La transhumance

louve-blanche

Je n'ai jamais pu définir le plaisir que je prenais à regarder tous ces gens perdus, apeurés ou encore animés d'un instinct grégaire que seule une arrivée en première ligne serait suffire. Je n'ai jamais été aussi heureuse qu'au milieu de ceux là...

Ils levaient les yeux à la recherche d'une voie, espérant qu'un berger les sauve ou mieux encore les guide, puis, proscris ils suivaient la masse humaine à la recherche de leur numéro ... Aujourd'hui c'est la voie 6, la voiture 6 et la place 62 qui les conduira à la satisfaction. Puis quand les barrières tombent et que le troupeau est rassemblé chacun entre avec ce plaisir non dissimulé dans son monde d'ego, accroché à son livre ou à son ordinateur niant jusqu'à l'existence possible de l'autre.

Point d'échange ... parfois un miracle, un sourire. Je les revois alors tête baissées tirant leur maigre butin de vie derrière eux sur le quai, accroché à une valise comme ils le seraient au dernier être vivant sur terre. Et la tristesse de ces scènes. Le visage affublé de cette volonté de non vie. Ce moment où avec arrogance je me plait tant à sourire ... Non par ironie, mais par confiance. Ce moment là où je me sens parfaitement à ma place. Au milieu de nulle part en zone de transit. Faire passer les autres à une nouvelle aire de leur vie. Voir ce détail qui les caractérisent et que seuls eux on oublié.

Le temps du trajet, je me pose sur ma branche, les observants de loin. Je pars pour des mondes que moi seule fréquente. Alors je souris, je m'envole au dessus de tous ces faibles soumis à la terre et au temps et je fais vivre mon monde.

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