Il ne viendra plus...

pensee-solitaire

Assise sur le bord de ma fenêtre, je contemple le monde qui s’étend à perte de vue sous mes pieds. Il doit être aux alentours de deux heures du matin et la rue est déserte. Ce silence est pesant. Je sais que c’est trop tard maintenant, il ne viendra plus…

La musique s’est arrêtée, les plats ont refroidis et les bougies sont consumées depuis longtemps. C’est Marie qui les avait allumées, juste avant de partir avec un grand sourire. Elle m’avait montré les doigts croisés de ses mains comme pour me donner du courage. Si seulement elle savait…

Demain, elle apprendrait la nouvelle elle aussi. Elle viendrait en courant jusqu’à mon travail, les larmes aux yeux, elle hurlerait mon prénom dans les couloirs et à ma vue elle s’écroulerait. Je ne pourrais pas lui expliquer, elle croyait en nous. En même temps, moi non plus je ne comprends rien…

Elle ne le voyait déjà plus à cause d’un malentendu, pourtant c’était son meilleur ami. Elle me disait toujours de ne pas m’inquiéter et elle me donnait des mouchoirs lorsque je pleurais. Je suis sûre qu’elle me dira que c’est injuste. Oui, injuste…

Elle le traiterait de tous les noms et voudrait lui taper dessus. Je resterai calme face à elle pour la consoler et c’est sur moi qu’elle taperait. Ce sera un beau tableau, elle et moi, dans les bras l’une de l’autre en train de pleurer à chaudes larmes. Il faudra que je prenne des mouchoirs…

Heureusement, il n’y a personne pour voir le mascara qui a teinté mes joues en noir. Je me suis retenue tout le long du trajet et j’ai souri avec Marie lorsque je suis rentrée. Je crois que je lui ai souri aussi quand il me l’a annoncé. Je l’ai même félicité…

Il est arrivé à l’heure du goûté et j’ai tout de suite vue que ça n’allait pas. J’ai fait comme si je n’avais rien remarqué. Il m’a annoncé qu’il ne viendrait pas ce soir. Je lui ai demandé pourquoi en me faisant chauffer l’eau du thé manière de ne pas le regarder en face. Il m’a dit qu’il ne viendrait plus…

J’ai posée ma tasse parce que ma main tremblait. Je l’ai regardé droit dans les yeux, il les a détourné. « Je vais devenir père. » Il l’a lâché d’une voix tremblante, presque dans un murmure. Je n’ai pas compris de suite. Je n’étais pas enceinte…

Il avait les mains qui tremblaient tout comme ses lèvres, ses yeux semblaient humides. Il fixait le carrelage. C’est là que j’ai compris. Il m’a demandé de lui dire quelque chose. Qu’est ce que je pouvais lui dire ? Je l’ai félicité…

Il m’a regardé sans comprendre. Il pensait que ça ne m’affectait pas. Il a pressé ses poings et a ravalé sa salive. Je lui ai tout de suite demandé si il comptait l’épouser. Il a juste hoché la tête sur le côté. Il a toujours été vieux jeux…

J’ai enlevé ma bague et la lui ait tendu. Il l’a refusé, il me l’avait offerte, elle m’appartenait. Je lui ai répondu qu’elle devait coûter très cher, il n’aurait pas les moyens d’en acheter une autre aussi belle. Il m’a répondu qu’il souhaitait que ce qu’elle lui avait dit ne fût qu’un mensonge…

Il s’est excusé, me disant qu’il ne comprenait pas comment cela pouvait être possible. Il se sentait désemparé, comme dans un cauchemar. Il m’a dit qu’il avait toujours cru que ce serait moi qu’il embrasserait devant l’hôtel. Je lui ai répondu que moi aussi…

Ce n’est pas un salaud, juste un homme qui a demandé la main de la femme de sa vie et qui s’est heurté à un refus de sa part. Nous étions loin l’un de l’autre et cela me pesait. Nous marier n’aurait rien changé à l’histoire. J’avais tout de même gardé la bague, au cas ou…

C’est a cause d’elle que tout le monde a cru que je lui avais dit oui. Nous n’avions rien démenti. Au bout d’un an, il a rencontré une fille et il est sortit avec elle. Avec mon accord. Il pensait que cela me rendrait jalouse, que ça me ferait réfléchir. C’est elle qui est enceinte maintenant…

Je la comprends, moi non plus j’aurai tout fait pour ne pas le lâcher. Il est beau, séduisant, intelligent, il a une bonne situation professionnelle et un grand appartement. Il est attentionné et a beaucoup d’humour. Le meilleur de tout, je l’aime et il m’aime…

Il me suffit juste d’attendre neuf mois pour être sûre. Neuf mois à espérer que ce ne soit qu’un mensonge. Neuf mois à prier pour qu’elle tombe dans les escaliers. Neuf mois à me torturer et à désespérer, taper dans les murs, et pleurer à ma fenêtre…

Ma seule solution est de prier pour que je tombe maintenant et que je meure sur le coup si seulement elle devait vraiment avoir un bébé dans le ventre…

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