Laby 3000
Laurent Pendarias
Ulrich regretta de ne pas avoir écouté ses parents. Ces derniers lui avaient bien dit de rentrer directement à la maison, après la spatio-école. Le turbo-bus suivait une ligne droite.
Ulrich avait préféré rentrer à pied pour observer les rues, les affiches holographiques et les jongleurs.
Quand sa montre lui avait rappelé que la nuit allait bientôt tomber, le petit garçon avait décidé d'emprunter un raccourci et de passer par les anciens égouts.
Son téléphone connaissait les plans de la ville.
Ulrich n'avait pas prévu que sa machine tombe en panne. Après cinq minutes passées dans les égouts de béton, le garçon avait subitement vu les ténèbres se refermer sur lui. Il n'avait plus de carte et plus de lumière.
Devant les autres enfants, Ulrich se prétendait toujours courageux. Le garçon espérait devenir un jour un astronaute et partir explorer d'autres planètes. Il ne pouvait pas avoir peur du noir, du froid ou des dragons.
Néanmoins, se retrouver tout seul dans le noir, sous la ville, n'avait rien pour le rassurer.
A tâtons, il chercha son chemin. La maîtresse avait raconté aux enfants qu'autrefois des personnes s'étaient perdues dans les égouts. Ces malheureux avaient tourné en rond pendant des années. Quand ils avaient enfin trouvé une sortie, leurs barbes étaient longues et blanches.
Ulrich entendit un bruit. Il s'arrêta. Puis le garçon vit une lueur jaune qui approchait. Etait-ce une pieuvre de l'espace égarée ? Non. Ulrich soupira de soulagement en découvrant qu'il s'agissait d'un autre enfant perdu, et non d'un affreux monstre. Puis il reconnut l'autre : Pedro !
Pedro était un garçon de son quartier. Les adultes les confondaient tout le temps alors que les deux enfants ne se ressemblaient en rien, si ce n'est les bêtises. Pedro était aussi brun qu'Ulrich blond. Le premier étudiait la magie dans une académie en pierre tandis que le deuxième apprenait les sciences à la spatio-école.
Ulrich ! dit Pedro en reconnaissant son voisin. Tu es aussi perdu ?
Oui, j'ai voulu prendre un raccourci. J'ai suivi la carte sur mon téléphone mais il est tombé en panne.
Cela ne m'étonne pas.
L'apprenti magicien leva son sceptre surmonté d'une boule de cristal qui projetait une lumière jaune sur les murs.
Il ne faut pas se fier aux machines. La magie est plus sûre.
Pour une fois, tu as raison. Alors, où est la sortie ?
Je ne sais pas. Je suis perdu.
Et ton bâton magique ? Il ne peut pas nous indiquer la sortie ?
Non, je connais seulement le sort de lumière. Je n'ai pas encore appris les sorts de localisation.
Nous voilà bien embêtés.
Les deux garçons progressèrent encore un moment dans les égouts. Les couloirs arrondis se ressemblaient tous. C'était toujours le même gris, crasseux. Les rats et les champignons avaient envahi ces conduits délaissés depuis des années par les humains et les robots de nettoyage.
Ulrich n'aimait pas beaucoup Pedro mais il préférait être perdu avec lui et son sceptre lumineux.
Finalement, dans un cul-de-sac, les deux garçons retrouvèrent la carcasse d'un robot rouillé. Ils reconnurent le modèle, vu dans les livres d'histoire : un WILLY. Les humains avaient mis ces machines du vingt-et-unième siècle au rebut car elles avaient un cœur et des sentiments. Les Willy refusaient de quitter leur maison et la famille pour qui ils travaillaient.
Ils savaient aussi retrouver leur chemin partout sur la planète.
Les deux garçons sourirent en voyant que le robot fonctionnait encore. La machine demanda d'une voix enrouée où elle se trouvait. Ulrich répondit :
On rentre à la maison.