Jamais dans le même fleuve.

Christophe Hulé

L'amitié c'est comme le couple, on s'est connu, apprécié ou aimé, et puis le temps a passé.

Chacun son devenir.

« Tu as changé » !

« Toi aussi j'te f'rais dire » (zézette).

Oui, on ne se baigne jamais dans les mêmes eaux.

Ceux qui ont voulu renouer avec d'anciens amours en ont fait l'amère expérience.

Ce qui m'animait jadis, en quoi je croyais dur comme fer, est passé à la moulinette du temps.

L'étape ultime est le dégoût du noyau familial, qui pour un temps plus ou moins long a été la seule référence.

Malgré tous ces souvenirs merveilleux, on garde l'impression d'avoir été berné.

C'est pas ça la vie.

Oui mais la vie c'est quoi ?

Le détachement n'est pas affaire de volonté, on se détache car on a plus la foi.

Les chanceux, de moins en moins nombreux, tenteront avec succès de reproduire le cocon originel.

Quelques êtres chers sur qui on peut compter, un(e) conjoint(e), ou autre type de contrat, et des enfants.

Mais les statistiques disent autre chose, on décompose et on recompose.

Elles sont loin les années des guirlandes de Noël, des boums et des premiers flirts, on se posait moins de questions alors.

« Tu t'amendes ou tu dégages ».

Qu'en termes élégants ces choses là sont dites.

Première blessure et non des moindres, alors l'amour et tout ça c'était que des conneries.

Pour voler de ses propres ailes, il faut avoir appris, là est l'arnaque.

Certains ont vite compris, enfin ceux qui n'ont jamais connu de parenthèse enchantée, un gain de temps et un atout.

« J'ai rien d'mandé, je n'ai rien eu, mais j'ai fait ce que j'ai voulu » (Serge Lama).

Des embarcations plus ou moins fiables et la houle plus ou moins forte, de petits ou de gros naufrages, de désillusions en désillusions, parfois quelques havres de paix, où l'on sait ne pas pouvoir rester très longtemps.

« Vous obéissez ou vous dégagez ».

Puis vient le temps du mal de dos et du vague à l'âme.

Le temps où les regrets fatiguent.

J'aurais dû faire ceci, j'aurais dû faire cela, que n'ai-je … etc.

Et nous voilà échoués quelque part, un peu groggy c'est sûr.

Peinards pour la plupart, comme chantait Léo, mais pas très utiles.

Il me reste trois ans à travailler, cinq si je veux le beurre dans les épinards.

Vais-je tenir si longtemps dans l'état où je suis ?

Mais si je veux déployer mes vieilles ailes et ne dépendre de personne, ai-je vraiment le choix ?

Un jour je dégagerai pour de bon, qu'on ne compte pas sur moi pour m'amender.

Et de quoi, je vous le demande.

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