La maison du galop

Olivier Memling

Ils habitent la maison du galop

tout au bout des courses les plus folles

là ou s'arrêtent les chevaux effrénés

après qu'ils aient traversé

enfumés dans les dentelles de salive verte

les forêts, les marais et les landes, les gaulis et graviers

la maison du bout du souffle

la maison du bout du rouleau

 

Ils habitent la maison du galop

le père et le fils

autour de l'âtre

sous le vaisseau des poutres

ils sont ensemble

et cent ans à eux deux

L'enfant ou la femme

peuvent être de l'un ou de l'autre

un siècle de destin, d'amours et de silence

ils travaillent la terre

depuis qu'ils ont quitté les gloires du monde

mais ils regardent très fiers

la fumée blanche et les lumières rouges

des tours nucléaires qui les éclairent

 

ils parlent de ce qu’ils aiment

de ce qu'ils font

de filles, de blés, de chasses et de chevaux

jamais d'eux-mêmes 

et chacun ne sait si l'autre sait

et chacun sait

et ne pense qu'a ça dans le respect de l'autre

ils ont passé leurs vies a s'être comparés

entre les livres et les chiens

entre leurs bottes et leurs sourcils

ils fument et se surveillent

ils se veulent du bien

 

L’orchidée du feu

fixe leurs yeux

jusqu’à ce que n’existe rien que la braise

qui cautérise cœurs et cerveaux

 

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