Là où je suis moi-même

Dominique Capo

Réflexion personnelle...

Chaque fois que je me replonge au cœur de mes investigations historiques sur la naissance et la propagation de la Civilisation Humaine, c'est un peu comme si je me retrouvais chez moi. A chaque fois que j'étudie, que je décrypte, que je recoupe les informations sur les mythologies, les religions, les traditions, les modèles de société, qui sont nées avec les multiples formes qu'elle a prise, tout me parait familier, à ma portée.  

Contrairement à ce quotidien auquel je suis soumis, je me sens à l'aise, apaisé, serein, lorsque tous ces livres ouverts à coté de moi, lorsque tous ces feuillets sur lesquels les notes que j'en ai extrait, s'accumulent autour de moi.

Contrairement aux épreuves et aux charges de la vie de tout un chacun qui m'effraient, qui me déstabilisent, qui me mutilent trop souvent l'âme et le cœur, je parviens aisément à y consacrer toute mon attention. Je réussis à leur accorder tout mon intellect, l'ensemble de mes connaissances, ma patience, mes raisonnements les plus aiguisés ou les plus subtils. Alors que j'en suis incapable en ce qui concerne tout ce qui est du domaine du journalier, de ce que d'autres voient comme essentiel.  

Je me relis, encore et encore. Chaque mot est réfléchi, pesé, tourné dans tous les sens, afin qu'il ait dans chacun de mes textes, dans chacun de mes paragraphes, dans chacune de mes phrases, la place la plus appropriée. Je me relis afin de retirer de mes textes, lourdeurs, répétitions trop fréquentes, termes inutiles, fautes d'orthographe ou de grammaire.

Parfois, j'ai besoin de quelques minutes pour cela. Parfois, une heure, deux peut-être, me sont nécessaires, dans le but de réviser quelques appellations qui ne sont pas assez explicites, que je vois comme incomplètes. Parfois encore, c'est la musicalité de la langue qui m'obsède : comment chaque terme, chaque phrase, résonne à mes oreilles ; et si l'ensemble s'intègre harmonieusement au reste de mon texte.  

Je tiens compte de tous ces paramètres, et de bien d'autres, évidemment, que ce soit par rapport à mes textes sur l'Histoire de la Civilisation, comme vis-à-vis de ceux liés à mes réflexions philosophiques, à mes interrogations sur le modèle de société qui est le notre aujourd'hui, ou sir le devenir de l'Homme a plus ou moins brève échéance.

Il n'y a que lorsque je publie sur les réseaux sociaux que mes écrits ne sont pas aussi rigoureux dans leur forme ; alors que leur fonds l'est de la même façon.  

Quoiqu'il en soit, l'écriture est mon oxygène, ma nourriture. La recherche en Histoire, tout autant. L'un ne va pas sans l'autre, c'est évident. Et tout ce qui en découle comme t(hèmes divers et variés, sont tout aussi passionnants, fascinants, captivants, enrichissants. Ma curiosité intellectuelle est en permanence sollicitée. Je n'éprouve jamais le besoin de reposer mon esprit en ce qui concerne ces savoirs que je décortique. Chacun, en outre, est une porte ouverte sur une infinité de questionnements personnels qui demandent des réponses. Et chaque réponse est la porte ouverte à une infinité d'autres semblables interpellations.  

C'est pour cela que le quotidien me semble fade, inutile, superficiel, sans intérêt. C'est pour cela qu'il me parait ridicule, sans objet, négligeable, insignifiant. Il n'y a que lorsque je me bats pour Vanessa, contre la maladie dont elle est atteinte, que je mets autant d'ardeur, de volonté, de force, que pour les textes que je rédige. Il n'y a que lorsque je lis, il n'y a que lorsque je suis plongé dans des documentaires, des débats, des conversations où la pensée se mêle à la dialectique, que je m'autorise à sortir de mes écrits ou de mes livres. 

Comment considérer le "métro-boulot-dodo" comme important, alors que j'ai en permanence toutes ses choses à portée de la main ? Quand mon âme, ma conscience, mon cœur, mon corps... s'en nourrissent tout le temps ? Comment considérer comme distrayant, égayant, intéressant, tout ce qui relève du journalier, quand il vous est si étranger ?  

Quand, tout au long de son existence, tout vous a poussé vers cette quête de la compréhension et de la connaissance ? Quand, du fait de sa différence, physique et intellectuelle, la grande majorité des gens vous a négligé, humilié, abandonné, trahi, moqué ? Comment se dire que ce qui les préoccupe dans leur quotidien a de l'attrait, quand ce à quoi vous vous consacrez est mille fois plus enrichissant, fascinant, exaltant, que ce à quoi ils vous ont continuellement opposé ? 

Évidemment, en comparant l'un à l'autre, j'estime qu'il n'y a pas photo. Un fossé nous sépare irrémédiablement. S'ils sont heureux ainsi, tant mieux pour eux, je ne le leur reproche pas. Je ne les juge pas ou ne les condamne pas. Néanmoins, je ne sais pas faire comme eux. Toutefois, je ne suis à mon aise, apaisé, serein, que lorsque la réflexion et le raisonnement, le savoir et la culture, la lucidité et l'érudition, sont mis en avant.  

C'est pour ça, donc, que je retourne maintenant 6000 ans en arrière, à l'aube de la Civilisation, à Ur, à Sumer, et ailleurs un peu partout sur la planète. A cette époque où je me sens chez moi. A cette époque où je suis vraiment moi-même...

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