5 - Le chien de garde

metis

Et si un serial killer s’attaquait aux personnalités capitalistes : Total, Areva … alors que le mouvement des Gilets Jaunes gagne du terrain ? Radicalisation ultime ou complot pour les détruire ?

Son genou le fait souffrir. Avec ce temps pourri, son ancienne blessure de foot lui rappelle tout ce qu'il a abandonné.

« Chargeeeeeeeez »

Il ne réfléchit pas, il exécute, il court. Il ne sait pas vers quoi, il ne sait pas contre quoi, ça fait des semaines qu'il est debout pendant des heures puis quand on lui dit de courir il court. Ils ne peuvent même pas discuter. Au moins, eux, les Gilets Jaunes ont cette liberté. Tassés les uns contre les autres, étouffés par leurs uniformes et leurs équipements quasi militaire, cachés derrière leur gigantesque bouclier, il n'est rien de plus qu'un pion. Comme aux échecs il ne peut qu'avancer, comme aux échecs, il protège un roi qu'il n'a jamais vu puisqu'un pion ça ne se retourne pas, un pion, ça ne parle pas, un pion ça ne réfléchi pas.

Pourtant, même s'il n'a jamais été un grand penseur ces dernières semaines l'ont bien aidé à cogiter. Des semaines à observer forcément, ça fait méditer. Mais comment raisonner quand il est interdit d'échanger ? Les rangs sont partagés sur la conjoncture, alors dans les siens on évite de s'étendre sur ses idées, c'est mal vu. Inutile de rajouter des tensions, il faut rester concentrés sur sa mission et surtout soudés.

La peur gronde, les affrontements restent violents et la moindre erreur peut coûter cher, faire basculer tout un pays. Mentalement c'est presqu'aussi dur qu'à la guerre, mais à la guerre, l'ennemi est facilement identifiable. Il ne s'agit pas de compatriotes mais de menaces envers la patrie. Pour lui aujourd'hui la vraie menace c'est ceux qui lui intiment l'ordre de se battre. Il y a vraiment de quoi devenir fou.

Des semaines qu'ils observent des Gilets Jaunes qui se battent pour leur pays. Des semaines qu'il fait barrage pour protéger celles et ceux qui ont créé ce merdier. Tous ces costards qui collent des fausses étiquettes pour mieux diviser et servir leurs intérêts. Il est là le vrai combat, mais un chien ne peut mordre la main qui le nourrit. Une main qu'il était fier de servir. La main d'un si beau pays, avec un système public évolué, bien pensé et juste. Combien de pays ont la chance de payer des impôts qui permettent l'accès à la santé quelque soit ton rang social ou ta couleur de peau ? Quel pays t'éduque, te loge et te protège aussi bien que la France dans une parfaite égalité. Le système de base il est là, la France elle est dans cette réussite, ce sont ces valeurs qui font la force de ce pays et sa grandeur. Pourquoi avons-nous laissé des bureaucrates s'en emparer, se l'approprier et le souiller ? A présent l'argent qui devait servir au bien public est arraché aux pauvres économies du peuple pour être gaspillé par des repus de richesse et de privilèges qui se pavanent du matin au soir à la TV ?

Son chef le fixe. Le garderait-il dans les rangs s'il soupçonnait ne serait-ce qu'un dixième de sa pensée ?

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