La marcheuse des limbes

manou-croze

Dans les limbes, elle traîne un lourd chariot empli de peluches colorées. Elle fredonne un air léger, ignorant les ténèbres qui l'entourent et l'encerclent de toutes parts, prêtes à l'entraîner dans des lieux plus sombres encore. On pourrait la croire albinos, tant son teint clair témoigne du manque évident de soleil dans son lieu de vie, ou plutôt de trépas. Ses pupilles semblent s'être étendues sur ces iris, noyant dans un noir absolu leur éclat illuminateur. Elle n'est que le fantôme d'une fillette abandonnée, le témoignage d'une enfance réduite à néant.


Elle cherche l'oubli, le pardon, mais n'a commis aucun péché. Elle veut être libre, délivrée, mais ne connaît aucune barrière. L'innocence d'une vie brève et nomade délivre aisément la définition du terme ignorance. L'enfant des limbes n'espère pas, elle laisse place à cette réalité sordide qu'est la sienne. Ses cheveux noirs descendent en cascade sur ses épaules, dessinant sauvagement des vagues désordonnées.


La gardienne du temps s'efface dans la brume, laissant derrière elle paysages mornes aux vallées lugubres. La chaleur maternelle dont elle fut privée semble tapie dans le passé, et son frêle corps s'exécute amèrement. Un jour elle devra choisir : la démarche éternelle d'une vie sans saveur ou l'abandon sans retour de son dur labeur.

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