D. For Danny
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Danny a froid... ou a chaud elle ne sait plus. Chaque frisson est suivi de très près d'une sueur froide. Le vacarme humain qui l'entoure, même ça elle, elle n'y prête plus attention. Les visages autour d'elle et les traits se mélangent, lui donnant le tournis. Danny marche, ou plutôt flotte vers son purgatoire. Le mutisme l'accompagne et pourtant, elle bouillonne.
Les chapitres de sa vie s'écrivent à son insu et elle déteste ça.
Danny, c'est le genre de nanas qui contrôle tout... qui croit qu'elle peut tout contrôler. “Control freak” qu'ils disent là-bas. Un sacré énergumène, souvent frappé par un éclair de lucidité ou de panique infondée, elle redoute souvent les heures à venir. Comme une œuvre en langue arabe, elle envisage sa vie à l'envers. Son histoire commence par sa pierre tombale sur laquelle on peut déjà lire “et si...”
Le doute, le remord, elle les craint. Les fautes de frappe elle les efface, les raye. Tout doit être parfait ! Tout doit filer droit ! Danny contrôle tout ce qui l'entoure, sauf sa personne. Experte des mots, elle ensorcelle ses comparses, mais devient incapable et paralysée lorsqu'elle doit se définir. Danny est une blague et en joue. Danny est la première à faire rire, Danny est une mascarade qui réjouit les... RÉVEILLE-TOI ! Le tourbillon abyssale de ses pensées est interrompu. Son corps tremble... non c'est son cellulaire :
“T'es où ?”
“Pas loin.”
“On se voit ?”
“J'arrive.”
Jane a besoin d'être divertie... Danny s'exécute et s'en va jouer le rôle de sa vie, cette fois-ci dans une brasserie parisienne. Temple, c'est -toujours- là-bas que tout se passe. Les rues n'y sont jamais calmes, ce qui est antinomique au final. Dehors il pleut, d'habitude Danny aime ça, mais aujourd'hui le vent a tourné, quelque chose a changé. Les mécanismes habituels se mettent en place. La scène est parfaitement jouée, on y croirait presque. Du beau boulot encore une fois. Aujourd'hui, le jeu est écourté, l'actrice n'y arrive plus et son interlocutrice l'a bien compris. Les efforts s'enchainent, des faux sourires se dessinent mais rien n'y fait : les réponses sont brèves et l'envie inexistante. Elles se séparent... L'air parisien est lourd. Les talons de ses bottes claquent chaque pavé de la ville, c'est d'ailleurs le seul retentissement qu'elle provoque en déambulant, mais ça ne la dérange pas elle est trop occupée à penser à A. C'est cyclique, elle en revient toujours aux mêmes interrogations, aux même soubresauts... « Merde, pourquoi ? ». L'amour, l'argent, la gloire, Danny s'en fout. La clope, son vin et le genre humain c'est sa came... et son malheur.
Danny a toujours aimé lire. Vous y verrez ici une noblesse intellectuelle, une faiblesse pour la littérature ou un amour pour les lettres, mais il n'en n'est rien. Danny reste dans son insatiable égoïsme, elle ne lit que pour oublier, pour s'oublier. Ce soir, elle Recommence Wuthering Heights. Elle déteste, autant qu'elle adore cette œuvre. L'idée de la passion la prend aux tripes, mais finir ensemble dans la tombe ? Putain non ! « Laissez-moi souffler » : la première chose qui lui vint à l'esprit. Les contes de fées, elle n'y a jamais vraiment cru. Ça lui filait d'ailleurs plus la nausée qu'autre chose. Danny rêve plus de fougue, de passion destructrice et de violence amoureuse. Pour ça, elle provoque ! Du regard, de la parole... on s'en fout, tant que ça marche. Aïdan, elle l'avait provoqué ce premier soir, dans ce bar, ce même soir où ils se sont rencontrés.
Après 10 minutes de présentations frileuses au sein d'un groupe d'amis, de balivernes polies que chacun s'était appliqué à se renvoyer, Aïdan avait bien perçu l'animosité de Danny. Cette manière de boire sa pinte, de pincer les lèvres, de regarder la foule avec son œil perçant. A. a toujours aimé les défis et il savait les reconnaître à des kilomètres. Il en avait un planté devant lui :
A. : « Ne fais pas attention à moi, je ne suis que le vent ! »
D. : « Alors fais en sorte de souffler moins fort, veux-tu ! »
A. : « Et toi qu'est-ce qui t'énerves dans la vie ? »
D. : « Les questions stupides ! »
A. : « Toi, je t'aime bien ! »
D. : « Ça c'est parce que tu ne me connais pas. »
Aïdan sourit. Danny le remarque cette fois-ci. La suite des événements … nous en dira long sur les deux, mais pour ça, il nous faudrait bien plus qu'une nuit, bien plus d'une page pour vous l'expliquer.