L'affaire conclue.
effect
Dans un hangar mal chauffé en Seine-Saint-Denis.
- Bonjour Monsieur !
- Bonjour Sophie !
- Alors vous, vous venez pour nous vendre quoi ?
- Je viens pour vous vendre mon assiette !
- Faites-voir ! … Oh comme elle est belle ! Vous en voulez combien de c't'affaire ?
- Le maximum !
- C'est pour un projet vacances ?
- Non, c'est pour me payer un détective pour retrouver mon chat !
- Ah c'est pas commun votre histoire... un détective pour retrouver votre chat... en général c'est plutôt pour retrouver sa femme, qu'on fait appel à un détective !
- Oui mais moi ma femme, je sais toujours où elle est !
- Voyez-vous ça petit coquin ! Qu'entendez-vous par là ?
- Ma femme, c'est assez simple! Soit elle est au bord de la piscine, soit au club de gym avec son coiffeur ! Si elle s'absente pour autre chose, elle me le dit dans l'escalier !
- Dans l'escalier ? Vous habitez une maison donc ?
- Oui, avec des traites et du vieux parquet.
- Mais comment elle vous dit dans l'escalier ?
- "Chéri, j'ai des courses à faire... si j'ai un peu de retard, les cuisses sont sur la plaque... t'as qu'à te les faire réchauffer !"
- Les cuisses ?
- Oui ma femme et moi nous aimons bien le poulet aux olives ! C'est pratique et c'est bon !
- Comment le faites vous votre poulet ? Y a quelque chose de spécial dedans que l'on a pas l'habitude de voir ailleurs ?
- Non, je le fais tout simplement ! Je fais revenir les cuisses dans une huile bien chaude, histoire de griller un peu les extérieurs, puis j'ajoute un gros oignon émincé et une gousse d'ail et je couvre à feux doux pendant bien une trentaine de minutes avec un filet de citron !
- C'est tout ?
- Ben oui ! C'est pour ça que je vous dis que c'est pratique !
- Et les olives alors ?
- Ah zut j'ai encore oublié les olives ! Ça fait déjà deux fois que je fais du poulet aux olives sans les olives !
- C'était quand la dernière fois ? Vous vous rappelez ?
- Pas plus tard qu'hier ! Ma femme allait à sa gym pour ses adducteurs et moi aux champignons pour mes morilles. A sa manière de claquer la porte j'ai bien senti qu'il se passait quelque chose dans sa tête. Aux champignons j'étais tout bizarre, j'étais pas dans mon assiette... je...
- Et c'est pour ça que vous êtes venu avec elle aujourd'hui ?
- Euh... ?
- Que vous êtes venu avec votre assiette !
- Oui !
Sophie se retourna vers un homme qui sentait l'arnaque et surement aussi des pieds, un homme pour lequel les doutes n'avaient de certitudes que lorsque ceux-ci avaient une signature:
- Bon alors Maître, vous en pensez quoi de cette assiette ? Est-ce que ce Monsieur va pouvoir retrouver son chat avec ?
Le Maître tournait l'assiette dans tous les sens, examinant ses décors, son dessous:
- Voyons voir... est-ce de la porcelaine ?... est-elle de Limoges ?... là, j'ai un doute chère Sophie !
- Pourquoi Maître, ce doute ?
- Je n'arrive pas à passer la main au travers !
- Parce que d'habitude, vous passez la main dans les assiettes ?
- Pas exactement ! Plutôt derrière ! Regardez ! Moins ma main entre l'assiette et les spots du studio se laisse entrevoir, plus cela veut dire que l'assiette est épaisse !
- Et s'il y a finesse, ça veut dire que c'est de la Limoges ? C'est ça ?
- Pas forcément ! A travers de la Chinoise on peut passer aussi derrière !
- Mais alors Maître, comment différencier la Chinoise de la Limoges, si à toutes les deux on peut leur mettre les mains au derrière ?
- Tout simplement en différenciant les écritures ! Derrière la Limoges c'est signé Limoges, et...
- Derrière la Chinoise c'est signé Shanghai, c'est ça ?
- Pas si simple que ça ! Chez les Chinoises il y des cartouches bien spécifiques pour chaque Province, car chaque Province a sa propre qualité de riz...
- Si les Chinoises ont du riz dans leurs assiettes, la Limoges elle à quoi dedans ? De la farine ?
- Vous ne croyez pas si bien dire Sophie ! On parle plus exactement de biscuit pour qualifier la pâte d'une porcelaine !
- Houlalà c'est compliqué votre histoire... des pâtes, du riz, de la Francine, du biscuit ! Bon alors elle vaut combien cette assiette ? Parce que le Monsieur c'est ça qu'il veut savoir, combien qu'elle vaut son assiette pour faire retrouver son chat !
- Là Sophie, je vais être franc avec vous ! Pas un kopeck !
- Pas un kopeck ?
- Oui, pas un kopeck ! Les motifs sont nuls, les couleurs sont ternies, la pâte est de mauvaise facture, et puis elle semble toute recollée ! On dirait qu'elle sort d'une scène de ménage !
Étonnée et embêtée, Sophie se retourna vers le vendeur:
- C'est vrai çà, qu'elle sort d'une scène de ménage votre assiette ?
- Ben avec ma femme on se les envoie de temps en temps sur la figure !
- A quelle occasion ?
- Ben, j'étais à deux doigts de vous le dire tout à l'heure... mais comme vous ne m'avez pas laissé terminer ma phrase, j'ai supposé que vous en aviez rien à foutre !
- Vous m'en voyez confuse ! Bien loin de moi l'idée de vous couper la parole ! C'était à quel moment ?
- Ben, c'était quand je vous disais que c'était pas la première fois que j'oubliais de mettre les olives dans ma recette de poulet aux olives, qu'hier en partant à mes champignons après que ma femme ait claqué la porte pour se rendre à sa gym, que j'étais pas dans mon assiette, que...
- Oui est alors ? Il est où le rapport avec la scène de ménage ? Et puis de toute manière elle vaut pas un Popeck votre assiette ! Même pas une miette !
* "Affaire conclue" sur France2. Présentatrice Sophie Davant.
Que chacun cherche son chat et les souris seront bien gardées !
· Il y a plus d'un an ·yl5
:)
· Il y a plus d'un an ·effect
On peut vendre son assiette quand on a plus de femme pour la remplir.
· Il y a plus d'un an ·Vous avez mangé votre femme ? :o))
Hervé Lénervé
La réciproque exige un peu plus de vertu :)
· Il y a plus d'un an ·effect