La bague

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J’ai mis, je porte la bague de ma grand-mère ce matin. Un devoir dicté par mon inconscient, en me rappelant les rêves de cette nuit. Rêves restés flous, mais ce détail, cette urgence précise : la bague.

Ce matin donc, cette bague à mon doigt, je pars travailler.

J’inspecte plusieurs fois mon téléphone à l’affût d’un message inexistant, juste pour m’en assurer. On est parfois persuadé de choses que l’on doit tout de même vérifier. Et je vous le dis avec assurance, étrange contradiction. Mais la perte d’un ami cher est dure à accepter. Ce matin donc, j’inspecte mon téléphone. A tort.

Et cette bague donc. Elle me surprend. L’habitude n’est pas prise, mes yeux la surprennent, elle détone dans le quotidien. Journée se passe, habituelle. Midi sonne, au milieu des enfants. J’ai oublié les soucis d’hier et une petite fille vient me les rappeler. Elle me susurre en s’en allant «  Ma maman elle a des problèmes…. ». Je lui réponds que je sais. Elle continue « … divorce … ». Une autre enfant lui demande de répéter, interloquée. Mais avant même qu’elle se remette à parler, je la rassure. Elle sourit. Je m’éloigne.

Plus tard. Je décide de me poser et de poursuivre ma lecture. Les mots sombrement percutants de McCarthy : « Ainsi soit-il, dit le vieil homme. Enveloppe-moi dans les tempêtes de la planète, je serai solide solide. Mon visage saura éviter la pluie comme les pierres. » En arrière-pensée, j’essaie de deviner pourquoi je devais porter aujourd’hui cette bague, alors que je n’avais encore jamais osé le faire depuis le décès de ma grand-mère. Peut-être saurais-je ce soir ? Que pourrait-il se passer ? Rien surement. La vie ne déchaîne pas ses événements si rapidement. Du moins pas aujourd’hui.

Pourtant. Dans l’attente, l’idée me vient d’écrire cette journée dont la particularité n’est encore point dévoilée. En écrivant, je m’interroge. Pas encore dévoilée ?

A moins que. Un ami disparu. Une petite fille au milieu d’une séparation. Une journée avec 2 drames en fond et un autre rappelé par cette bague. Une journée particulière ou un jour comme tous les jours ? La réponse vient comme une évidence. Mon inconscient me le répète: un jour comme tous les jours, un jour de deuil.

Sous le poids de ces mots qui résonnent, mes doigts lâchent le stylo. Je regarde la bague, j’ai compris. Surmonter la perte. Entrevoir la suite. Un jour comme tous les jours. Un jour de deuil, mais pas de renoncement.

« … je serai solide solide.»

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