La Tribu de l'Eau

Au fin fond d'une contrée lointaine que l'on appelle l'Oraly vit une Tribu, ma Tribu. La Tribu de l'Eau. 

Je m'appelle Mara et je suis apprentie magicienne. Dans notre Tribu, nous survivons grâce à l'eau, une ressource que nous ne trouvons qu'à la Source Bel, qui est perchée en haut de ces montagnes que nous appelons les Collines Maudites. Je ne sais pas qui a eu l'idée de les nommer ainsi, mais je sais au moins que si le second mot illustre à la perfection le caractère des montagnes, et le premier pas du tout ! Ce sont des pointes rocheuses acérées sur lesquelles personne ne vit, pas même les chamois. Le plus habile de nous tous pourrait se faire empaler à tout moment. Alors des collines ! Non, ce sont de vraies montagnes, qui m'effraient depuis que je suis en âge de comprendre les paroles de ma mère. D'ailleurs, notre chef Morgan envoie seulement les plus expérimentés et les plus forts d'entre nous chercher de l'eau à la Source Bel. Mais bon, je parle de tout ça et je n'ai pas même l'idée de vous expliquer ma tâche. Être magicienne n'est pas chose facile, surtout lorsqu'on a quinze ans. Je doit tous les jours chercher des plantes dans la forêt qui surplombe la vallée où nous avons établi le campement. Mais il n'y a pas que les corvées médicinales. Une magicienne communique également avec la Tribu de la Lune, par signes et pas visions. Si j'apprends encore à les comprendre, mon maître et père, Leryl, dit que j'apprends vite. Et que j'ai l'étoffe d'une grande magicienne. Dans la Tribu de l'Eau, nous survivons en chassant le Farim, une créature à la fourrure noire, aux yeux d'ambre et aux petites oreilles. Elle a des griffes gigantesques, mais elle n'est pas très rapide. Ma sœur, Amyr, une amoureuse des animaux, le craint comme nous tous, mais le trouve beau. Beau ? Je ne la comprends pas. Demain, un groupe de chasseurs expérimentés (Morio, Namel, Toroh, Birmin et Lokra) partira pour affronter les Collines Maudites et ramener l'eau de la Source Bel. J'ai peur, car je sais que nombre d'entre nous sont morts pour cette eau. La moindre goutte est précieuse. C'est pourquoi je vais les accompagner, malgré l'angoisse qui me tenaille le ventre. Je sais que la Tribu de la Lune m'aidera et me guidera. Bien sûr, personne ne le sait car mon père et le chef de la Tribu refuseraient ce périple immédiatement. Je partirai cachée sous ma peau de Miky (un petit animal couleur crème à la queue touffue), et ils ne me remarqueront pas. Je les suivrai de loin. Demain.

Expire. Inspire. Allez, Mara, déstresse, et sens cet air pur que jamais tu n'as senti dans ta vallée encaissée. Oui, toi, toi qui rêve de liberté, eh bien te voilà comblée. 

Je regarde sous mes pieds. Le vide, angoissant, qui a déjà aspiré tant de guerriers. Nous sommes sous un faible soleil d'hiver, mais je sens en moi le parfum de la liberté. J'étends les bras. J'ai envie de crier, mais je sais que ces pourrait provoquer une avalanche. Là-haut, aux neiges éternelles. Je ferme les yeux. Mais j'entends que les guerriers de ma tribu se réveillent, je dois partir, me cacher.