La Machine
Charles Deinausard
La machine
La déchanson de l'homme jusqu'à son agonie
Née sur les violons des âmes dérisoires
Mêlée au parfum slave de leur mécanie
Crève le suave des villes échaudoirs
L'obscure des sens sacrifiés en ces lieux
Pétrit toujours l'esprit à son corps mutilé
Emaille le rêve dans l'infini des cieux
Et ébarbe encore un avis policé
Ces loisirs indolents qui défient la raison
Entre métal et chaire, huiles et sueurs
Dans cet horrible Etat qui renie l'oraison
Se veulent le liant des factices lueurs
Aux devants de leur mur l'humain artificiel
Marche à la cadence des tambours archaïques
A trop baisser les yeux il ne voit plus le ciel
Simple rouage du monstre mécanique
Son coeur tintinnabule sans lendemain
A moins d'avoir vécu la dernière des chaires
Et découvert le lait qui coulait de son sein
Voyant en son amante la chaleur de sa mère
Renaissance soudaine de son humanité
Dans la moiture nouvelle de leur étreinte
Le prestige brulant du désir incarné
Réconcilie l'homme d'avec son empreinte
Celle qui était avant lui son essence
Se trouve contre elle une ardeur semblable
Donnant à son odeur la belle patience
Qui marque les sentiers d'un amour palpable
Le chemin de ces deux qui donnent corps à leur vie
Fend derrière lui la machine d'une lézarde
Par laquelle enfin la légion des avilis
Pourra respirer si elle s'y hasarde.