LA DENTELLIERE

prune

Et si je me piquais le doigt ? Si je m’endormais pour devenir un songe, qui serait là pour ne plus me voir, ou pour venir me chercher ?

Ce serait comme un charme sous lequel nous reposerions. Le temps s’accrocherait. Suspendu entre deux branches, il attendrait patiemment la nouvelle saison. Il faudrait un souffle, un parfum ou un chant pour réveiller la nature endormie. Il faudrait un regard tranchant comme l’épée. Il faudrait un baiser plus tendre que le premier pour vaincre le sort.

Sort, sortilège, sors de mon corps, petit fuseau qui perce et brûle chaque jour mes doigts fatigués. Brulure incessante, brulure lancinante, ce sont les braises laissées par la colère d’un dragon auprès desquelles je ne peux me réchauffer, simplement me consumer et laisser ma vie filer.

Trois coups sur mon ouvrage, le dragon est passé. J’étais assoupie, prisonnière d’une maille. Je reprends mon travail, le client est pressé. Ce soir il sera livré, avec ce que je laisse de moi, une minuscule goutte de sang.

A Charles Perrault…

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