l'arbre noueux
Hervé Pizon
De l'arbre noueux au tronc creux, on distingue parfaitement bien le chemin au départ courbe, lisse et vide menant, c'est selon, nulle part ou à l'infini, et la source bleue crache ses eaux serpentant entre la végétation rivulaire et les bois morts. Les mousses ourlent les berges de part et d'autre érodées, les odonates sommeillent accompagnés des oiseaux de nuit, et le poisson me fait un clin d'oeil.
Pourquoi, de ce point de vue précis, la mélancolie s'invite-t-elle irrémédiablement au festin ? Sur ces agapes, je suis le chemin pieds mouillés d'avoir préféré arpenter les bas-côtés au halage désormais goudronné en guise de concession aux cyclistes. Transi et souffle court, je ne parviens pas à semer le froid éloquent collé à mon ombre malgré le ressort des grandes enjambées et les embardées de gauche à droite.
Le vert des prés me transperce de beauté et réchauffe au pied de la lettre. Au gré des haies en taillis tachetées de baies, quelques percées sombres ouvrent autant de passages dérobés précieux aux lapins. Un peu plus loin, un rendez-vous marqué d'une croix sur un pilier, quelque chose d'enfantin se joue sur le chemin : je sens ta présence, je compte mes pas de zéro sur le chemin à l'infini. Un message de toi. Le chemin mène à l'infini. Je suis le chemin. Je bats chemin.
hervé pizon