La fille qui souriait trop
manou-croze
C'est l'histoire d'une fille, pas particulièrement jolie, pas particulièrement malchanceuse, qui n'a qu'une phobie : être seule. Seule à s'asseoir à une table du réfectoire pour manger au collège, seule à écouter une musique triste sur un banc durant la récré, seule à pleurer le soir dans sa chambre en se disant que si elle est seule, c'est qu'elle le mérite. Cette fille, elle est jeune, peu expérimentée, et souffre d'un sérieux manque de confiance en soi, mais elle sourit, tout le temps, comme pour dire : je vais bien, ne vous en faites pas.
Cette fille grandit et les années passent, laissant derrière elles de profondes cicatrices, témoignant d'une vie entaillée, blessée. Pourtant la fille sourit toujours, et ne se plaint pas. Elle voudrait s'oublier, s'effacer pour ne faire plus qu'observer les autres. Eux, ils sont vivants. Eux, ils sont heureux. Eux, ils n'ont pas besoin de mentir constamment.
Arrive le lycée, grand bâtiment plutôt délabré, avec tous ces gens, tous ces groupes d'adolescents, et elle est là, au milieu de ce défilé d'élèves rieurs, timides, sérieux, moqueurs, intellectuels ou encore simplement rêveurs. Et il y a comme elle, ces personnes qui ne sont pas ce qu'elles prétendent être, et qui préfèrent faire semblant. Faire sembler de rire, faire semblant d'aimer ce qui les entoure, d'aimer retrouver des amis auxquels elles ne confieront jamais leur lourd secret : elles sont irrévocablement seules.
Mais revenons à notre fille. Elle a mûrit, elle a appris. Elle ne désire plus se cacher derrière son sourire, alors elle ne sourit plus. Peu à peu, elle a même arrêté de parler. Elle sait ce qu'elle veut : écrire. Écrire et dire toutes ces choses enfouies en elle qui ne demandent qu'à resurgir, écrire pour ne plus trop penser, et surtout, surtout, pour espérer changer.