Jan et Morrisson -10-

aile68

Morrisson se sent bien à Chicago, ça fait sept ans qu'il y vit. Jamais il ne quittera cette ville dit-il. Il y a ses repères, quelques amis (comment a-t-il fait? Moi je n'ai que des collègues de travail, j'avais oublié son charisme et sa capacité à s'adapter à n'importe quelle situation, il n'a jamais eu les deux pieds dans le même sabot!), ce qu'il faut pour vivre, il est mécano dans un grand garage. Moi et mes bouquins, c'est comme lui et ses voitures. Même engouement, même passion. Parfois il fait des rallys avec un ami du boulot, il est tantôt co-pilote, tantôt pilote, ça dépend, ils s'entraînent pendant l'année à la campagne, dans des contrées loin des villes et des gens. Un jour ils ont failli gagner un trophée, deux gars de l'Iowa les ont coiffés sur le poteau. C'est vraiment trop dommage! Sinon Chicago ce n'est pas ce qu'on croit, des gangsters à chaque coin de rue, je n'ai jamais vu une ville avec autant de grands immeubles imposants. Morrisson aime l'ambiance de cette grande ville. On peut s'y perdre, marcher pendant des heures sans se faire accoster, un être étranger, c'est ce qu'il aime être dans le brouhaha des voitures et des bus. Comme ça change de notre petite ville du Minnesota où tout le monde se connaît! La ville que nous connaissons est d'un autre monde, d'une autre époque, d'une autre mentalité aussi, pétrie de légendes indiennes et de lacs. C'est au bord du lac Calumet au sud-est de la ville que nous sommes en train de nous promener. Les gens ne font pas attention à nous, ils ne voient pas que j'ai l'air troublé auprès de Morrisson qui ne dit rien. Demain je serai partie. Est-ce que a l'ennuie? Et moi? Je ne sais même pas si je voudrais rester encore. Je reprendrai mon travail dans deux jours, et s'il m'accompagnait à Green Bay? C'est drôle Green Bay et Chicago bordent le Lac Michigan,  les deux villes sont à quatre heures de distance, et entre ces deux villes se trouve Milwaukee, la ville qui pourrait nous donner une clé en ce qui concerne notre enquête. Et si nous y allions? Non, ce n'est peut-être pas une bonne idée, le détective sera plus à même de se renseigner en ce qui concerne Jim et sa famille. Oui mais Morrisson et moi savons comment ils sont physiquement. Je n'ose parler de mes réflexions à Morrisson. Pourquoi ne dit-il rien?  Je décide alors de lui parler:

" Morrisson, j'étais en train de me dire. C'est vendredi pourquoi ne viendrais-tu pas à Green Bay avec moi? Tu verrais où j'habite comme ça.

- Eh bien je ne sais pas, je travaille demain, tu sais.

- Oh! C'est trop dommage! Tu travailles tous les samedis?

- Non. Ecoute laisse-moi m'organiser d'accord? Je te promets que je viendrai te voir dès que possible.

- Bon, d'accord.

- En tout cas je suis content que tu m'aies fait cette proposition. Je ne savais pas comment j'allais te revoir. Si c'est toi qui serais revenue ou moi qui serais allé te voir.

- Dis comment va procéder le détective?

- ça ma chérie j'en sais rien!" me lance Morrisson spontanément.

Il m'a appelée "ma chérie", dans quel sens l'a-t-il dit? C'était affectueux bien sûr, mais quand même... Il ne m'a jamais dis "ma chérie" auparavant. Il a fallu que dix ans passent pour l'entendre de sa bouche... Dois-je lui dire que je suis contente? 

(à suivre)

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