La bouquiniste
Jean Claude Blanc
La bouquiniste
De mes mémoires, suis sur la piste
Du temps où je faisais du social
N'ai pas connu que des gens tristes
Parfois des dames originales
Qui se sont mesurées aux forces du mal
Quartier Saint Jean, cité des Gaules
Une acharnée tenait boutique
Jadis secrétaire, changement de rôle
Vieille bouquiniste, énergique
La rencontrais le temps de midi
Pour m'y instruire, refaire l'histoire
Sur ses exploits, m'en a appris
Femme résistante mais sans la gloire
Petite mamie frêle sur ses quilles
M'offrait le café, les petits beurres
Elle, suçotant sa camomille
Ne voyions pas passer les heures
Ancienne agent des chemins de fer
Gare de Perrache pendant la guerre
Elle en a vu de ces trains plombés
Remplis de juifs à déporter
Dame dévouée et solidaire
Pour ces damnés, voués à l'enfer
Discrètement truquait les listes
Quelques morts en moins, pour les fascistes
Dans ces wagons, les gosses pleuraient
Mendiant à boire et à manger
Tous entassés et agrippés
Aux embrasures barreaudées
Déjà gaulliste de nature
Fière FFI, à la peau dure
Etait entrée en résistance
Bouter les boches hors de France
A son niveau, comment agir…
L'avait à l'œil son patron
Un pétainiste, triste sire
Qu'en profitait prendre du galon
Ce qu'elle a fait, oh, pas grand-chose
Selon ses dires, lyonnaise modeste
Aux séquestrés qu'une petite dose
D'un peu d'eau fraiche, pas cher ce geste
Les savait bons pour le voyage
Qu'un aller simple pour le néant
Chopait au vol, bouts de messages
Quelques mots d'adieux pour leurs parents
Les a gardés dans une boite
Ces chères reliques du souvenir
Façon pour elle, de prendre date
La tyrannie en devenir…
Me les a confiés, à moi, jeune homme
Pour me montrer que faut pas céder
Face au réacs qui plastronnent
Pour nous voler nos libertés
Dans son gourbi des bords de Saône
D'un vieux bouquin, m'a fait l'aumône
De Duhamel, plus que docteur
Qu'avait hélas prévu l'horreur
« Chroniques des saisons amères »
Qui relatait périodes sombres
Me l'a offert comme un bréviaire
En témoignage d'armées des ombres
Insensiblement, confiance aidant
M'a dévoilés ses nobles trophées
Croix de Lorraine des partisans
Par le père De Gaulle, médaillée
Tout cela conté en souriant
Comme si c'était pas important
Son Général, plein de sarcasme
L'a embrassée, lui susurrant
« Z'avez des couilles, sacrées bonnes femmes »
Haussant le ton, bien ravivée
M'a secouées les plumes, enfant gâté
« N'ayez pas peur, faut s'engager
Devant la haine, l'adversité »
« Savez les boches m'ont pas eue
C'est pas ces mioches, qui vont me flinguer
Pour les quelques sous que j'ai gagnés
Vais les virer, coups de pieds au cul »
Ainsi me parlait, ma bouquiniste
Qu'avait croisé Préfet Moulin
Comme usager, simple citoyen
Tous 2 oeuvrant en clandestins
Plus qu'un bastringue, son magasin
Elle est partie, sage humaniste
Que rajouter à ce présage
En cette période de sauvages
Où le djihad fait des ravages
Il faut qu'on s'arme…de courage
Souverainiste avant la lettre
Ne pourrait plus s'y reconnaitre
Cette vieille dame digne, noble ancêtre
De voir sévir ces faux prêtres
Nous faut plus faire dans la dentelle
Tenir ferme, avec espoir
La rébellion parfois est belle
Quand est en cause notre territoire
Faut en finir de gémir
Devant ces meurtres abominables
Il y va de notre avenir
Rendre coup pour coup, on est capables
Trop mollassons nos politiques
Ils se chamaillent, c'est logique
Que ça profite aux islamistes
Qui se déguisent en terroristes
La France qu'on aime aujourd'hui
Des volontaires l'ont bâtie
Débarrassée de la vermine
Se relève toujours de ses ruines
L'Appel de Londres, on l'entend plus
Auprès de qui chercher le salut
Ma bouquiniste, petite mère
Ainsi me souffle ses commentaires
On a la trouille, on se rétracte
Des fous de dieux, on a le trac
On verse des larmes après l'horreur
Et on défile pour l'honneur
J'ai bien pigé, chère libraire
Suis souverainiste et pas peu fier
Selon les bobos, suis dépassé
Quand est-il de leur modernité…
Est authentique cette fable
A cette dame lui en sait gré
Daesch nous tombe sur le râble
On ne va pas se dégonfler
En notre pays, on rêve de paix
La République ne cédera jamais.
La liberté, elle a un prix
Nous faut plus faire les chochottes
Malgré la crise, est belle la vie
Au regard des siècles, une anecdote
On n'ose plus prendre des risques
Nous en assurent nos gouvernants
Y'a la justice et la police
Pourtant l'Etat est impuissant
Mais s'en remettre à nos lois
S'en contrefoutent ces kamikases
Pas peur de mourir, ils ont leur foi
En mille morceaux, pour eux ça gaze
Proclamation d'état d'urgence
Au-delà des mots, que faut-il faire
Se balader avec méfiance
En soupçonnant barbus de faux frères
« Je suis partout », recommencé
Sont de retour les justiciers
Qui se plaisent à amalgamer
Ceux de daesch et de Calais
Cet occident, d'argent facile
N'est qu'un géant aux pieds d'argile
Les intégristes s'y faufilent
Les dénombrer, c'est impossible
Pas concernés, on se débine
On s'y résigne, par lâcheté
Chacun pour soi, ses intérêts
L'Europe unie, a mauvaise mine
A se demander, à quoi elle rime
Pure convention, on se dit sévères
Mis sur écoute, tas d'interdits
Manque de flics, nous on se terre
N'espèrent que ça, nos ennemis
Chère bouquiniste, reste à l'abri
N'est plus ici ton Paradis
A l'agonie notre Patrie
C'est l'orient qui nous détruit
Je fais partie de tes disciples
Français basique mais éclairé
Certes les races sont multiples
Mais parmi elles, y'a des tarées
Qu'allument la mèche, feux d'artifices… JC Blanc mars 2016 (à cogiter)