley qui rame avec les négociations du Tchad du Soudan et de l’Angola, quel foutoir ce continent !
Tu est retourné à l’Haiphong Café ?
J’y vais ce soir. Si tu veux venir ? je crois qu’il y aura Emiliano et Alain, c’est des potes qui bossent avec John le pilote, celui qui souris jamais, il viennent de Panama et ils doivent descendre sur Marietta pour repartir en Afrique avec leur avion qui était en révision chez Lokheed, ce sont deux mecs vraiment très sympa qu’on ne vois pas très souvent par ici.
J’aurai presque pu profiter du voyage pour partir avec eux…………..
Là je crois pas, la plupart du temps ils tirent droit sur la Namibie ou l’Afrique du Sud, je les vois pas bien faire du porte à porte ces oiseaux là.
Dommage……………. moi ça m’aurais pas déplu.
Ca je m’en doute, j’ai bien vu comment tu regardais John.
Là tu exagères Kill…………….. tu exagères un tout petit peu………….
Un tout petit peu oui, et c’est si un jour tu croises Emiliano que tu regretteras vraiment, un beau mec, une copie de Andy Garcia avec un sourire………… et un regard qui fait peur des fois quand il durcit. John nous dis souvent que c’est un mec exceptionnel, un homme imperméable à la peur, enfin quoi un homme avec un passé.
Dis donc Kill tu veux manger un morceau ?
Non merci je vais rentrer au bureau, je bosse moi !
Franchement t’est gonflé !
Y a du vrai là dedans, c’est quand même toi qui vas te bouffer le décalage horaire ! Bon allez salut Liana, bon voyage et bosse bien !
Je le raccompagne à la porte, je referme et pose mon front sur cette porte, j’ai envie de crier « Non Kill ne part pas, ne me laisse pas toute seule ici ! ».