La Comtesse était une femme amoureuse…
Le Bruit Et La Harpie
La Comtesse, réalisé par Julie Delpy, est applaudi par de nombreuses critiques. L’histoire d’Élisabeth Bathory a toujours alimenté beaucoup de légendes et scénarios, plus glauques les uns que les autres.
A la base, la vie de Madame a effectivement des prédispositions pour le sanglant. Si l’on en croit ce qui est raconté depuis plusieurs siècles, elle se prélassait dans des bains de sang de jeunes vierges, convaincue de leurs vertus rajeunissantes.
Toutes les ingrédients sont réunis pour créer un film étrangement attirant, beaucoup de sang, de la folie, et le sceau d’une histoire vraie. L’élément déclencheur reste l’histoire d’amour qui la liait à son amant jeune Istvan Thurzo, qui l’abandonne sans prévenir un beau matin. Persuadée que son départ est lié à son âge et à sa beauté fanée, Elisabeth Bathory va dès lors traquer le sang neuf pour retrouver sa pureté juvénile. Un mélange de Dracula et de portrait de Dorian Gray au féminin.
Pas de traces de son amant dans ses biographies : Julie Delpy cherche à humaniser cette figure historique et folklorique en lui attribuant une passion qui la consume et aurait poussé la Dame à agir de la sorte. La justification de ses actes par le dépit d’un échec amoureux tient la route, mais l’invention de cette passion, centrale dans le film, fausse la donne. La pluralité de sa personnalité est réussie, pour la compassion et le renouveau de l’image de la Comtesse, on repassera.
Ce qui fonctionne, c’est la dimension particulière que prennent ces crimes lorsqu’ils sont commandités par une femme. Elisabeth Bathory imposait respect et crainte, par son intelligence, sa culture et son pouvoir. Admirable gestionnaire pendant que son mari combattait et après sa mort, elle faisait mentir la pensée commune de l’époque qui voulait que les femmes ne soient pas en charge de postes à responsabilité.
La Comtesse aura donc eu sa passion, très mal digérée visiblement. Avant-gardiste du jeunisme, initiatrice du Botox fait maison, Elisabeth Bathory avait finalement les mêmes peurs que beaucoup de femmes du 21ème siècle : celle de vieillir. Et comme beaucoup, elle aura mis les moyens pour atteindre cet objectif, à des fins nettement plus discutables, il faut bien en convenir.