"JEUX DE TRONE"

Marcel Alalof

« JEUX DE TRONE »

Ces arbres autour de cette clairière ne vous rappellent ils rien ?En fait, c'est surtout la clairière où avait été enterré le beau-père violeur qui avait été ensuite déterré. Pas gai, tout ça !La belle-fille en avait craché un poumon qui était resté là,sur la table de l'atelier d'écriture. Personne n'en avait voulu, tout au moins apparemment ;car, la semaine d'après, il n'y était plus !

Quand on est confronté à ce genre de vision, ce n'est pas trop bon, car elle amène des pensées morbides,négatives,qui parfois charrient ou engendrent des envies de meurtre. On peut avoir envie quelquefois de punir le coupable, oubliant qu'on l'est tous plus ou moins, à un titre ou à un autre. C'est le plus et le moins qui pose problème :car celui pris de cette frénésie l'est d'abord parce qu'il s'estime moins coupable que celui qu'il veut châtier. Il se persuade  qu'il n'est pas assez coupable pour être puni et s'arroge le droit de punir celui qu'il considère comme plus coupable. Il n'y a dans ce fonctionnement aucune échelle ou gradation. J'ai le droit de punir celui qui d'après moi  est plus coupable que moi ;en toute objectivité. Débile !et, en même temps monstrueux, qui nous ramène aux écrits de Celui qui n'écrit pas.

Je prends donc ma hache et lui tranche le bras alors qu'il voulait me serrer la main.La décision n'avait même pas été prise, mais la punition exécutée. Alors, que signifie ?Qui avait décidé ?Peut-on dire :Le guitariste-celui présent sur la photo comme s'il était seul, juste parce que le plan trop rapproché sur son instrument, cachait l'essentiel :l'orchestre ?En réalité, celui que l'on surnomme l'Artiste ,ou le créateur, qui oscille entre le somnambulisme(inconscient) et l'anarchie(mouvements désordonnés) :il mérite clairement la mort, d'abord parce qu'il n'est pas un exemple, ensuite parce que, s'il l'était, il ne pourrait mourir.

L'élément de résolution ?la troupe ;oui,l'armée !sans la tenue bleu azur issue de 70,qui se retourne contre celui qui la porte, mais la mort qu'on ne voit pas, même enterré vivant.

Il n'a rien fait(il n'est donc pas coupable).Il descend l'escalier de bois de son appartement de 200mètres de long sur un mètre de large-un cercueil,peut-être-il porte des chaussettes glissantes,a la tête ailleurs. Il glisse, dévale les escaliers sur le dos, à grande vitesse, comme propulsé par un bobsleigh dont ses vertèbres seraient le fond. Il n'est pas coupable. Mais,il n'est pas mort.Il est allongé dans l'escalier, n'osant bouger de peur de s'apercevoir qu'il ne le pourra plus jamais. En même temps, son petit chien tourne autour de lui, en bougeant la queue, sans manifester d'inquiétude que ce soit ;ce qui tendrait à démontrer, compte tenu de l'instinct prêté aux animaux même domestiques que tout va bien ou qu'il s'en fout.

Dans sa position, il voit, à un mètre ou deux devant lui, la petite salle de bain de plain-pied(« A l'américaine » avait dit l'architecte) dépourvue de porte, à la moquette vert bronze et bidet discret, les w.c.à lunette chauffante quand il le faut, éclairés dix heures par jour à travers la fenêtre de bois et quincaillerie mordorée, orientée à l'ouest. Fatigué, usé, mais vivant, il n'aspire qu'à ce lieu d'aisances, jusqu'à l'engloutissement.

11.12.2014

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