Histoire d’eau un 1er mai à Paris…

ismahan

Sans muguet, beaucoup d'eau, et des milliers de clochettes de bonheur.

« Au mois de mai, fais ce qu'il te plait ! » Le ciel tout content décide de laisser la pluie s'en aller, tomber, recouvrir de flaques les rues et les avenues de Paris. Je me réveille au son de l'eau qui martèle le sol. Un flic-flac qui sonne comme une mélodie de printemps, rythmée par les nuages qui tantôt épars, tantôt regroupés donnent le tempo à l'eau. Je me réveille en me disant que la journée sera aqueuse ou ne le sera pas. Elle le sera. Je me propose : « Quoi de mieux que d'aller faire trempette dans un bassin ? »

 

Douche, café, tartines. Je cherche maillot, serviette, lunettes, bonnet. Tout est prêt pour plonger dans l'aventure des antres aquatiques parisiens, rencontrer les fonds bleus et les ciels gris des piscines de la capitale. Un rapide tour sur Internet pour trouver la piscine la plus proche. 5ème non, 13ème non, allez essayons le 17ème, porte Champerret. Il est onze heures. L'imperméable revêtu, le sac à l'épaule, l'expédition est en branle. Quand la chance est au rendez-vous, même les bus en jour férié font l'effort d'arriver à vous quand vous avez besoin d'eux sans trop d'attente. Le 54, ligne héroïque s'il en est parmi les lignes de bus parisiens, arrive, affichant fièrement son nombre lumineux bleu phosphorescent. Il s'arrête à la station comme une calèche qui vient chercher sa gente dame pour l'emmener là où elle le souhaite. Arrête de rêver ma belle ! Je monte tant bien que mal. Les touristes sont légion, sac à dos au dos, valises dans les allées. Les « da » et « konetchno » fusent. Les russes adorent notre capitale. J'adore entendre parler russe. L'âpreté des syllabes se mêle à la douceur de l'intonation, créant une mélodie finale très agréable à écouter. Le chauffeur, tel un gardien de temple, demande à l'un des touristes devant moi de bien vouloir mettre à terre son gros sac à dos car il risque de blesser quelqu'un. Moi en l'occurrence. Je remercie d'un sourire le gentil chauffeur qui fait attention à moi. C'est encore mieux qu'un brin de muguet son attention, c'est trop mignon.

Bus stop à Place Clichy. Je prends maintenant le métro, arrêt porte Champerret. Ma motivation est digne de celle d'une championne. Aujourd'hui, «nager ou ne pas nager, that is the question». Pourquoi nager ? Pour dire à l'eau d'emporter mes tensions, mes rétentions. Me donner motivation et détermination. Accessoirement, pour rendre ma cellulite désirable avant l'été. A défaut de la supprimer totalement, on peut tenter de la rendre désirable. Ce qui est un objectif plus atteignable que ne pas en avoir du tout, non ? J'arrive à la piscine. Je ne la connais pas. Ah, ici les casiers sont avec code. Bien, je cherche une cabine. Je me dévêtis avec joie. C'est un moment à moi. J'enfile le maillot, mets le bonnet, emporte les lunettes, range mes vêtements. Le tout dans le casier 422. Je me dirige vers les douches. Certains nageurs plus courageux que moi s'en vont déjà. Il est 11h45. Une petite douche pas trop froide, je dépose mon sac et me dirige vers le bain. Je regarde les lignes pour déterminer celle qui m'accueillera. Je ne suis pas rapide. J'essaie de trouver celle où les nageurs ne sont pas trop performants. Allez, je prends la première, on verra bien. L'eau est assez fraîche. Mais après une ou deux longueurs, on doit s'y sentir bien. Je laisse passer une nageuse pour conserver comme sur l'autoroute une distance de sécurité. Je me lance sur le dos.

Peut-être avez-vous déjà ressenti ce bien-être de l'eau sur le corps, où grâce à vos mouvements, vos seuls et uniques mouvements, vous bougez dans l'eau comme si vous étiez mû par une énergie qui vous propulse, sans moteur ni appareil ? Où la vigueur du corps, heureuse d'être sollicitée, s'en donne à cœur joie et vous dit « tu peux vas-y, je suis çà y est ». Où vous êtes en harmonie avec votre cerveau, votre cœur, votre corps. L'harmonie des trois « C » dans l'eau, c'est trop bon. Quand vous nagez sur le dos, vous laissez glisser au fond du bassin tout ce qui pèse et vous alourdit. Opération largage total. Vous serrez la ceinture abdominale, les yeux vers le plafond, vous décidez de faire la longueur d'une traite. Les bras l'un après l'autre vous font avancer, en coordination avec les battements de pieds. Vous vous surprenez à penser que vous êtes un nénuphar surréaliste, qui, au lieu de dériver, se dirige déterminé vers l'autre rive. Je suis arrivée. Je reprends mon souffle et prends une minute pour scruter l'étendue du bassin. Je suis admirative de tous ces êtres qui viennent soit se détendre, soit véritablement faire du sport. Tous ces corps se fondent dans l'eau en une ondulation unique et tonique. C'est dynamique !

Je continue à aller et venir, toujours sur le dos. La fatigue dépassée, je me sens pousser des ailes. Aérienne dans l'eau. Sensation de fraîcheur délicieuse de l'eau alors que la chaleur de l'effort se fait sentir sur le visage. L'horloge indique 12H50. Je suis contente. Près d'une heure où j'ai laissé mon corps suivre son rythme, en forçant, sans forcer. Je sors du bassin. J'aurais aimé être une sirène. On est si bien dans l'eau. Tout est fluide, sans heurts, tout glisse. Je prends ma douche, m'habille, me sèche les cheveux. Je quitte la piscine. Il pleut encore plus que le matin. Je prends un bus direction Porte de Clichy cette fois. Comme à l'aller, aucune attente. C'est formidable ! C'est comme dans l'eau, tout glisse. J'arrive Porte de Clichy. Les vendeurs de muguets entourent l'entrée de la bouche de métro. Tiens, je n'ai pas acheté de muguet. Qu'on soit le 1er mai ou non, à celui ou celle qui lira ces quelques lignes, j'y rajoute des milliers de clochettes de bonheur !



  • Quand tout glisse, tout est juste... :) et vive le mu.... gai ;)

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Ange

    Apolline

    • Yes indeed !!! Et n'oublions pas de faire TOUT CE QUI NOUS PLAIT !!:)

      · Il y a plus de 10 ans ·
      2014 03 09 16.49.14 2

      ismahan

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