Là-bas près du ruisseau
Jean Claude Blanc
Là-bas près du ruisseau
Là-bas près du ruisseau, parfois je vais m'étendre
Pour contempler l'azur, y trouver le repos
Les oiseaux nonchalants voltigent en silence
Leurs ailes en planant, en effleurent l'écume
Dans les ajoncs tapis au fond dans la pénombre
Les migrateurs bavards se racontent des histoires
Des projets pour demain quand il faudra partir
Aux pays moins hostiles, prolixes de chaleur
Canards, hérons cendrés se tiennent conciliabule
A leurs intonations j'en décrypte le langage
Se mouillent un peu le bec quand ils ont la pépie
Ces voyageurs zélés, ils en ont à se dire
Je n'ose pas bouger de peur de contrarier
Leurs bavardages, leurs couacs, leur rituel sacré
En suçotant heureux une herbe à ma portée
Là-bas près du ruisseau, je me sens rassuré
J'ai trouvé cet asile, quand j'étais tout petit
Depuis est devenu mon refuge, mon nid
Je vais m'y retirer à l'abri des regards
Quand de mes congénères, j'en ai bien plus que marre
Une rivière à truites, selon les connaisseurs
Un courant sinueux, faufilé sous les arbres
Mon havre de solitude, pour rassasier mon âme
De mystères et de contes, chimères résurgentes
Un frêle papillon atterrit sur ma jambe
Tremblant comme une feuille, les élytres aux aguets
Des claquements subits agitent ses mandibules
Le voilà reparti pour d'autres aventures
Natif de ce pays, de la vallée de l'Ance
Un ruisseau bien tranquille déroule ses méandres
Au milieu des prairies et des roseaux fragiles
Gazouillant à loisir sur les galets glissants
Au fond de l'horizon se blottit mon village
C'est là que je suis né, c'est là que je mourrai
Mon endroit préféré pour dorer ma pilule,
Là-bas près du ruisseau, j'ai trouvé le bonheur
Le soleil déclinant honore de ses dorures
Les collines boisées de sapins sentinelles
Des flots de libellules, cillent sur la rivière
Dans les goures obscurs se cachent les vipères
Des heures à s'extasier, « ce qu'on est bien ici »
Les pastels de juillet, enluminent la nature
Tout à mes rêveries et mes yeux pleins d'images
La nuit vient me saisir, sans même crier gare
Plaisirs simples à portée, suffit de les saisir
Pour se confectionner un moral d'acier
Qui n'a pas de racines, doit être bien à plaindre
Orphelin du passé, avenir sans espoir
Là-bas près du ruisseau, je m'étale sans fin
Loin des emmerdements, des tourments quotidiens
C'est mon éternité, mon Eden discret
Quand j'en ai plus qu'assez, je vais m'y recueillir
Confident par nature, le frère providentiel
Je fais le plein docile de toutes les peines du monde
Besoin de déverser à mon tour ma bile
Sur mon ruisseau paisible, dérivent mes soucis
Pirouettes, cacahuètes, qui pourra m'alpaguer
Ici et n'importe où, dans le souffle du vent
Tous les chemins tendues me ramènent à la rive
Là-bas près du ruisseau, ma vraie source de vie
JC Blanc août 2022 (bel été moment de paix)