JUV- Chapitre 1.

Nanaah

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Mes yeux rouges scrutent le ciel à travers ma fenêtre.  Le soleil décline peu à peu, et cela me fait rire.  Il meure et renaît, sans lassitude, mais nous ne mourrons jamais.  Je dis « nous », mais je parle surtout de ma famille et de moi-même.  

Sur mon bureau en bois se trouve un téléphone noir, des papiers scotchés, mon set de table blanc et un cahier de dessin. Oui, je dessine beaucoup, et très bien même. Car j'ai un don. Personne dans ma famille n'en a, je suis la seule. Je peux faire tomber des objets, comme un stylo par exemple, mais aussi fouiller les pensées de quelqu'un. J'ai oublié une chose assez  importante : je ne dois révéler mon secret à personne, car je risque de mourir. Je sais, au début j'ai dit que « nous ne mourrons jamais », mais si nous avons le malheur de transgresser la règle du silence ou de nous dévoiler à la lumière, nous en sommes brûlés. Les seules choses pouvant nous tuer sont le feu et les maîtres des vampires. Ils sont les plus forts. Je pense que vous avez compris : je suis un vampire.  Quelques dizaines de personnes de mon espèce sont dispersées dans le monde entier.

Le soleil est maintenant couché. Je range mon bureau habilement et cherche des yeux un élastique. Mon regard rencontre une photo d'un homme que j'aime beaucoup, et qui malheureusement ne partage pas mes sentiments.  Je m'empresse d'oublier cette désagréable pensée et trouve enfin une boite remplie d'élastiques de toutes les couleurs.  J'en prends un au hasard et attache ma chevelure rousse en une queue-de-cheval.

 En fait, ça fait trois cents quarante ans que je suis un vampire. On ne naît pas ainsi, un vampire doit nous mordre avant. Et notre apparence est bloquée à l'âge où nous avons été mordus. Moi, j'avais seize ans quand je me suis promenée en forêt. Un jeune homme s'est arrêté devant et m'a dit « Vous avez l'air fatiguée, voulez-vous venir chez moi le temps de vous reposer ? ». J'ai accepté, si insouciante que j'étais. En entrant dans sa demeure, j'ai compris que quelque chose n'allait pas. J'allais rebrousser chemin quand il m'a attrapé le poignet, m'a obligé à me tourner et m'a mordue dans le cou.

Il faisait noir à présent, alors j'appelai mon frère Julian et l'incita à se préparer pour la chasse. Enfin, je le prends pour mon frère même si je l'ai trouvé un jour de pluie seul. Il a été mordu par deux promeneurs, mes parents. On les a rejoint car nous ne savions pas ce que nous étions devenus et qu'il nous était impossible de se débrouiller seul.

Nous avons besoin de sang pour survivre. Nous ne mourrons pas si nous manquons de cette boisson succulente, mais notre esprit s'affaiblit et nous ne sommes alors plus capable de chasser et cela devient rapidement un cercle vicieux. Nous ne chassons plus car nous sommes faibles, et nous sommes faibles car nous ne chassons plus. 

Il est possible de redevenir humain. On peut le demander aux maîtres des vampires, qui refusent souvent,  ou nous devons nous priver du sang pour adopter les repas des humains. Nous avons des signes nous prévenant de cette transformation ; les cheveux et les yeux changent de couleur –les yeux redeviennent comme avant-, nous ne pouvons plus nous servir de notre don et nous ne prenons plus plaisir à la chasse.

Ma famille et moi-même préférons le sang des animaux. Nous ne devenons ainsi pas des meurtriers, et le sang des bêtes est bien meilleur que celui des humains.

 M'habillant d'un jeans bleu clair et d'un tee-shirt noir, je consultai le ciel. J'avais trois heures maximum pour chasser, cacher les cadavres, nettoyer le sol et rentrer chez moi.

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