La banalité du meurtre sur Internet
Le Bruit Et La Harpie
Les fausses annonces de mort, on connait: Pascal Sevran en avait fait les frais, ainsi que Flavie Flament ou le petit Louis, porté disparu en 2008. La dernière en date remonte à hier seulement : Bernard Montiel a été éliminé sans ménagement sur Twitter. Une façon bien pratique de mesurer le pouvoir de ce réseau social : en quelques minutes, on organisait presque le service funéraire de l’animateur.
La rumeur banale ne suffit plus, on a à présent besoin d’un bon gros ragot qui fasse de la vague sur la Toile, et qu’est-ce qui en ferait plus que la mort d’une célébrité (toute relative)? Peu importe que la star en question jouissent d’une popularité sans borne – vous l’aviez d’ailleurs déjà compris avec le choix de Bernard Montiel – il nous faut du scandale, du bon, du frais, du presque pas digérable.
L’initiateur de la plaisanterie a déclaré vouloir tester la crédulité des Internautes. Pari réussi, nous sommes tous des moutons ! Ceux qui sortaient du troupeau l’ont également relié, pour crier au fake. Twitter, d’antan l’outil préféré des journalistes, peuplé de journalistes qui dévoilent de l’info pour les journalistes, doit à présent considérer à deux fois le scoop qu’on lui propose : la récente démocratisation du réseau social le fait passer du statut d’ « allié » à celui « oui pourquoi pas, mais je vais tout de même vérifier la source un peu plus longuement« .
Concernant ce pauvre Bernard, la rumeur a d’abord enflé sous la forme d’un vent de panique « Bernard Montiel est mort ???? » (des fans ? Nous ne voyons pas d’autre explication), puis s’est rapidement transformé en jeu. Des petits malins, ou des updaters de l’encyclopédie libre assidus, se sont empressés de mettre à jour sa fiche Wikipédia. La preuve avec cette capture d’écran prise au bon moment :
Comme quoi, on peut rire de tout, mais peut-être pas avec Bernard. C’est bien connu, les vrais stars ont droit à une nouvelle vie : Elvis, Michael Jackson et Jim Morrison sont tous vivants et sirotent tranquillement leurs bières ensemble à Graceland, avant de se faire un bœuf musical du feu de Dieu.
Si votre popularité se joue sur Internet, attention, votre Dieu Google pourrait aussi bien vous tuer sans prévenir et vous taxer de l’humiliante « Erreur 404 » lorsque l’on tapera votre nom dans la barre de recherche.
Ce matin, une voiture s’est engagée sur le boulevard, sirènes hurlantes et a manqué de me renverser. Sur les portières était inscrit en gros « Greffes ». Avec toutes les rumeurs auxquelles nous avons droit sur le net, il arrivera peut-être un jour où l’on verra les mêmes voitures arborer le signe « Urgence Internet« :
« Laissez passer ! Un mort sur Internet ! Laissez passer ! »