La fiole

 Sur le bateau qui me ramenait d'Afrique je rencontrai un curieux personnage. Il était drapé d'un turban vert sur la tête, portait une besace en laine sur son épaule droite et, agrippé à son épaule gauche, un crabe. Une bise me souffla à l'oreille qu'il était devin.

Je m'avançai. A ce moment je ne sus ce qui m'attirait le plus : le crabe ou lui.

Il était accoudé à la rampe du bateau il portait de temps à autre une fiole emplie d'essence de géranium à son nez qu'il humait à s'en étourdir.

-Vous n'avez pas peur qu'il se sauve ! Demandais-je

Et sans me regarder, il répondit :

-Je l'ai apprivoisé maintenant il est mon compagnon

-Drôle de compagnon !

Il se dressa, se retourna vers moi, et d'un ton déchu il murmura :

-Lorsque la nuit tombe, et que le sommeil envahit les hommes, mon petit compagnon se met à l'œuvre pour me ramener ce dont j'ai besoin pour retrouver ma vigueur d'antan.

Je le regardai, étonnée. Il me montra sa fiole et en la fixant je pus apercevoir qu'il y avait quelque chose qui flottait dans ce liquide qui prenait un aspect écœurant : un morceau de peau humaine crue…