J’AI PARLE A MON PERE CETTE NUIT …

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« Prends-tu plaisir à vivre ainsi, Fayçal ? ». Papa me fixait, impénétrable, lorsqu’il me posa cette question. 

J’étais allongé, prêt à dormir lorsque mon père m’interpella. Il semblait préoccupé, inquiet peut-être. Papa s’est toujours imposé le rôle du bon samaritain de la famille, s’inquiéter pour autrui était devenu une manie chez lui. Depuis bien trop longtemps …

Par contre, poser ainsi la chose, de manière aussi abrupte, me blessa sur le coup. Je ne voulais pas paraître vulnérable face à lui. Encore moins aborder les affres de ma vie privée avec mon paternel. Pleurer sur son épaule, quel cliché … 

Je feignis de ne pas savoir quoi lui répondre, sans pour autant être crédible. Je ne savais pas quoi lui dire. Lui révéler la vérité m’aurait amené à fondre en larmes, je me connais … Feindre cette vérité, par contre, n’aurait servi à rien : il connaît tous mes tics de langage, en particulier lorsque je mens. Ne pouvant donc lui répondre, nous nous terrâmes dans une gêne palpable, à couper au couteau.

Papa se posa sur mon lit, tout doucement. Une réponse lui était nécessaire, je le sentais. Laquelle pouvais-je lui donner ? J’essayai de fuir son regard, sans résultat. Une IRM serait désuète face à ces yeux. Je ne pus résister davantage : 

« Non, Papa. Je ne prends aucun plaisir à vivre ainsi, comme tu le dis … Il n’y a pas un jour où je ne me maudits pas, où je ne me vomis pas. Le monde auquel je suis confronté, jour après jour, ne m’accorde aucun répit, ni paix. Je n’arrive pas à faire la moindre projection, ne vois rien pouvant agrémenter mon quotidien d’un salut plus que nécessaire … Ce qui m’ulcère le plus est que je tente de fuir les gens alors que j’exècre, je hais, je suis terrifié par la solitude. Comment-as-tu pu réussir à trouver l’amour dans ce putain de chaos ? Comment as-tu pu être heureux sans pour autant trouver les gestes ou les mots pouvant me réconforter, m’aider, m’accompagner dans mes fourvoiements ?  

- J’ai eu la chance que tu n’auras jamais, Fayçal. Un lourd tribut à payer fut nécessaire, Il m’en a coûté beaucoup trop. Mais j’ai pu, grâce à cela, connaître et jouir de ce dont tu t’impatientes continuellement, vainement … »

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Je me réveillai brusquement, les yeux baignés de larmes … Me rendant compte que je ne faisais que rêver, je tentai de me souvenir du visage de mon père. Effort vain … Je ne l’ai jamais vu.

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