Je veux un bébé toute seule (Suite)
valjean
Anne Sophie grimace devant sa glace, contemple son ventre vide : 4 jours déjà, ses seins lui font mal, son ventre lui fait mal, son dos n'est que souffrance, mais tout cela n'est rien, rien à côté de la douleur d'avoir vendu cet enfant qu'elle a porté pendant 9 mois, tout cela pour quelques milliers d'euros.
Comment a t'elle pu se transformer malgré elle en mère porteuse, et pourquoi une telle aventure humaine a t'elle pu s'achever dans ces conditions aussi scabreuses ?
La lame qui s'est enfoncée dans la chair de son cou lui fait encore mal, oui elle a tout tenté pour le garder, jusqu'à en être marquée de façon indélébile.
Doucement elle se recroqueville sur son drap taché et pleure, pleure, les larmes se mêlent au sang pas encore sec.
« J'ai encore la chance d'être en vie ». Elle ferme les yeux, revit la scène de l'accouchement, l'humanité qui s'est peu à peu instillée dans les yeux de sa ravisseuse, le bébé qui s'est finalement bien présenté, elle le sent encore sur sa poitrine, pendant ces quelques instants de bonheur,
Elle voit le regard de Ludovico transfiguré et se souvient du moment oû il renonce à la vue du bébé à la tuer et qui lui coupe un lien, avant de fuir avec le nourrisson et Birgit , en jetant une enveloppe pleine de billets, alors qu'à demi inconsciente, l'effet des injections, elle ne tente pas ne serait ce qu'un cri....
Elle reste là, prostrée, sans manger, quelques jours encore, puis se décide à sortir, enveloppée dans son seul drap souillé.
C'est là qu'elle se rend compte qu'elle se trouve dans les sous sols de l'ancien hôpital Broussais, en plein Paris. L'hôpital Broussais, à quelques rues de chez elle ! !.
« Heureusement », pensera t'elle plus tard, « je suis même rentrée à pieds, et je n'ai pas rencontré trop de passants, juste cette vieille femme qui m'a proposé de m'aider, alors que je m'appuyais quelques instants à une voiture.
Elle s'est juste étonnée de me voir marcher pieds nus.
Je suis rentrée, j'ai toujours une clef sous le paillasson, et me voilà, seule, humiliée.
"Mon bébé, je veux mon bébé".
Birgit serre le petit corps chaud contre elle. C'est bon de retrouver de l'amour dans les bras.
Elle regarde Ludovico, paisible, endormi à côté d'elle. «Josefa, nous l'appellerons Josefa, comme.... » Ses joues redeviennent humides, elle revoit leur merveilleux bébé, leurs 12 mois de bonheur absolu à 3.
Ludovico transfiguré aussi, débarrassé de tous ses mauvais instincts et totalement sobre.
Ludovico se levant inlassablement la nuit, dés les premiers pleurs de leur « première » Josefa ».
Ludovico changeant la petite, donnant les bains, l'endormant patiemment.
Et quelques mois après, 12 petits mois, de retour du cinéma, le petit corps déjà froid de Josefa, la baby sitter paniquée, Ludovico qui blémit et soudain se met à frapper très violemment la jeune fille, le sang qui coule, les hurlements.
Moi qui m'interpose, malgré la douleur, qui prend des coups, la jeune fille qui fuit le visage tuméfié dans l'escalier.
Dans ma tête tout se brouille, je revois la police qui entraîne Ludovico, le médecin qui me regarde avec un air suspect, notre pauvre Josefa, qui est emmené comme une poupée molle.
Puis l'enterrement dans ce minuscule cercueil blanc, Ludovico à côté de moi menotté entre 2 policiers, et ce vide, ce grand vide, cette envie aussi au cimetière de gratter la terre et d'ouvrir la tombe pour récupérer mon bébé, mes ongles en sang.
Des mois ont passé, Ludovico est sorti de prison, en conditionnelle, la jeune fille s'en étant sortie avec une fracture du nez et des pommettes.
Nous avons refait l'amour, nous voulions tout oublier, repartir avec un nouveau bébé, mais rien, rien à faire, mon corps ne voulait plus.
J'ai réussi à me faire affecter à la maternité, je ne pouvais plus travailler en gérontologie, je pensais que le contact avec tous ces bébés réveillerait mes ovaires, me rendrait de nouveau fertile ».
Quand la tête du bébé s'est présentée, Birgit a tout de suite retrouvé les gestes, d'accord elle n'a jamais pratiqué seule d'accouchement mais elle ne compte pas le nombre de fois où elle a assisté les sages femme.
Tout s'est très bien passé, elle a même pu le mettre, avant de l'essuyer et de l'envelopper dans un lange, sur la poitrine d'Anne Sophie, de lui glisser « c'est une fille » puis de partir, entraînée par Ludovico.
« Qu'est ce qu'elle doit souffrir, mais qu'est ce que j'ai souffert moi aussi » se souvient t'elle, en pensant à Anne Sophie.
(A suivre ?)