la fête forraine

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La fête foraine

«  - Je veux une augmentation.

Rien, pas un kopeck de plus, tu m’entends. Estime-toi déjà heureuse d’voir trouvé du travail grâce à nous. Une naine avec de la barbe en plus, tu crois que ça croule sous les propositions de travail ».

Elle avait échoué, une fois encore. Elle savait bien Nina que la recette était bonne, qu’elle attirait du monde qui venait l’observer sous toute ses coutures, dans cette attirail atroce et vulgaire. Mue par l’idée de se consoler de leurs banalités, ils se précipitaient de villes en villes pour la voir. Elle était une attraction, une tête d’affiche, une star de l’horreur. Pour en offrir pour leurs argents, ses formes avaient été mises en valeur pour accentuer le contraste entre féminité et pilosité. Elle se décida à tout saboter, à exagérer, à se vautrer dans l’extrême. Elle allait insulter les clients, roter, peter, bref casser la baraque. Une stratégie suicidaire mais qui ferait aussi plonger ces thénardiers des roulottes. Encore toute à sa colère, elle ne le vit pas entrer dans la pièce sombre qui lui servait pour son dérisoire spectacle. Haut comme trois pommes, il la dévisage avec surprise puis se met à lui parler.

«  -Tu ne t’es pas rasé ce matin ? Mon père, lui, il se rase tous les jours. C’est marrant ta barbe. Elle a l’air fausse. J’aime bien ta jupe, elle est drole. Toi aussi tu attends l’attraction ? Tu sais ce qui se passe ici ?

- ça fait quelques minutes que j’attends mais il n’y a pas l’air de se passer grand-chose » rétorque t’elle.

«  -C’est pas grave, on peut discuter en attendant. Je m’appelle Théo et toi ?

- Nina. En fait, je crois qu’il ne se passe rien ici et c’est un spectacle le rien de nos jours ».

Il hausse les épaules et s’assied.

«  - C’est marrant la fête foraine mais il y a beaucoup de bruit. Ici au moins, c’est calme et puis il n’y a pas trop de lumière. C’est un temps calme. T’as essayé le train fantôme. Papa il dit que je suis trop petit.

- Le train fantôme, je le prends tous les soirs quand je me couche.

-T’en as de la chance. Ca ne te fait pas peur. A la fin, tu dois finir par t’habituer si tu le prends tous les jours avant d’aller au lit.

- On ne s’habitue jamais aux fantômes.

Ah bon ! je me disais qu’à la fin peut être on finirait par s’y faire. J’aime bien discuter avec toi ».

Elle sourit.

Son père l’a enfin retrouvé, il lui avait échappé lorsqu’il lui achetait une barbe à papa. Il décide de ne pas se fâcher et intervient :

«  -je crois qu’on va y aller ».

Théo fait la moue.

«  -Déjà mais on n’a rien vu ici. On fait quoi papa maintenant. Tu viens avec nous ? »

Nina le regarde stupéfaite.

Son père s’interpose.

«  - Madame a peut être quelque chose d’autre à faire.

- Mais non, je suis sûr que non. C’est ma copine.

T’habite ou ?

- Dans une roulotte, là derrière.

- Waouh, trop bien ! Tu me montres ?

- Aujourd’hui, je ne vais pas pouvoir mais demain peut être

- Alors je reviens demain et je t’amène des bonbons. D’accord papa ?

- C’est compliqué demain, on va chez mamy.

- Je n’aime pas aller chez mamy parce qu’elle m’embrasse et ses poils sous le menton ils piquent. Moi j’irais voir Nina et sa roulotte ».

Le père tire son fils en dehors de la baraque. Avant de partir, il lâche la main de son père, court vers Nina et l’embrasse.

  • Très juste.
    Il y avait UN poste à prendre à la télévision pour une naine à barbe,
    mais mimie mathy s'est bien faufilée, et Gillette fait des miracles.

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Lo new york

    riatto

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