La vie menthe.(2)

Le mercredi, nous pratiquions des séances de pâte à sel avec Jennifer. Elle aimait ça et nous aussi. On fabriquait des tas d'objets inutiles mais dont la satisfaction d'avoir tout fait main, nous rendait fou de joie. On prenait dans le placard de la mère à Jérôme, du thé au gingembre qu'on mélangeait à du gâteau sec pour améliorer le truc. Parfois Virginie venait nous rejoindre en cachette de la sienne qui pensait que sa fille allait au poney-club pour plus tard réussir dans le cheval.

J'aimais bien quand Jennifer ouvrait la bouche, c'était pas pour ne rien dire ou faire semblant:

- T'as vu comme elle est grosse ?

- Qui ça ?

- Ben la boule ! Elle va me servir à faire un cendrier pour mon père ! Regarde voir petite conne !

Jennifer parlait comme sa belle-mère lorsque celle-ci lui montrait son savoir-faire sur les tartes... 

- Regarde... tu poses bien à plat la boule et t'appuies fort dessus... puis avec le deuxième doigt de ton autre main, tu aplatis tout le tour qui déborde pour faire lisse et pas moche... et à midi, à 3 heures, à 6 heures et à 9 heures, tu enfonces le petit rikiki pour faire le creux de la cigarette ! T'as compris ? C'est pas compliqué et c'est vite fait !

Virginie semblait toujours stupéfaite des résultats de Jennifer:

- C'est génial ! Avec 2 fois rien, toi tu fais deux fois tout!

J'ai revu par hasard Jennifer une vingtaine d'années plus tard, en faisant des courses dans une galerie marchande pour un double de clé. Elle travaillait à côté du Mister Minit dans le salon de coiffure de  'La belle Tignasse' du Auchan. Elle m'a dit de Virginie qu'elle était peut-être vétérinaire car il lui semblait l'avoir vu en encart publicitaire avec un Griffon sur les Pages Jaunes... et de Jérôme, qu'il était en couple avec Mathieu, mais que de tout ça elle n'en était pas vraiment sûre, parce que les choses de la vie allaient si vite qu'il était difficile de s'arrêter dessus.

- Et toi, t'en es ou avec tes cheveux ?

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