LA LAMPE DE CHEVET
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Elle vient d'un coup, un jour, l'envie de partir.
Elle vient un jour où l'on pensait rester.
Et quand c'est là, ça s'installe, ça colle aux mollets.
Elle est statique, sédentaire, l'envie de partir.
Elle fait son nid de la peine, et elle peste,
Et comme elle a fait son lit, elle se couche,
La couverture remontée sur la bouche,
Elle s'y love, c'est le seul amour qui reste.
A côté du lit, une lumière encore l'attire,
Qui lui dit : « souviens-toi, ta vie heureuse ».
L'amour est sa lampe de chevet, sa dernière veilleuse,
Qu'elle éteint, résignée : il n'y a plus rien à lire.
Elle vient d'un coup, l'envie de s'en aller.
Mais on ne part pas tout de suite, on tâtonne,
Dans la pénombre, partout on se cogne,
On cherche l'interrupteur de la lampe de chevet.
Parfois elle s'éclaire à nouveau, faiblement.
On croit que c'est une ampoule à économie d'énergie,
On croit que c'est un feu qui prend, qui grandit,
Mais elle vacille, on entend griller le filament.
Alors le cœur aussi cogne, à se fendre.
Et plutôt que partir pour de bon cette fois-ci,
On préfère s'asseoir sur le bord du lit,
Dans le noir, en baskets, et attendre.
Attendre que la lumière revienne,
Que quelqu'un change l'ampoule,
Avant que des dents poussent aux poules,
Avant qu'on n'ait que le choix de quitter la scène.
Voici bien un poème triste et beau…
· Il y a plus de 6 ans ·nyckie-alause