La Terre est ronde/réseaux zozios.

Christophe Hulé

2 textes pour le prix d'un, c'est Black Friday! On ne massacre que les prix.

Si la Terre était plate, Votre Honneur, on serait sans cesse gêné par les voisins du dessous. Des milliards de balais qui frappent le plancher, il y aurait des tremblements de terre à répétition. La richesse, Votre Seigneurie, serait du côté face, celui du soleil. Côté pile, la misère et l'obscurité totale. Vouloir changer les choses, c'est retourner la terre comme une crêpe, Votre illustre Splendeur a tout de suite compris que tout serait alors précipité dans le vide.

Et si, par miracle, restaient des survivants, tout redeviendrait pareil. Enfin presque, une forme de justice sommaire, les bienheureux au trou, les miséreux dans la lumière enfin. 

D'ailleurs, n'est-ce pas ce que l'on nous promet dans l'au-delà. On évite ainsi les dépenses inutiles et on assure la paix sociale. Un marché de dupes qui a traversé toutes les générations.

Mais Votre Magnificence s'accordera peut-être une pensée mauvaise, qui ne saurait en rien ternir Sa Grandeur. Les clients du marché se font de plus en plus rares. La révolte s'étend.

Pour en revenir à la Terre que Ses Prestigieux Penseurs disent plate, les gens obscurs creuseraient des trous, des tunnels partout, comme des vers de terre.

Qui n'aspire pas à rejoindre la lumière ?

Imaginez, Votre Grâce, la Terre en passoire, en gruyère. Cela ne se peut.

La Terre est ronde Messires, les côtés pile ou face s'éparpillent comme des taches.

Les frontières sont horizontales.

Le vrai propos tient aux catastrophes climatiques qui attendent les bébés éclos ce jour.

Les adultes que nous sommes en connaissent déjà les prémices.

Nos jeunes s'égosillent en vain, nul ne les écoute. Que tous ces oisifs préparent donc leur carrière. Les affaires, les affaires !

Bientôt, Votre Altesse, la Terre ne sera plus plate ou ronde, prospère ou misérable.

La Terre ne sera plus.

Définition : Réseaux sociaux.

Du latin, point d'étymologie. Impensable car dans les limbes à l'époque.

Point de harcèlement non plus, d'incitation au suicide, point de méchancetés virtuelles. On se poignardait et s'empoisonnait pour de vrai. Le bon temps quoi !

Et bien moi monsieur, je pense que les réseaux qu'on dit sociaux sont une vaste décharge à l'échelle planétaire. Une prouesse me direz-vous : on a réussi à globaliser la bêtise. La marchandise la plus commercialisée.

De ce dépotoir sans frontières tangibles, la médisance mondialisée, une belle machine à gaz pour la déprime et autres incitations au suicide ou au meurtre, selon son caractère.

Même les photos de vacances, en apparence anecdotiques, feront le bonheur d'une armée de délateurs, qui n'ont rien de mieux à faire semble-t'il. 

Le FISC attendait ce retour aux temps anciens, il parait même que les comités de quartiers resurgissent ici et là, les voisins espionnent, fini le sanctuaire et le confort de l'anonymat.

Pas de dates d'ouverture, la chasse est permanente. Les escrocs, les pervers, j'en passe et des meilleurs, utilisent à bon escient leur artillerie. 

Et les citoyens qui se disent irréprochables, se joignent bientôt à la battue générale. L'hallali, la la la.

 

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