Il était une fois....Ma mie

ake

Il était une fois, sur île ayant la forme d'un papillon, une grand-mère ni trop jeune, ni trop vieille, une petite grand-mère ayant suffisamment d'énergie pour pouvoir s'occuper de ses petites affaires, comme elle aimait le dire, qui vivait dans une grande maison dans une des communes les plus fraîches de l'île papillon. Cette grand-mère que beaucoup appelaient Lili au lieu d'Eulalie, vivait seule dans cette grande maison jadis occupée par son mari et ses enfants. Monsieur s'en était allé vers des Cieux qu'elle lui souhaitait plus cléments et les petits étaient devenus grands et étaient partis vivre leur vie.

Elle était donc seule… enfin pas si seule si on comptait Elfy sa chienne, qui avait tendance à se prendre pour un kangourou et adorait sauter sur les gens. Eulalie vivait donc avec sa chienne et ses oiseaux. Elle n'avait pas vraiment d'oiseaux, non elle aimait juste les nourrir le matin et le soir elle prenait plaisir à les voir passer devant sa porte quand le soleil se couchait.

Eulalie se sentait parfois si seule dans sa grande maison. Ses amis et ses enfants venaient parfois la voir, l'appelaient souvent mais ça ne changeait pas grand chose à son sentiment de solitude. Ses deux grandes filles qui vivaient aussi sur l'île la trouvaient envahissante, embêtante pour rester polie, curieuse, râleuse, etc, etc. Quand à son fils, son petit dernier qui vivait si loin, il ne donnait que peu de nouvelles et quand il appelait, Lili constatait avec tristesse qu'il n'avait jamais rien à lui dire.

Toutes ces petites choses l'attristaient mais elle les confiait au Seigneur et gardait le moral quoi qu'il en coûte. Quand la peine devait trop dure à porter elle mettait un cd de louange et louait le Ciel tout en dansant mais ce soir elle ne chantait pas. Assise sur son canapé, les albums photos des enfants sur les genoux, elle regardait ses petits devenus grands un léger sourire aux lèvres.

Il y avait son aînée, Agnès sa petite fille au ventre rond qui était devenue institutrice et qui vivait tant bien que mal, essayant de surmonter les difficultés de la vie, sa cadette Carole, la forte de caractère et Alain le timide devenu Alain l'absent.

Ces deux filles occupaient toujours ses pensées, du réveil au coucher elle s'inquiétait pour elles et plus particulièrement pour Agnès, si fragile, si vulnérable, si cassée. Cette immense attention provoquait parfois la jalousie de Carole qui se sentait délaissée, mal aimée ce qui était loin d'être le cas, c'est juste que pour Eulalie, sa cadette était forte, pleine d'énergie, soutenue par l'homme qu'elle aimait et qui l'aimait. Sa mère pensait qu'elle pouvait tout surmonter, tout endurer peut être se trompait-elle il est vrai, mais ne s'occupe t'on pas plus de l'enfant malade que de celui en bonne santé ?

Eulalie en avait fait des choses pour ses enfants, plus ou moins gratuitement, leur rappelant maladroitement les sacrifices effectués mais qu'elle ne regrettait pas toujours, voire jamais. Elle s'était investie sentimentalement, financièrement auprès d'eux et auprès des ses petits-enfants. Leur indifférence, et l'agacement qu'ils lui montraient après des coups de fils trop répétés, des questions jugées trop intrusives, son insistance quand elle n'arrivait pas à les joindre lui faisait parfois de la peine. Elle savait qu'elle en faisait trop mais à son âge peut-on encore se corriger ?

Lili les avaient regardé grandir avec plaisir et inquiétude, elle avait essayé de les aiguiller en vain, ses conseils n'étant pas toujours écoutés, elle s'était parfois imposée, avait redressé, arrangé, réglé des situations compliquées, avait soutenu, écouté, s'était inquiétée, avait ri, souri, pleuré à cause d'eux.

Le temps était passé mais n'avait pas amoindri l'amour qu'elle ressentait pour sa chair et la chair de sa chair, un amour qui, de par son intensité, la blessait parfois.

Avec un sourire elle tend l'album photo à une jeune femme, l'aînée de ses petits-enfants. Celle ci regarde en souriant la jeunesse de sa grand-mère puis ses yeux se posent sur son visage marqué par les ans. Même si parfois elle sait se montrer désagréable envers elle, filtrant ses appels, lui répondant mal, vivant mal ce trop plein d'amour et de conseils. Il n'empêche qu'elle l'aime plus que tout au monde et que chaque fois qu'elle prend l'avion pour retourner à sa vie elle se demande si elle retrouvera sa mamie à son retour. Quand dans les rues de Paris se trouve une personne âgée elle ne peut s'empêcher d'avoir une pensée pour sa grand-mère, seule dans sa grande maison.

Elle aimerait la savoir moins seule, plus entourée mais elle sait que les autres membres de la famille ainsi qu'elle même on une vie et que malgré leur amour pour elle, ils ne la sacrifieront pas pour aller supporter son sacré caractère.

Il était une fois, sur une île en forme de papillon… dans une grande maison entourée d'un grand jardin vit ma grand-mère. Cette grand-mère qui parfois m'exaspère, m'horripile, me court sur les nerfs, je l'aime et je l'admire. Depuis la mort de mon grand-père, elle a tout fait pour nous, elle a tout donné et cela malgré ses maigres moyens.

C'est vrai ce n'est pas la meilleure mère au monde, ni même la meilleure grand-mère, mais ce n'est pas la pire, loin de là. C'est une femme extraordinaire qui malgré les difficultés, les tristesses, les coups durs, soutenue par sa foi est restée debout et nous a aidés du mieux qu'elle pouvait.

Ma grand-mère est une Reine, pas parce qu'elle est parfaite mais à cause de sa force et de son courage.

Normalement la fête des mères célèbre les mamans mais si ma mère n'en avait pas eu une, je ne serais pas là. Alors j'ai décidé d'écrire ce conte qui n'en est pas vraiment un. Le personnage principal n'a pas vécu de moments romanesques, elle n'a pas combattu de sorcières ou de dragons, ne s'est pas faite sauver par un prince, non.

Elle a juste élevé trois enfants, et deux petits-enfants, a survécu au décès de son mari, de certains membres de sa famille et amis, à la maladie. Ma grand-mère elle a juste encore et toujours affronté la vie en ne jamais se décourageant.

Et pour tout ça je remercie le Ciel et te remercie... Mamie.

Signaler ce texte