Journée de trêve au fâcheux spleen
Jean Claude Blanc
Journée de trêve au fâcheux spleen
Dimanche d'automne, le soleil brille
Nuls soucis qui me titillent
En compagnie de ma famille
Près de moi mon fils et ma famille
Pour pas que je flanche, s'égosillent
Que je leur narre quelques broutilles
De mon cœur las qui part en vrille
Fameux artiste de la resquille
Pour leur plaisir me fends la bille
Plus en plus rares nos retrouvailles
Assujettis à leur travail
Plus de marmailles qui se chamaillent
Doivent quérir leur boustifaille
Pour pas finir sur la paille
Mais les convie, vaille que vaille
Joyeusement à la ripaille
En mon légendaire bercail
Château la pompe, loin de Versailles
Trente ans sonnés, mes héritiers
Me poussent déjà vers la vieillesse
Me hâte démontrer mes prouesses
Caboche alerte, je leur promets
Des facéties les plus salées
Je ne vais pas me faire prier
Pour qu'ils encensent mon intellect
Brèves causettes, riches de souvenirs
Pas assez de temps pour tout se dire
Ame en souffrance, me respectent
Considérant mon air absent
S'en est passé des évènements
En notre patelin, féru de cancans
(Autant en emporte le vent)
Regrets que m'inspirent les souvenirs
Ne les avoir pas vus grandir
Mes chenapans qui ont suivi
Longues études, pour l'avenir
Aussi demeure ébaubi
De leur génie chèrement acquis
Fier que se renforce notre foyer
Nanti de pièces rapportées
Ma bru, mon gendre, Mathias, Audrey
Pétris de vertus, attentionnés
Pas les derniers pour me flatter
Soumis à mes humeurs variables
Dont je me prévaux, luné, blâmable
Pourtant personne ne manque à l'appel
Trône la Reine Mère, sans la dentelle
A ses enfants, toujours fidèle
Pourvu qu'elle soit de ces éternelles
Aussi devenu un rituel
Gueuletonner sans se gêner
Avec Champagne à la clé
Tout avantage a ses revers
Cette Mamie Jeanne, ne manque pas d'air
Ses marmousets, se les préfère
Et quant à moi discriminé
Reste dans mon coin, à ronchonner
Mais que du flan, tant j'exagère
Joueur de pipeau, comique troupier
Brin de repos, de réjouissance
A consommer sans conséquences
Sobre pique-nique couchés sur le dos
Heureux comme des poissons dans l'eau
Tout en pensant à nos défunts
Qui gâchent l'ambiance du festin
Par chance, encore bien-portants
Pour se conforter on resserre les rangs
Car s'amenuisent nos parentés
De ces instants, de sérénité
Immédiatement à profiter
Demain ça risque le néant
Le personnage plus important
Sans aucun doute, ma Maman
De cette portée de durs à cuire
Qui n'ont pas peur de mourir
Nous redressant sévèrement
Si on s'apitoie sur notre pauvre sort
Fort caractère, mais qu'on adore
Etant de toutes nos sauteries
Elle qui végète en son logis
Durant la semaine esseulée
Bien que pas mal ankylosée
Pour nous tancer, perd pas l'esprit
Si toutefois, on se laisse aller
Notre sainte alliance de paix sacrée
Personne ne pourra la violenter
Tant de secrets entre nous intimes
Ne marchant pas dans les combines
De ces faux derches, qui s'incriminent
Pour nos copains, que de l'estime
En ignorant les anonymes
Qui nous envient, notre cuisine
Quelquefois fusent éclats de voix
Pour peu de choses, goguenards bougnas
En vérité du cinéma
En nous ancré, intègre loi
Jamais se trahir entre consanguins
Car un pour tous, tous pour un
Pour embrocher portion de foie gras
On se balance des anathèmes
A la figure, d'impulsifs pics
Mais ça passera, aucun problème
Si ça nous vexe, preuve qu'on s'aime
Que des sornettes, ces scènes épiques
Pas près de céder, notre chaine d'union
De même lignée, jamais question
Que d'avaler qu'en dira-t-on
Des possédés par le démon
Comme l'autre ivrogne, fan de litrons
Son signe digne de St Emilion
Que ne ferait-il pas pour un canon
Qui nous jalouse, notre affection
Qu'on ne partage pas, ses abjections
Soir de bourdon, taillé la route
Mon petit bonhomme de jadis
Afin d'aller gagner sa croûte
Conserve en moi ce préjudice
Fatalité mais qui m'en coûte
Chronique mélo, si nostalgique
Que ces quelques heures, entre complices
Auprès de ces Etres, de ma chair
Mais qui détalent comme l'éclair
Alors y vais de ma supplique
Qu'ils reviennent vite, à bon auspice
En ma maison, que d'office je brique
Ne me plains pas de mes richesses
Ce sont les miens, dotés de tendresse
Alors que je touche à la vieillesse
De là où ils sont, doués me professent
De réagir, me botter les fesses
Les remercie, de leur largesse
Afin que se taisent mes détresses
Rappliquent ennuis, dès l'aube lundi
Ruminant ferme, je le maudis
Que peuvent-ils faire mes minous
Désemparé, les cherche partout
Qui leur parlais du loup garou
Plus que sous le joug d'un manitou
Qui fait le compte de ses gros sous
Parait en film « plus belle vie »
Formule obscure, sans aucun sens
Que je rejette, abasourdi
Car m'interpelle ma conscience
Déjà la proie des culs bénis
En attendant de retour ravi
Mes chérubins que je chérie
Pour s'en conter, de connivence
Mais dans leurs yeux dociles, je lis
Sensibilité infinie
De sentiments ancêtre verni
Au point que mon spleen de boniments fuie
Laissant pisser le mérinos
Me fais plus suer que pour mes gosses
Que j'ai élevés, rude sacerdoce
Chanceux lettrés, avaient la bosse
A la retraite mais que justice
Pourtant encore imposant
Tant je résiste à l'hospice
Des égarés voués à Satan
Encore utile sur cette rive
Me font confiance, mes galapiats
Ces malhabiles, qu'à mémoire vive
Plantant un clou, se tapent sur les doigts
Aussi m'efforce faire de mon mieux
De les aider, franchement heureux
Pour éviter la charité
Et les sévices…hospitaliers
Alors ma chemise, je la mouille
Car flemmardant je meurs de trouille
D'être l'objet de médecine légale
Dans le formol, pas idéal
Atteignant l'âge, d'en terminer
Peux pas permettre de lambiner
Sans horizon, pour le futur
Que du compost pour la nature
Alors je vante ma culture
En m'adonnant à l'écriture
Que mes mômes en fassent précieuse lecture
En cas de brusques mésaventures JC Blanc septembre 2018