La buse

Jean Claude Blanc

                                La buse

 

Sur son sapin, elle est juchée

Voit tout de loin, l’œil aux aguets

Reste des heures sans bouger

Choisit sa proie, rien qu’au juger

Hérisse ses plumes, dès qu’il froid

Qu’il pleuve, qu’il neige, ne bronche pas

Mais à l’écart, se tient tranquille

Pour s’épargner les coups de fusil

C’est un rapace, bien balancé

Au plumage doux et moucheté

Gonfle son jabot tellement est fier

De ses forêts, le dignitaire

A son allure patibulaire

Elle fout la trouille, aux musaraignes

Quand elle décolle, c’est pas pour rien

Fonce tout droit sur son festin

Qu’à l’évoquer, ça nous fait peur

Pourrait bien nous porter la poisse

Jadis pour conjurer l’angoisse

On crucifiait les prédateurs

Elle tournoie, sa majesté

Ailes déployées, quand vient l’été

Strident sifflet, fait de l’effet

Les volailles gagnent leur poulailler

Ça sert à quoi, oiseaux de malheur

Conclue le gosse, gavé de fables

De La Fontaine, ce gros menteur

Qu’a agité, l’épouvantail

Il faut ramer, pour rassurer

Naïfs gamins, qu’ont tout gobé

L’éducation fait des progrès

En marche arrière, c’est notre plaie

Chacun sa place, sur cette Terre

Les animaux et les humains

Pour subsister, c’est la galère

Partageant le même destin

Avant juger, il faut s’instruire

Pas condamner, sans réfléchir

Car les busards, chassent les serpents

Qui sont vraiment, les plus méchants ?

Derniers de la classe de primaire

Souvent taxés de « triple buse »

Le sombre oiseau, bouc émissaire

Hélas l’instit, n’a pas sa ruse

Bec crochu, serres aiguisées

Guerrier à plumes, de nos forêts

Cris, miaulements, très haut perchés

Pour avertir, qu’est affamé

Je pousse plus loin l’intimité

C’est difficile et indiscret

Elle nidifie sur les sommets

Esprit de famille, pour ses bébés

Quand c’est période de pénurie

Sur nos montagnes endormies

Elle s’alimente de charognes

A nos poubelles, fait l’aumône

Plane sur nos têtes, comme une menace

Elle nous agace, cette vorace

Décidément, on est bouchés

Elle fait la quête, pour pas crever

Sera toujours un mystère

Oiseau de proie bien solitaire

Ou une compagne solidaire

On s’en console, quand vient l’hiver

Fallu du temps pour que je pige

Tellement berné de fariboles

La buse austère, c’est ma payse

Mais n’a pas souvent le beau rôle

La migration, c’est pas son tic

Enracinée toute sa vie

Fidèle buse, a sa patrie

Ne craignez pas, qu’elle vous quitte

L’humanité, dite, fraternelle

Distingue les bons et les mauvais

Les vertueux, ont la vie belle

Si t’as sale gueule, t’es fustigé

Ma buse à moi, est dure à cuire

Tient compagnie à mes pensées

On se comprend, sans rien se dire

Rêvant de paix, de liberté

JC Blanc                 août 2013

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