Impromptus du territoire

Jean Claude Blanc

bientôt élections municipales; élu moi-même d'un village, on nous délaisse, mais on paye, électeurs bougez-vous

              Impromptus du territoire  (la raison du pourquoi)

 

Venu le temps des élections

Pour quel bel maire, va-t-on voter

Si on écoute qu’en-dira-t-on

Guère de monde, va pointer

C’est une campagne misérable

Qui se prépare, dans les bourgades

Même la nature est plus affable

Sauvage, brutale, mais équitable

Trois chiens pelés et chats tondus

Candidater devient ardu

Vite fait le tour de la commune

Jeunesse enfuie pour d’autres fortunes

Pas de listes à n’en plus finir

Sur ta dégaine, on va t’élire

Sortis de la cuisse à Jupiter

Sont recalés, car bien trop fiers

36000 villes, bourgs et hameaux

Vous trouvez pas, c’est un peu trop

Pour recenser, j’y vois pas beau

Faut rajouter, grives et corbeaux

Un tour de piste juste pour voir

Considéré, ou remercié

En plus, si t’es un étranger

Tu vas rester dans l’isoloir

Ça fait envie de s’afficher

Mais on a peur d’être insultés

Générations de préjugés

Un peu de honte, vite passée

Et c’est ensuite, que ça se gâte

Prendre les rênes, faut être foutraque

On ressort les vieux de la boite

Sont habitués, n’ont pas le trac

Fleurissent, missives anonymes

Qui dégueulassent l’intimité

Hélas, ce n’est pas du ciné

Les lâches traitres, en douce, fulminent

« Un tour de roue, passe la Roue »

Fameux dicton, bien de chez nous

Histoire de dire, à toi d’en chier

Mais si tu crânes, on va te piler

La politique, on connait pas

C’est sur la gueule, qu’on est jaugé

Comme au Far-West, chacun sa loi

Et les vaches seront bien gardées

Porte-parole des muets

Des citoyens, de nos contrées

Quand c’est le jour de l’érection

On se rassemble, à coups de canons

Y’a pas beaucoup de distractions

Bien arrosée la communion

On n’y peut rien, de toute façon

Prévue d’avance, l’absolution

Les partis pris, faut faire taire

Sans politiques adversaires

Chacun son clan, la messe est dite

Mais les cancans, sont sans limites

On va voter, et puis après.. 

Fraîchement élus, bien avancés

Plus de lendemains que de jours

Après la gloire, le désamour

Quelques semaines, becs cloués

Personne n’ose, l’avouer

Pour qui dimanche, il va pencher

Lui-même hésite, ne le sait

Dernier moment, va décider

On m’a élu, me voyant venir

J’ai appris l’art, des soupirs

Majorité, minorité

Me suis trouvé du bon côté

Querelles perso, mises en sommeil

Drôles de réunions du Conseil

Chacun défend son patrimoine

Son bout de bois, sa terre arable

Mais à la fin, copains, coquins

Vont boire un coup, bistrot du coin

Ça durera pas, ça c’est certain

Les élections, attisent la faim

Toutes les clameurs, se sont tues

Plus de commères, dans les rues

Car on craint bien d’être cocus

Par le suffrage absolu

Ce que demandent les citoyens

Je devrais dire bandes de radins

C’est qu’on goudronne leurs chemins

A quoi il sert, le maire, enfin !

Je les adore, mes congénères

Même commencent à me plaire

Sont si futiles leurs colères

Qu’on s’enguirlande, pour avoir l’air

Mon existe, plantée ici

Car je n’y compte, que des Amis

Leurs calomnies, c’est que du bruit

J’y fais plus gaffe, les ai compris

Verte vallée, et genêts d’or

Doux voisinage et réconfort

Le partisan, du moindre effort

Lui se prélasse, pilule se dore

Les fâcheries, c’est pas son fort

Refaire un tour, pour des prunes

A quoi ça sert d’aller aux urnes

Ça ne rapporte, pas une tune

Que des emmerdes, et des rancunes

Suis pas adepte, de vaines parlotes

On me cajole comme une chochotte

Question déconne, reste votre hôte

Demandez pas, pour qui je vote

Des grands destins, on en est loin

Car sont bien vides, nos patelins

La République en minuscule

Pas tant de monde, s’y bascule

En vieillissant, je m’aperçois

Que suffit pas, donner de la voix

Encore faut-il avoir la foi

Pour partager, peines et joies

Le roitelet est éphémère

Ne s’en fait pas, car il voit clair

Ne dure qu’un temps, la charge de maire

Va retourner, à l’ordinaire

En attendant, je vais voter

Sais pas à qui tendre le manche

Mais pour l’instant, pas concerné

Tellement, j’ai marre des emmanches

D’être reconnu et chouchouté

Par mes anciens, ces puits de science

C’est ma façon, de participer

Pas revancharde, ma conscience

Pas l’Elysée, manque de chance

Ce n’est pas rose tous les dimanches

Pas d’assistants, ni de télé

Le maire, lui seul, détient les clés

Mais en prenant de la hauteur

On se rend compte, de nos malheurs

Nos territoires, sont oubliés

La République, nous a lâchés

Edile, ce n’est pas un métier

Pourtant utile aux administrés

Pas de moyens, manque d’argent

Est tellement grand département

Vous qui allez demain gérer

Par bénévoles interposés

Dites-vous bien, qu’on est ruiné

Mais pas la faute aux conseillers

L’Etat se vante, baisser l’impôt

Nous colle ses dettes sur le dos

Petites communes, à vous de cracher

Peler la peau, des roturiers

Concitoyens, sont vaches à lait

A la mairie, vont ronchonner

C’est pas normal, ça leur rappelle

Du Président, les ritournelles

Je vous avoue, je suis déçu

Je ne suis pas un parvenu

Par amitié, m’avez élu

De vous la rendre, je n’ai pas pu

Faut faire toujours la distinction

Car notre bled, pas Matignon

On se dépense pour pas un rond

Quand à Paris, on tient salon

Alors, allez voter, et pour qui vous voulez

Sinon nos territoires, dont on se fait la gloire

Seront demain gérés, par fonctionnaires zélés

En fait des étrangers, ignorant nos histoires

JC Blanc         janvier 2014

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