Je me concentre sur mon sang
Yannick Bériault
Bouger, ce bras, accompagnant le mouvement d'une légère torsion ainsi que d'une flexion du poignet.
Ce que j'étais et ce que je serai ̶ des images : jamais je ne fus ce que j'étais ̶ se surimpose sur mon visage, brouille mon visage... mon visage est une interface que je sais si bien déserter. S'y rencontrent mes surmoi ; s'y rencontrent mes contemporains, mon amoureuse, les amis, la foule des étrangers... Photographies sans papier ni disque, purs écrans, communication brute. Je me concentre sur mon sang, mes muscles, les os et leurs rythmiques. Cela encore est impersonnel : je se désespère, entre le tronc et l'écorce, feuille de musique pour les chatoyances mélodieuses du ciel, feuille bruissante, feuille séchant à l'approche de l'hiver. Encore interface, le flot courant sous le visage, bruissements et filigranes, je cherche à être pour lui-même... mais je est un carrefour sensible.
Je ne suis jamais autant que lorsque je suis vertige, nausée, angoisse... fourmillement cérébral, lancinance, muscles et tendons portant le désir du mouvement impossible.
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D'abord publié sur lesensdutemps.tumblr.com