larmes de sang sur mes ondines
Jaap De Boer
INTRODUCTION
Un jour, j'ai eu peur ! Peur d'être pris au piège par celui que j'avais crée et qui détruisais ce que j'étais réellement: Jaap de Boer. Alors d'Une manière ou d'une autre, il fallait que je sorte de l'ombre dans laquelle je m'étais glissé depuis si longtemps par peur et par complexe... d'où ce livre de poésies.
Bruno, c'est lui je ne l'aime pas trop. Je le connais :
Rêveur, fragile, cynique, violent et surtout incontrôlable.
Jaap dessine, Bruno écrit. Deux styles différents pour deux moyens de percevoir le monde. Ils parlent chacun des choses qui les touchent.
L'Amour, la Mort, la Femme, le Sang et l'Agonie. Mais l'un, paillard le fait dans un graphisme rond et inoffensif quand l'autre le jette à la figure avec des mots qui suent le désespoir.
La Femme est leur thème majeur. Ici, ils se rejoignent. Le gémeaux Mercurien qu'il est fait symbiose. Dans ces poésies et essais, il y a plusieurs années de vie, de souvenirs, de débauche et d'espoirs. Optimistes, passez votre chemin. Il n'y a rien de gai, ici. ..Il n'y a que crachats haineux, rage désespérée, hargne maladive, noirceur défaitisme !
Défaitisme ?
Ou peut-être réalisme. Réalisme que nous sommes que des jouets dans des mains divines avec un petit et que notre libre arbitre est bien mince.
Deux sujets reviennent dans ces lignes, omniprésents :
La Femme et le Sang. Le sang est l'énergie vitale qui régit tout être, il est aussi la mort. La femme est celle qui va donner l’énergie a 1 'homme et qui tôt ou tard le brisera dans des tourments et des tortures qu'il ne connaissait pas avant de la rencontrer, elle est la Mort également !
Mais qu'est la mort ? Une finalité ? Non! Elle n'est qu'une étape pour chacun. Je la connais... Je l’ai vécu, je l'ai rencontré! ElIe est essentielle pour tous. Elle est la fin d’un cycle et le renouveau d'un autre. La carte du tarot Marseillais prend ici toute sa signification et son symbolisme.
J'y raconte au fil des pages, des femmes et des lieux, des impressions aussi... parfois des rêves oubliés... Quelques-unes s'y reconnaîtront. A quoi bon leur rendre hommage, Elles s'en moquent éperdument. S'il y a parfois le souvenir de moments agréables, il y a aussi cette amertume liée aux douleurs qu’elles ont infligées sans vergogne ni concupiscence. Malgré tout, Elles Sont... Et je les remercie d'avoir donné en moi l'énergie qui m'a poussé à les raconter, à les aimer, parfois à les haïr avec mes mots avant de les oublier et d’y penser aujourd’hui parce qu’elles sont les lambeaux d’un passé que parfois je regrette
Jaap et Bruno! Deux identités différentes. Deux mondes aussi... J'aimerais que les personnes qui auront la patience de parcourir cet ouvrage et ces versets aient la démarche de ne pas me juger sur une impression. Je voudrais qu’à travers moi, ils se découvrent un peu. Je voudrais qu'ils perçoivent leur côté noir et par ce fait, revoient leur jugement sur le monde et les gens. Que leur tolérance croît aussi, également, à mesure que leur peur s’effrite par l’accès de connaissances
. Je ne demande aucune indulgence. D'ailleurs je me moque du regard des autres, de la haine, de l’envie ou de la lâcheté qui les amène souvent, pour ne pas dire toujours, à la trahison.
J'ai choisi un itinéraire ou j’accepte de rire, pleurer, haïr et aimer sans pudeur et sans contrainte, une voie ou le fait d’être à genoux m’ôterait ma dignité et me provoquerait la nausée
Un itinéraire qui peut-être bon ou mauvais mais qui me permet d’avancer et d’assumer ma curiosité.. De franchir les distances et d'aller voir, comme quand l'on est encore un petit garçon, derrière le mur si des dragons ne s'y cachent pas Car après tout derrière chaque mur, il y a peut-être des Dragons, mais il y a aussi une fleur qui pousse...
..PREMIER CYCLE
ESPERANCES ET REGRETS.
C’est un regard, un simple regard
Une pénétration de mon âme,
Une paupière sans fard
Pour laquelle je me damne…
ODE AUX TENEBRES
ET L'AMOUR
La fureur de la Mort
La folie de l'amour
Au sommet d'une tour
Où le vent solitaire
Tel un linceul doré
.Vient me glacer les os.
Mille bras décharnés
A l'assaut des rochers
Gluants de larmes amères
Insipides, meurtrières
Me lèchent, rongent mon âme
Détruisent mes envies
Et Couronnent mes joies.
Dans ma vie misérable
Comme le ciel est noir.
Et ta lune engourdie
Comme un astre de mort
Dans ses nimbes glaciales
Me renvoient ma folie,
Et détruit mes lumières
Ténébreuses et blafardes.
La nuit le jour, et toi
Une pâle colombe
Dans un cri de la vie
Qui s'élève au dessus
D'une mer en furie,
D'un océan repu.
Tout souvenir diaphane
Me rappelle que malgré
Les sévices infligés,
Les tortures supportées
Le ciel réapparaît
Dans un halo sublime
Où, là, je reconnais
La femme et la sublime.
Et son nom lumineux
Scintillant de diamant,
Viendra dans tout mon sang
Calmement se jeter,
Tel un torrent tranquille
De bien-être et d'amour.
Alors dans tes bras nus
Sur ton corps alangui,
Je viendrais déposer
La flamme de mes envies,
Et l'immortalité
Qui soudera nos deux coeurs
Dans un râle de plaisir
S’éteindra sans un drame
FUSION
C'est la fontaine de mes spasmes
Qui me raidissent et qui réduisent
Mon épée tendre dans le fourreau
De ta forêt vierge en bataille
Baignée de brumes, douces effluves,
Où vient s'écouler le matin
Les aurores des plaisirs nocturnes.
Les perles qui coulent sur des plis
Nacrées d'amour, où l'oeil fautif
Violet, violant, vient te violer
Et où mes doigts tremblant de peur
Une dernière fois, se baigner,
Se fondre, se sentir prisonniers,
D'une chaleur sourde et vibrante
D'une prison de chair ambrée,
Qui bat, tel coeur en délire
Et qui retient ma main fautive.
Quand dans mon ventre naît la vague
Et qu'elle déferle en un remous
Chaud, salé, sur une plage
D'une bouche gorgée de sable
Laiteux, amer, source de vie
Et qu'inonde l'écume qui gronde
Trop plein mélangé à tes larmes
Qui finit telle blanche bave
Sur tes seins noyés par mes pleurs,
Et ta salive, mélange au goût
Exotique du frisson qui finit
Dans tes paumes serrées d’envie
Autour de mon pieu prisonnier
Planté enfin dans ta tourmente.
LA COMPLAINTE DU DESSINATEUR
A SA MUSE
Quand la sueur, le sang, le chagrin,
S'unissent, se haïssent et s’étreignent
Dans ma main pâle, calleuse, maudite,
Par un millier de malheurs nés
D’indifférences somptueuses
De négligences vertueuses...
Le sein se dessine et ta hanche
Devient pour le rêve une branche.
Le regard se noircit, s'obscurcit,
Et là, sous ma plume empennée
De douces aurores parfumées
Je crée tes formes, douce mutine.
C'est ta rime qui inspire beauté
En comparaison les divines
Sont ternies par tous leurs pêchés.
Toi, c'est avec mon crayon
Que je vais t'aimer pleinement.
Mon encre et ton sang mélangés
Dans un trait nerveux, débauché
Couleront sur mon papier vélin,
Illuminera mes matins.
Comment puis-je gommer de mon coeur
Cette tendre esquisse au bonheur
Qui se reflètent, nourrit mes gestes
Qui ne sont support que d'une âme.
Possédée enfin par la dame.
Aimée, et dès lors il ne reste
Que ton corps nu sur le papier
Où je laisserai comme une empreinte
Ma signature... De rouge peinte !
VA ET VIENT VERTIGINEUX
Toi et moi, enlacés là bas sur une grève
Où la mer agitée recrache en écume
Des souvenirs noyés, des sons devenus brumes
Pendant que le sommeil, échoué, devient un rêve.
Je relève sans pudeur et découvre avec joie
Tes trésors fabuleux qui font vibrer d'émoi.
Et le vent doux, salé, caresse et fait trembler
Un duvet mystérieux et un sein courroucé.
Ma vie devient raideur et ta source moiteur
Hésitante, enfantine, palpitante d’ardeur.
Nous ne sommes plus qu'un. affrontant le matin.
Le va et vient sacré devient folle cascade
Et nos fureurs jalouses vibrent en rires mutins,
Et nos cris de plaisir deviennent des ballades.
Tes reins cambrés de joies, dans un spasme fulgurant
M'ôtent toute énergie, et je tombe, fol amant
Dans une tiède torpeur, où tes mains, Mélusine,
Me pressent et tel l’insecte, m'explorent et me butinent.
Je sens tes lèvres pleines, et tes yeux tout embués...
Et ton plaisir subtil m'oblige à renouveler
Un combat où toujours je me sais terrassé.
Par toutes tes violences que tu ne sais brider.
Et le volcan éteint, par ta lave en furie,
De nouveau réveillé, fera renaître au lit
Un courant de douceur, un océan de pleurs,
qui inondera... Sublime, et ton ventre et mon coeur.
LE DROIT D'AIMER
Et si la vie n'était qu'un jeu,
Et si l'amour n'était qu'un feu
Où la brûlure du moment passé
Se consume dans une illusion,
.Et où toutes les passions
Ne deviennent qu'un immense brasier.
Et si j’apprenais à ré-aimer ?
Et si une caresse insoupçonnée
Pouvait faire renaître un sourire,
Illuminer un désir.
Et si surpris par un regard
je décidai de prendre amarre ?
Ainsi pourrais-je t'aimer
Toi qui n'a su que refuser
Ma tendresse et mes émotions
Fondues dans une même fusion.
Je n'ai que mes mains, mais sous elles,
Personne à pouvoir caresser,
Et je ne suis qu'un ange sans ailes
Qui regarde l'oiseau-lyre voler.
Et si tu me détruisais ?
Toi, et celles à qui tu ressembles,
Qui par besoin d’amour passionné,
De tendresses, de folies raisonnées
Jouerai d'un homme qui tremble,
Et d'un éclat de ton regard,
Tuerai, ici bas, mes espoirs.
Mais je suis las, vide et déchu
Sur mon trône de roi corrompu...
Sur mon nuage effiloché
Qui ne verse que larmes amassées
Par un million de cicatrices
Tissées dans la trame de lames
Qui s'enfoncent en moi et qui tissent
La noirceur épaisse en mon âme.
Et si je n'étais que mémoire ?
Désenchantée et sans espoir. ..
Pourrais-je alors t'aimer enfin
Et croire en vain à mon destin ?
Non! je ne suis que perdu
Dans un monde solitaire et si nu...
HOMMAGE
A toi ma douce muse
A toi mon très cher ange.
Tu as' pris ta revanche
Et de moi tu t'amuses.
En toi les chérubins
Renient leurs paradis.
Si les mâles en ton lit
Ont entaché ta vie
D'une sourde souffrance,
D'une pâle arrogance,
Ne sois point dédaigneuse
Sur moi et mon honneur.
Non, ne sois point haineuse
Si je t'offre mon coeur...
Le temps oublie les faits
Et pansera tes plaies.
Tu es un animal
terrassé par le mal,
de l'homme et de sa chair.
Mais ne sois point coupable
Et entends ma prière.
Tu sais, je suis capable
De tuer des souvenirs
De faire naître ton rire.
Viens donc près de mes mains,
Elles façonneront ta force.
.Je serais magicien,
Et deviendrai colosse...
Faut-il que je m'éloigne
Afin que je me soigne ?
Et ne plus espérer
Ta grâce et ta beauté.
Confie-moi tes douleurs,
.Toi ma Mie, toi, mon coeur,
Viens les cicatriser
l, En enterrant tes peurs.
Viens près de moi, enfant
Nourris-toi du néant
Et laisse toi aller
Au plaisir d'être aimé…
LA BARRIERE
Le mal d'aimer me ronge,
Ma blessure est ouverte
Et la nuit dans mes songes
Je ne ressens que perte.
Ton visage est en brume,
Chimère hypothétique,
Et tes yeux me consument,
En mon coeur ils me piquent.
Fugitive apparence
Dans ta brune élégance,
Il existe un cordon
Anonyme et sans nom,
Qui tel un fil d'Ariane
M'apporte enfin la foi
En toi ma courtisane,
L'élue de tout mes choix.
Il me donne quelques soirs
L'illusion de l'espoir.
Je savoure tes paroles
Et bois tout tes silences.
Jamais je ne te frôle,
Mais parfois tout mes sens,
Tout mon esprit fautif
Voyagent au gré des toits,
Et là, d'un viol furtif,
Je te ressens tout près.
Ma chair contre ta voix
Me provoque doux émoi.
Il est des aubes claires
Où ton corps presque nu
Déité dénudée
Se blottira, menu.
Indécence presque fière
T't voudras mon corps fou,
Et mes mains sur ton cou.
J'entendrais de ton cœur
Des larmes devenues sons
Qui effaceront rancoeur,
Amèneront des pardons.
Et tout sera béni…
Et tu seras la vie...
LE MONOLITHE, L'EPEE ET LA MORT
Mon épée noire tâchée de sang
S’abreuve, s'alimente en chantant. ..
Source de mort, fruit du chagrin
Elle s ' accroche, s'attache à mes mains.
Pour Elle, par Elle, j'ai tout renié :
L'amour et le sourire des fées.
Et le flot du temps me bascule
" Au f1nIlament des crépuscules.
Pour une nymphe, pour une femme,
Je t'ai perdue toi gente Dame
Qui m'a aimé, qui a brisé,
Qui est partie en ne laissant
Que cœur saignant et déserté...
Et ma jeunesse ivre de sang,
Par le temps s'écoule et pour moi,
L'été s'en va... L'hiver est roi.
Un monolithe sur une grève
Où j’ai goûté un soir tes lèvres
Sera, funeste présage
Témoin de mon dernier orage.
Et là, couché sous la pierre grise
Je t'imaginerai, éprise,
.De mon destin et de mon corps
Et las, j'accepterai ma mort. ..
APPEL
Quand la flamme de la peur brûle
La vie d'un amour déchiré,
Et qu'après les froides tentacules
Du chagrin, je reste éveillé,
Je veux ton corps, je crie ton nom
Et m’enfermer dans ta prison.
Je veux mes songes dans ton sang
Et me draper de ton blason.
De la pureté de tes trente ans
Et ne plus être moribond. ..
Ta voix m'enveloppe, je me nappe
D'un brouillard diffus qui me happe
Alors. ..Alors je m'imagine
Ta vie, ma mort et ton visage
Ce voile blanc beaucoup trop sage
Ne faisant qu'accentuer le charme
De ta nudité qui désarme,
Qui m'inquiète et qui me fascine
Comme mon sang sur une épine.
Tu te refuses, toi, mon Ondine,
Ma douce, ma muse et ma coquine.
Tu gèles ici bas mes ardeurs,
Galvaudes et ries de mes douceurs,
Lors que je t'aime d'un feu sacré,
Mais mon coeur finit au bûcher.
Quand je ne trouve que regard
Qui fait naître mon désespoir
Et il ne reste que mes cendres
Eparpillées par ton décembre.
Mes mains n'étreignent que le vide.
Devrais-je attendre que quelques rides
Voilent mon front et mes yeux bleus
Pour qu'enfin, toi, mon Yseult,
Tu me regardes tendrement
Et m'acceptes enfin comme amant ?
Voudras-tu m'offrir tes seins blonds
Et ton ventre où tels des diamants
Brillent des perles d'eau et d'amour,
Fruits du sommeil et de la nuit
Qui ne verront jamais le jour
Et dès lors me sont interdits.
M'aspergeras-tu de ta source ?
M'enlaceras-tu de tes bras ?
Et sentirai-je un jour ta bouche
Me murmurer « Je t'aime » tout bas ?
Me donneras-tu une nuit
Cet instant où naîtra ma vie ?
Minutes, années, secondes et mois,
Je voudrais t'étreindre, que tu sois
La Déesse qui me délivre
D'une mort où je ne peux vivre.
Un jour prochain je couvrirai,
Ton corps, je le sais, de baisers.
Et ton ventre plat où la vie
Un jour d'été y fleurira.
Je veux te faire vivre un bonheur
Qui terrassera tes malheurs.
Regarde droit! Droit devant toi,.
Je t'aime, je t'aime et t'attends,
Laisse ici bas tes tourments,
Et viens Petite Fille dans mes bras. ..
DEUXIEME CYCLE
TROUBLES ET TRAHISONS
FUMEES
Une machiavélique volute,
Un tragique air de flûte,
Une fumée trop bleue,
Un son trop ténébreux.
Une cigarette tenue
Dans ta main brune et menue
Vole de ta bouche vers le vide
Et me provoque des rides
D'aveuglement et de brouillard
Qui viennent voiler mon regard.
Et je ne perçois plus
Ta poitrine en un spasme
Rejetant le surplus
D'un minuscule orgasme.
Un cylindre trop blanc,
De papier, et tes lèvres
Aspirant un poison
Qui meurtrira tes plèvres.
Minuscule lumière rougie
Par le besoin et par l'envie,
Aussi brillante que tes yeux
Etincelle créée par les Dieux.
Bouffée planante, souffle léger
Vapeur du passé en fumée
Cendres inertes. ..Brisées. ..Trop prises !
Par un cristal de songe qui brise
Mirage doré et velouté,
Illusion sans consistance
Qui meure dans un cendrier
Jauni, déchu, sans élégance.
LE VOILE DE L'ESPERANCE
Un songe est déchiré
Par ta sombre beauté.
Mes rêves sont en passion
Liés â ta tendre chair.
J'ai en moi la vision
De ta sveltesse fière,
Orgueilleuse au repos,
Abattue bien trop tôt.
La sueur que j'essuyais
Sur ton corps tout meurtri
De tourments abusés
Emplissait trop mon lit.
Et moi le responsable
De maux et de tourments,
Je n'étais que coupable
D'avoir été amant.
Que puis-je faire pour revoir ?
De nouveau vais-je avoir
Ta chair contre ma voix,
Mes yeux contre tes hanches
Qui allument et déclenchent
L'espoir de ces émois ?
L’espace et la distance
Sont dès lors à mes yeux
Les plus grandes violences,
Bien plus dures qu'un adieu.
.Je vais coudre en mon coeur
Un coupon de bonheur,
Un morceau de ta robe
Que sur toi j' ai tant vue,
Et qui durant mon aube
A hantée mon corps nu.
Je vais tant le montrer,
Tatouage indélébile
Qui me rend fou et vil
Que je vais espérer
Te serrer à nouveau,
Te dire tous ces mots
Et un jour m'éveiller
Sur ton corps étourdi
Tout rempli de sommeil
Qui sous mes mains frémit,
O délicieux réveil… .
L'amour et l'abandon
Scintillant en émeraudes
Clameront ton pardon
Et chanteront mes odes.
Ce ne sera que fêtes !
Morte est la marionnette,
Errante, perdue et nue
Quand je ne te vois plus,
LE DON DE SOI
J'aime ta peau dorée et ta Poitrine ambrée.
Tes yeux ont dans leur vie la couleur du secret.
Et si, quand tu me frôles, je reste encore de glace,
C'est que je sens en moi la passion qui menace.
Sentir tes reins sous moi, ta chair effarouchée
Et fondre sur mes lèvres en plaisirs indiscrets.
.Ouvrir en toi la vie en des gestes pudiques
Qui te violent, te terrassent en une douce musique.
Nos deux corps ondulant dans des rythmes violents
Font battre nos deux coeurs qui s'attirent en aimant.
Amour ultime, et toi, chatte entre mes deux mains,
Tu ne désires sur toi que mes dents sur tes seins.
Je ne suis plus que mâle et mes yeux d'acier d'homme
T'adorent et te possèdent et dès lors je te donne
Et mon coeur dans tes mains, et ma vie sur tes sens
Dont tu peux te nourrir, dont tu peux faire essence.
En moi puise la force et reprend ton courage.
Et si parfois, peut-être tu redeviens volage,
Si tu meurtris parfois ma foi par tes tragiques outrages
Vis ta vie et l'amour dans ses ultimes cages.
Et puis comme un oiseau abattu par le vent,
Sentant ses ailes brisées, happé par le néant,
Tu reviendras vers moi, baignant dans tout ton sang,
Et je redeviendrai ton éternel amant,
Consoler tes chagrins et briser tes erreurs
Dans mes bras qui ne veulent construire que ton bonheur.
ET NOTRE NUIT... ENFIN
Absence de brouillard
Mes souvenirs épars
En un flot me submergent
Mon corps endolori,
., Et ma mémoire asperge
Ta vie et tous tes cris.
La sueur baignant mes draps,
Autour de moi tes bras,
Un baiser trop ardent
Et sur ton cou mes dents
Meurtrissant tes épaules
Et laissant sur ta chair
Des marques en corolles
Des empreintes en barrières.
Ton corps contre le mien
Soudés en une étreinte,
Et saisies, nos deux mains
En pieuse prière jointes.
Déferlantes en soupirs
Tu joues avec mes râles
Tu m'amènes délire
En cascades, en rafales.
Tu cal1lbres tes reins nus
Sur mon ventre trop plat
Et tout ton inconnu
Source de nos ébats
Eclate en secret
.En flammes et en brasiers,
En songes trop réels.
Et tu es là si belle.
Donnant sur mon poitrail,
Telle esclave en sérai1,
Blottie, abandonnée
Dans ton sommeil feutrée
Où ta bouche gourmande
Baise moments passés
Et qui telle une amende
M'incite à te croquer.
L'obscurité, la nuit
Engloutissent nos âmes
Et je ne sens que fruits
Dans mes reins qui se damnent.
Alors, radieux: je pars
Dans un sommeil profond
Et je vis mon départ
En murmurant ton nom. ..
LE PARC GRIS DES SOUVENIRS
Un arbre centenaire, des canards gris et blancs,
Un parc un peu perdu dans un temps parisien
Où un jour de juillet j'avais saisi ta main
Et où dans ton absence, je vais déambulant.
Comme un spectre ici bas dans ma noire redingote
Je guide mes pas mouillés dans des pierres de nuit.
Et je te sais très loin dans tes verts paradis,
Alors que dans mon suaire tristement je grelotte.
Des colonnes et un lac piétinés par le temps,
Des allées de tristesse, des gens qui vont, nerveux
Aveuglent dans un monde couvert et ombrageux
Revivant des instant sur des gens du néant.
Je sais qu'un jour d'automne, les feuilles y roussiront.
Le vent les brunira et sur le lac gris,
La pluie en froides gouttes étendra son tapis
D'un chapelet de rigoles, et des sons frémiront.
Des aires de jeux désertes et mon ombre en ce parc
Se promène en fantôme et flotte en revenant.
Et si ta tendre image se dilue dans mon sang,
Elle laisse dans mes veines un flot qui est ta marque.
..
Monceau, c'est comme un mot qui se veut mon cachet.
Tu es la cire liquide et je suis ton empreinte.
Tu te brûles à mon ventre et dans mes folles étreintes,
C'est ton nom que je crie dans un violent brasier.
Un beau jour tous les deux dans un matin d'hiver,
Assoupie par la neige, tu parleras d'amour.
Et s'il y a eu bien des nymphes à qui j'ai fait la cour,
Je sais que dans mon coeur tu seras la dernière.
QUAND LES LOUPS HURLENT À L'AMOUR
Il est un loup d’hiver dans ces prairies guerrières
Où le vent et la mort sont amours familières.
Le temps et les combats ont acérés ses crocs
Et de ses mâchoires grises il ne sort que des maux.
Acculé au désir, aux défaites amères
Il demeure indompté, fragile mais pourtant fier.
Les mâles l'ont battu, frappé sournoisement,
Mais ses dents ont mordu et sont tâchées de sang-
Les femelles à leur tour l'ont saigné en son coeur,
Il n 'y voyait pourtant que sources de chaleur.
Alors il s'en va seul et poursuit ses chemins.
Il ne connaît que deuil et frigides matins.
Et pourtant dans ces bois filtrés par le soleil,
Ses yeux furent éblouis par sa seule étincelle.
Elle était là blessée, ne pouvant plus bouger,
S'étant faite abusée elle avait tant lutté
Que ses yeux assombris dramatisaient ses traits,
Tremblante louve noire dans son dernier été.
Le loup, sans bruit, l'a vue et s'en est approché,
Et son regard de tueur l'a soudain protégée.
Il a soigné ses maux et a léché ses plaies,
Et dès lors, la femelle, ne sentant plus danger,
S'est confiée au loup blanc, sécurisant guerrier,
S'est laissée caressée pour alors être aimée. .
Et enfin les ténèbres et leurs voiles de douleur
Ont brûlés en lambeaux et ont séché leurs pleurs.
Et puis un soir de lune, sur un mont engourdi,
Un hurlement sinistre, un appel à la vie
A scellé les deux bêtes dans une double ardeur,
Ils s'aimaient et enfin avaient droit au bonheur.
L'astre du soir brillait et a baigné leur nuit.
Tendrement, doucement, ils ont aimé leur vie.
Et lorsque les aurores ont réveillé leurs corps,
En amants ils naquirent dans un nouveau décors.
Le loup s'est transformé en un homme radieux,
Seul souvenir d'antan son regard d'acier bleu.
La louve en une nuit, d'un geste mystérieux,
A fait place à la femme et à son corps de feu.
Ils sont là si curieux de cette mutation
Qu'ils ignorent en leurs cœurs l'amour et la passion..
Ils ont unis leurs sens lors de ce double envol
Vers l'étoile du nord qui protège les pôles.
Et vous pouvez encor dans les nuits sans visage,
Observer I 'horizon de ces pâles images.
Si vous savez aimer, si vous savez pleurer,
Vous pourrez les Surprendre, amants d'éternité.
Ils redeviennent loups l'espace d'un instant,
Quand la lune au zénith brille en son firmament.
Et sous cette apparence combattent l'ignorance.
Fruits du destin Parfait, ils assènent vengeance !
Ils tuent tous les pêchés et aident les passions
A trouver le repos dans de sages fusions.
Ainsi est la légende, la ballade divine
De deux loups solitaires adorant le sublime.
Leur quête est éternelle et leurs desseins secrets
Et pourtant dans le mal ils ont su se trouver. ..
Elle était fille des îles, lui des steppes voisines, -
Elle était libertine, lui vivait de rapines.
Deux destins insolents mais qui ont su pour 1 'heure
Lyncher des souvenirs, aduler leur bonheur.
Si vous êtes Poètes. ..Ou si vous êtes Fous
Vous pouvez déchiffrer la complainte des loups !
COUP DE POIGNARD SUR
UN LOUP SOLITAIRE
Par de tes mains, de tes mots, le doute m’a assailli
Mensonges douloureux dans tes psaumes pervertis.
De ta voix, de ton coeur, j'ai subi ton assaut
Qui a dans mon amour provoqué un sursaut.
Et je suis là, Loup blanc, regardant sur son poil
Cette tache si sombre qui grossit en étoile.
Un lin de remords noirs tissé en trahison
File et construit en moi ma sinistre prison.
J'ai si peur et si mal de la perte de Toi
Que je ne sais en quoi réconforter ma foi.
Et je suis là, courbé, sentant dans tout mon sein
Le fer de ton oubli, là lame de ton dédain.
Je brise mes phantasmes et je cache en mon antre
La douleur de l'impact qui se meurt en mon ventre.
Quand la morsure des mots laisse en moi la saignée,
Ma main se crispe et nu, je me sens transpercé.
Des plaies se sont ouvertes et je vois mes blessures
Dans un égout de pâleur, un relent de tortures.
Mes yeux désabusés regardent le néant,
Les sillons de ma vie, ton poison dans mon sang.
Pourtant baigné de rouge dans ma plaie écarlate.
Je reviens vers ton coeur et t'accepte sans hâte.
Et si en moi je sens un espoir qui persiste,
C'est par ta vie qu'ici, je bouge et je subsiste.
Déçu, endolori, mais victime d'un jeu
Où Toi, dame trop noire, redevient trouble enjeu.
La fuite et le retour dans tes yeux voilés d ' eau,
Tes sanglots en mon âme, mon pardon bien trop tôt,
Et là bas dans le feu qui nourrit tes orages,
Je ne vis plus ta vie mais mes sombres mirages.
...Ma fureur est finie et l’angoisse me ronge.
Je ne sens prisonnier à tes mains, à ta longe,
Allongé sur ma couche et sur ton corps céleste
Je veux violer mon rêve, impudique et modeste. ..
Et si des matins noirs rn'amènent des aubes blêmes,
J'attends avec espoir des murmures en « je t'aime ». ..
AEROPORT DE TRISTESSE
Le verre, l’acier, le bruit, dans ma tête ont saoulé
Ce fatal moment o~,tu vas t'envoler.
Et là, prostré au vent, dans une pluie livide
J'ai en moi tes baisers, et je ressens le vide.
Un bruit d'enfer repu et des fumées d'ébène
M'indique que bientôt, je vais vivre mes peines.
L’oiseau froid dans son vol rejoint dans les nuages
Les tourments de ta vie et tes frêles adages,
Et si heureuse et belle, tu sombres en ton vécu
Tu ne vois pas au sol, ma main vers toi, tendue.
Un recoin de tristesse en futiles vertus
Qui t'entraîne, Ô, amour ! Dans tout ces inconnus.
La solitude est là et mes yeux quelquefois
Vont pleurer tes sourires et baigner mon coeur froid.
Et bientôt sur tes plages en ondine admirable,
Tu compteras coquillages sur tes landes de sable.
Un halo de soleil bronzera tout tas rêves,
Et la lune saignera, astre mort, sur mes fièvres.
L'attente et le silence en armes rédemptrices
Vont trancher mes doux rêves et amplifier mes vices.
Seul le futur existe dans mes yeux de rêveur,
Et ta main, et ta voix, sont désormais ailleurs.
Peut-être dans un songe, rejoindrais-je ton corps
Pour déposer baisers dans de violents efforts.
Rejeté par le temps, oublié par l’espace,
En moi tout n'est que peur, j'ai froid et je trépasse.
Je rêve encore au vent caressant ton visage
Au sommet d'une tour au funeste présage.
Les pierres en étaient grises, mais ton coeur de princesse
Détrônait les violences, insufflait des promesses.
Vais-je vivre en ce mois, alors que ton absence
~ Va briser mes élans et émousser mes sens ?
Je ne sais plus très bien, je n'attends que l' Amour
Qui dans un oiseau gris, amènera ton retour,
Espérant de ton coeur et de ton corps d'ivoire
Des promesses de chair brisant mes désespoirs.
LA CAGE AUX REVES
Le matin de ma vie a soufflé des visions
Et j’espère en amant respirer l'air salin
D'une île et d'un papier, rédigé par ta main,
Dans la cage en fer blanc, boite de mes frissons.
Une lettre embaumée, parchemin médiéval,
Où je lirai ton nom en lettres frappées d'or,
Où tu dirais par mots que tu aimes mon corps
Allongé sur le tien en étreintes fatales-
.
Mais rien ne me rappelle tes instables océans.
Pas de lumières d'argent et pas une orchidée
Dont le parfum subtil évoque l’odeur nacrée
De ton Être en chimères, perdues dans mon néant.
Alors je m'imagine des moments de souffrance.
Ton coeur et ta raison dans des mains ignorantes,
Déchue dans ton orgueil irraisonné d’amante,
Et qui sur un déclin, retrouve ses errances.
J'ai peur de cet inverse, Parangon de vertu,
Où perdue dans tes sens, tu bafouerai ma vie.
Où lassée par l’amour, tu te mettrais marrie
Contre mon apparence qui deviendrait statue.
Et puis les jours se meurent, paralysant l’ardeur
De .mes rêves d'enfant, de mes caprices d'homme.
Et le masque du doute est sur moi, tel un heaume,
L’Amour me terrorise et mes larmes sont peurs.
Alors le pas pesant et le regard en sang
Je retourne à mes lieux de travaux, à leurs chaînes,
Confondant malgré moi, la passion et la haine,
Je reviens à mes rêves et m'assoit a tristement.
CARTOMANCIENNE DE MES AMOURS
En un jet de ta main, le~ tarots ont volé. ..
Des images en énigme t'ont soudain possédées,
Tes yeux noirs ont percé la brume du futur
Qui noircit ton regard et qui redevient pur. ..
Le Bateleur amoureux sur la carte l'Etoile,
Estompe le présent et tisse un léger voile.
Tu es là, fille de feu, parfois Cartomancienne,
Qui se joue de mes fougues et devient bohémienne.
Tes paradis perdus dans de noires intuitions
Inspirent tes promesses, provoquent tes visions,
Et durant cet espace, cet instant cotonneux,
Je redeviens pour toi un étranger curieux.
L'apparition du Mat, et ton sourire se fige
Au rythme de tes cartes qui parlent et qui voltigent.
S' en suivent le Pendu et puis la Maison-Dieu
Et je dois un instant redevenir anxieux.
L'ultime se retourne et ton attention meurt,
Tu déroules ma vie, je sens en toi la peur,
Celle d’avoir trop perçu un destin interdit,
Alors pour rassurer, tu joues et tu souris.
Et tu te loves en chatte dans mes bras désarmés
En oubliant tes cartes mais en faisant planer,
Un doute dans ma vie, un couteau dans mon corps
Qui a fait que je tire la lame de la Mort.
Elle était la treizième sur le jeu de mes vices.
Toi tu réapparais en femme tentatrice.
Tu quémandes un baiser pour que j'oublie l'image
Décharnée d'un instant, qui voile ton visage.
Alors je m'abandonne dans des gestes farouches,
Je couvre tes deux seins et tes reins, de ma bouche.
Des cartes de Marseille, j’oublie tout, un instant,
Et je goûte à tes lèvres, en ténébreux amant.
TROISIEME CYCLE
CHUTES ET FUITES
PEUR DE VIVRE
J'ai peur de vivre seul, de ne voir que mes yeux,
Dans le tain d'un miroir, qui me montre, ô combien
Je n'ai plus vu que le vide, qu'il ne me reste rien
Que la vue de 1 'hiver sur mes ans rigoureux.
Mes biens s'en sont allés et mes Amours au loin,
Vont railler mon destin et briser ma candeur.
Pour moi, il est trop tôt, il n'est pas encore l'heure
De pouvoir être heureux dans les flots du matin.
Plus de bouches à goûter plus de gestes silences,
Qui apprennent à un homme combien il est aimé.
Plus de corps dans mes nuits, et pas une seule fée,
Qui saurait par ses charmes, alléger ma sentence.
J'ai peur, pas une muse, qui ne prenne mon coeur,
Qui verrait dans ma vie ce mâle que j’ignore,
Qui ferait de la sienne à mon regard de l'or,
Et m’aiderait enfin à construire un bonheur .
Mes pleurs vont revenir, et mes sanglots aussi.
De nouveau ma poitrine sentira l'oppression
Du doute de ma vie, sans la moindre passion
Que je sens naître en moi, et me terrasse, ici.
Je suis las et je souffre, et mon sommeil est mort.
Les ténèbres entrevoient ma tristesse nocturne,
Mes rêves sont de glace. Me voilà taciturne,
Et pourtant si je meurs, je renais aux aurores.
La mort plus d'une fois cognera à mon âme,
La tentation du sang sur mes mains et mes bras,
Et puis ce petit souffle que l'on ne détruit pas
Apportera en moi de l'espoir à ma flamme.
Il ne:reste que l'art sur qui je peux compter,
Qui malgré mes chagrins et mes noires souffrances
Tentera certains soirs d'amener l'espérance
Sur mes plaies trop ouvertes et mes sourires défaits. ..
FIN D'UN ETE
Un jour d'été meurtri, flétri par ses nuages
M'apporte l'illusion, de la fin d'un voyage.
Un retour et tes yeux sous un ciel parisien
Qui pendant un long mois ne fut pourtant que mien.
Mais le pâle corbeau du doute et du remord
Pourrait bien me plier en implorant la mort.
Car qui sait si ma reine, revenant de ses plages,
Voudra bien, sur mon corps, redevenir volage.
Peut-être bercée de bleu, reprendras~tu la route
D'un destin sulfureux qui serait ma déroute.
Si décidée et folle en plaisant papillon,
Tu mettais mon coeur nu et mon corps en haillons.
Peut-être cet amour à tes yeux grandira
En haine, et non secours, et dès lors tu feras
De mon corps un toul1l1ent dans tes rêves d’été,
Qui tuera mes projets dans ta foi parsemée.
Je ne suis qu'un rêveur épris de liberté ?
Je ne prie que pour toi et jure fidélité.
Je suis CHRIST, mais ma croix peut porter ton image
Qui laisserait sur ma chair de bien sanglants sillages.
Tresser à tes cheveux les fils de ma vie,
Et sentir dans ton ventre l'espérance d'un cri
Qui serait synonyme d'un bien puissant toujours,
En donnant au futur, l'espoir d'un premier jour.
J'ai peur- que par hasard, des moments difficiles,
Des Ires meurtrières, des colères futiles,
Brisent nos espoirs d ' antan, et provoquent poison
Et fassent qu'un beau jour- je chercherai ton nom.
A la nuit, à la mort,!! A ta vie, à ton coeur,
Je hurle-le sans puissance en devenant vengeur-.
Des paroles de perte, pour moi, seront mes cibles
Et pour t'avoir à moi, je renierai mes bibles.
Je suis tueur-, je suis fou, quelquefois baladin,
Je ne suis pas un dieu, mais renie le malin. ..
Je suis un ménestrel qui par ses chants passionne,
Les Sylphes et les fées qui quelquefois se donnent.
Espérances déchues, dans le déclin d'un soir
Pourtant je le pressens, qu’illuminée d’espoirs
Tu viendras dans mes bras, en Parure de femme
Et dans mon coeur de fou, tu plongeras ta lame. ..
BROCELIANDE
.
Un lac millénaire, un bois un peu trop sombre
Peuplé de souvenirs et peuplé de tes ombres,
C'est, l'espace d'un temps, une brèche au passé,
Douloureux siècles enfuis, hantés par tes sorciers.
BROCELIANDE, en ton nom, j'imagine MORGANE,
Sulfureuse prêtresse dans sa quête des âmes.
Le fourchu sur la lande, est passé si près d'elle,
Qu'elle a aimé son rire et s'est faite cruelle.
Tes châteaux ruisselants de pluies dévastatrices,
Défient ouvertement le temps, et tous ses vices,
Et MERLIN sous son tertre agite encor au vent,
Son manteau de velours, et sa tiare en diamants.
Et tes brunes collines aux parures de chênes
Témoins de sortilèges enchâssés dans la haine
Mènent au V AL SANS RETOUR, où j’ai fui la pureté
En noyant mes erreurs dans le MIROIR AUX FEES. ..
HUCHE-LOUP ! C'est un nom qui se veut plutôt un cri,
Quand la lune, fruit du sang, baigne I 'homme qui prie,
Et que frênes et roseaux tremblent au vent mauvais,
Le cri d'un corbeau noir perce encor tes ondées.
J'ai pensé y mourir, renouer avec le temps
Ces brasiers du passé que je traîne en mon sang-
J'ai voulu y périr, et pourtant MELUSINE
Avait pris l'apparence, l'image d'une andine.
La nuit secoue un peu les halos de la peur
Et j’ignore si demain, j 'y perdrai mon honneur.
Mais j'y quête sans fin un phantasme au bonheur,
Où pour lui, à nouveau, je serai enchanteur.
CAUCHEMAR
Je suis l'hideux foetus de mes peurs d'enfant roi
Des rideaux du passé se déchirent en semences
Bousculent mon esprit et rompent mes silences,
De ces pluies engluées par des millions de voix.
Un moignon de chair rose, un pilon de bois vert
Cogne sur le planché souillé d'araignées blêmes,
Et ça bouge en halots, ça devient le totem
De cette vierge au feu qui bénit les enfers.
Un courant d'air glacé dévale l'escalier,
Un rat aux dents rougies s'enfuit en rires visqueux,
Trottinements d'horreur et frôlements vicieux,
Diluent l'ondée des brumes qui clament des clartés.
Un frisson de cauchemar, ma sueur qui coule en sang
Sur mes deux yeux crevés. Je n'entends ici-bas,
Que la fureur d'un feu sur mes mains de déments
Qui pleure et qui se couvre, en vain, sous ses draps blancs.
Un torturé brûlé joignant ses deux mains pieuses
Récite un psaume pervers au malin qui s'agite,
Et mes rêves volés par des sorcières en fuite,
S'échappent en fumées, suintantes et nauséeuses.
Des engoulevents qui hurlent, un cormoran repu,
A travers tous ces rires qui naissent dans le mépris,
J’entends soudain l’orage qui fige ma folie,
Et dévoile aux abîmes… que mes pieds sont fourchus !!!.
TON SILENCE, TON ABSENCE ET MA MORT
Le crépuscule des aubes et des incertitudes
A pali sur ma vie en un flot de rancœurs,
Et je ressens, glacée, cette froide torpeur
Qui m'étreint dès trop près dans mes nuits solitudes.
Les heures et les jours passent, j'en oublie ton parfum
Et si dans mes sommeils mon ventre te réclame,
Il en oublie pourtant ton corps dieu de la femme,
Ses soubresauts d'extase troublés par le matin.
Je deviens le mendiant qui néglige son coeur.
Mon corps en est meurtri, et mes gestes plus lents
Pourraient bien te montrer mes quelques noirs tourments
Dont tu figes le sang et apprends la douleur.
Et pourtant je souris, je marche et me nourris
Je côtoie des fantômes de souvenirs épars
Qui mettent en ma mémoire I 'heure de ton départ
Qui a fait que parfois, je te pleure et je prie.
Le goût de tes deux lèvres sur ma bouche exsangue
N'existe plus en moi que comme doux passé.
J'ose encore par des mots t'envoyer mes pensées. ..
Aucun écho pourtant, je ne suis qu'un vécu !
Si I 'heure des flamands bleus sur tes lacs interdits,
M'a fait voir un futur, où peut-être, tu es !
Je rêve, amour déçu, de nocturnes beautés,
Et par ton nom je hais, je passionne et je crée.
La roche des souvenirs a épris mon regard,
Le rugueux des distances a essoufflé ta voix..
Je meurs un peu, ma mie, sans toi je ne suis roi
Que de sourires dédains que de tes yeux sans fards.
Alors, périr pour toi, noyé dans le chagrin
De mon sang sans amour, de ma -vie sans passion,
Qui répand ta chaleur, vibrée en convulsions,
Tandis que le fer bleu attaque, tranche ma main.
Le tout dernier sommeil, celui que l’on regrette,
Des visions embrumées et des fumées d’étoiles,
Des diamants en cascades meurent en l!loi comme un -voile
Et ton -visage est là, en gestes anciens de fête.
Ma dernière étincelle, tu es là re-venue
Mais dans tes larmes bleues, je sais qu'il est trop tard.
Je réclame un pardon et implore ton regard
Que j’emporte avec moi dans des mondes inconnus.
VlSION SUR UNE SYMPHONlE
Joue, joue moi un air de violon,
Joue petite fille, joue pour moi.
Mon lit me happe il est si froid,
Il m’étrangle telle sordide prison.
Tes notes s'envolent, elles sont légères,
Le froid un instant n’est plus là.
Tu es danseuse, menue sur ses pas
Qui s'élève, rêveuse dans les airs.
Joue ma belle, oublie tout de mes maux,
Que ton archet balaie mes souffrances.
Sois ma font1Ùne, sois ma JOUVENCE,
Eloigne de moi la mort et sa faux.
Comme elle est douce ta musique,
N'y change rien, bouge tes mains.
Même si aujourd'hui le matin
S’est levé triste et pathétique.
Mes draps blancs vont être mon suaire,
Allège-les de tes doigts blancs,
Désigne-moi les firmaments
Et guide-moi hors des frontières.
Un tout petit bout de chemin.
Laisse-moi oublier dans tes yeux,
. Ton sourire peut me rendre heureux,
S’il te plait. ..Donne-moi encore ta main.
Je pars, morte est la symphonie,
Ta musique s’est tue et tu pleures,
Qu'importe près de moi tu demeures,
Tant pis si demain tu m’oublies. ..
QUATRIEME CYCLE
SOLITUDES
ELLE
Ce soir mon ventre a faim et la nuit me délaisse
Mais j’imagine en moi ta présence, ô maîtresse ...
Peut-être as-tu quinte ans, peut-être en as-tu trente,
Mais ton visage en rêve, étranger, me tourmente.
Frivole ou vierge fière, tu seras mon élue
Et dans mes draps de soie, je prendrai ta vertu.
J'ignore encore ton nom, j'ignore encore ta vie
Que tu passes trop seule, loin de mes paradis.
Des hommes entrent en ta chair et ton coeur est en joie,
Et pourtant par ces gestes, tu te prépares à moi.
Tu me reconnaîtras, je serai ce paria,
Ce fou près des étoiles qui t'ouvrira les bras.
L'amour dans mes yeux bleus peut-être t'effraiera,
Et pourtant, je le souhaite, ton âme s'ouvrira
Et tu t'habitueras à mes tristes souffrances
De chevalier déchu, sans but dans ses errances.
Malgré ma lassitude, et mes curieux frissons
Ma main et mon crayon, pour toi, inventeront
Des lumières et des traits qui me sont inconnus,
Fille de mes pensées, brune de mon salut.
Tu te feras aimer sans que tu le désires,
Et puis tu souhaiteras cet ultime plaisir
De mon nom paraphé, sur le tien, tendrement,
Sur un vélin doré où jauniront les ans.
Mon futur sera tien et dans les blancs sanglots
Tu m’offriras ton ventre m’apportant le repos.
Je caresserai tes reins, j'effleurerai ta bouche,
Et je mourrai un peu, par tes mains, sur ma couche
REVES DE FEMMES
Une nuit en halots allongés par l'hiver
J'ai rêvé de ta voix et de ton corps de glace.
Bleutée dan~ tes sourires et transie par le froid
Tu t'es blottie sur moi en dénudant tes seins.
La flamme de tes ans sur les miens déchirés
S’est alors embrasée dans Un moment de chair !
J'ai prié Un instant que tu ne soies chimère,
Hélas, dans mon matin, tu n’étais que poussière.
Et pourtant, je t’ai vu, brune ou blonde, mais en nymphe,
Irréelle et sublime en défiant les orages.
La pluie baignait ton ventre et les éclairs de feu
Arrondissaient tes hanches et embrasaient tes yeux.
Ces mirages nocturnes martèlent encore mes sens,
Et mes rages enfantines ont fait place à l'amour.
J'espère en vain, dès lors, le sommeil en mon âme,
Qui se jouera de moi en te faisant renaître. ..
ESPOIRS DE QUELQUES SOIRS
Une voix, quelques mots, fugitifs en versets,
La courbe de ta main sous mon crayon doré.
Un rêve qui retentit, une voix un peu triste
Amènent un peu de joie sur mes yeux bien sinistres.
Tu es là, étincelle, brillant dans une nuit,
Dégoulinante en larmes, et trempée sous la pluie.
Je t'imagine alors à travers des visions
Et ton corps et ta voix sont dès lors illusions.
Hasard de demain, tu es là en sonnets.
Si ta main a tracé quelques mots tourmentés
Je sens ton corps fiévreux, et je me sens MATISSE
Voulant t'aimer d'un coup par le biais d'une esquisse.
Je t'imagine alors, phantasme de l'espoir
Descendue de mes rêves, un peu nue quelques soirs.
Je me sens cathédrale, et toi en pieux vitrail,
Tu fais trembler mon coeur et frémir mes entrailles.
Une traînée d’étoiles jaillit de tous mes sens,
Et je vais, je le sens, sombrer dans la démence.
Le fou en moi va naître, je vais être violent,
En traquant mes revanches pour une femme enfant.
Tu es loin et pourtant un fil d'Ariane bleuté
Nous relie tendrement, moi et blonde fée.
Si ton rire est moqueur, et ta voix de velours
J'y ajouterai peut-être un serment à tes jours.
Chevalier de mes chaînes, je vais forger ton nom
Dans le sang de mes veines, puis dorer mon blason.
L’oriflamme vénale de ta candeur passée
Sera mon étendard que pour toi je dresserai.
Et pourtant je te crains, et tes yeux bleus, naïfs
Vont peut-être à nouveau me briser, tel un if,
Et l'instant de douceur que je fais vivre en moi
Sera peut-être alors l’arme de mon trépas.
REVE EN FUMEES
J'ai voulu dessiner, moi, triste solitaire
Un rêve à l'apparence d'une muse trop brune.
Mon crayon a tracé quelques traits sous la lune,
Et elle est apparue, orgueilleuse guerrière.
Peut-être l'ai-je aimée, peut-être y ai-je cru
Mais le ciel est témoin je n'ai pas fait souffrir.
Je n'ai fait que lui dire que j'aimais son sourire,
Sa voix a acquiescé, ses yeux m'ont répondu.
Des futiles caresses, des baisers trop légers,
Un lit encore défait par des gestes de nuit,
Des va et vient soyeux amenant sur un cri,
Puis le sommeil profond d'une âme tourmentée.
Amitié ou Amour, je n'ai pas su comprendre,
La douleur est partie, trop rapide à mon goût,
Et je n'ai pas eu mal, quand sont venus les coups
Qui brûlèrent mes passions et les firent être cendres.
La route de mon coeur poursuit donc son chemin,
Je vais vers l'inconnu qui amènera la Femme,
Celle qui m’aimera et terminera la gamme,
Des conquêtes trop brèves des prénoms féminins.
LASSITUDE DE DEMAIN
Je repense aux soupirs embaumés par l’espoir
Et je sens tout à coup que j’ai peur que j’ai froid.
Ma raison s’est allée, comme est partie ma foi,
Et je ne pleure plus quand vient le désespoir.
L’habitude du vide, du silence en ces murs.
Le regard se ternit, on n’entend que sa voix
Et l’échec est profond en sanglantes morsures.
Alors. ..Ne plus vouloir réclamer des émois.
L’Amour s’est faufilé, flétrissure charnelle
Abandonnant mon ventre, oubliant mes catins.
Il est un miel amer qu’on lèche sur des seins,
Et qu'on ne peut quérir de ne plus vouloir d'ELLES.
Chapelets monotones, rires par trop éphémères,
Qui s'égrènent en minutes tristes et retentissantes.
De la vie, je le sais ne viendra plus d'amante,
Alors je ne réclame que demain similaire.
FIL DE VIE... DE RASOIR... DE MES PENSEES.
Parcelle de terreur dans le tain d'un miroir
Qui reflète sur ma moi la coulée d'un rasoir.
J'ai perdu de mes sens, mes vertus, mes espoirs
Et l'illusion des mots qui s'égarent dans le soir.
J'ai aimé des femelles aux seins trop engageants,
Elles ont drainé en moi ma passion et mon sang,
Leurs regards ont voilé, ont violé mes trente ans
Et j’ai souhaité des suaires emplis de rires en sang.
J'ai bercé mes angoisses dans quelques sombres transes
Qui ont fait d'un chemin, ma route des errances.
Elle m’a mené trop loin ; au-delà de mes sens
M’a fait hurler la nuit pour tarir mes souffrances.
J'ai chargé la magie des femmes papillons
Qui enchantent les songes et font naître visions.
Elles ont eu mes aveux et mon corps en haillons
En brûlant mes étreintes en rebelles fusions.
Il ne reste que vide qui flétrit mes erreurs
En m'amenant la mort dans ses sordides peurs.
Et peut-être très loin sentirai-je les fleurs
Des jardins de l’oubli, qui faneront mes heures.
CINQUIEME CYCLE
REFUGES ET NOSTALGIES
MER D’ARROGANCE
Et elle s'en est allée, et j'ai perdu l'amour,
Aussi sur cette roche, je te domine en vain.
Si l’amante est partie, la mer nue me revient
Et tes nappes de brume se diluent sous le jour.
Tu te retires parfois en capricieuse femme
Mais repue de l'espace, tu reviens dans tes pleurs.
Adoucie par le large tu oublies tes rancœurs
Et ton reflux annonce une vague en mon âme.
Nostalgique en hiver, tu oublies le soleil
Ta lumière ténébreuse, et tes flots sont rageurs.
Ta fureur est violente et tes remous trompeurs ?
Mais blafarde en tes nuits, tempérée, tu sommeilles.
M'immiscer dans tes sens, me noyer dans tes larmes
Mourir un peu dans toi et sentir sur ma peau
Ta froide écume blanche qui me murmure en mots,
Que je suis face à toi, terrassée et sans arme.
Tu es belle et trop bleue dans tes parures d’été,
Tu donnes à tout amant ton sel et tes splendeurs,
Pour qu’à deux enlacés, ils deviennent rêveurs,
Et dans ces douces étreintes, pour toi, savent s’aimer.
Mer du Nord, mer de glace, de douleur et de sang. ..
Tu as vu des amours, et parfois des enfants,
Rappelle-toi TRlST AN. Il est mort dans tes eaux
Comme elle était hautaine la flamme de ses maux !
LES DEUX ONDINES ET LE POETE
Insouciance trop folle de mes années passées
Où mon coeur se brûlait aux flammes de deux feux.
J'étais repu de chair et mou ventre joyeux
Laissait sur leurs corps nus des ondées de rosée.
Un fruit dans mon regard m’amenait le soleil,
Tour à tour, enfant reine, et catin de mes rêves,
Je savais bien qu'en moi son prénom était EVE
Quand elle brisait mes haines et violait mes sommeils.
Le parfum de ses seins, de ses hanches exotiques,
Tour à tour, me frôlait en volutes d'ivresse.
J'attendais patiemment, et quêtais ses caresses,
Qui bien tard arrivaient, trop sages et trop pudiques.
Si mes bras entouraient sa peau un peu brunie
Par des lointains rivages et des soleils fragiles,
Je savais qu'aucun mot de passion trop subtile,
Ne devait de mes lèvres, s'échapper en un cri.
L’autre fruit à ma bouche avait déjà perlé
En saveurs de péchés, et en tendres promesses.
Mais des jours de chagrin éternisés en messes
Avaient brisé l’espoir de nos tendres secrets.
Je connaissais ses reins et ses épaules nues
Que couvraient ses cheveux en voile de nuances.
Elle était responsable un peu de mes errances
Qui m’ont fait être faible et courir éperdu.
Si le temps a passé, il reste un souvenir
De regrets bien amers, de fantaisies exquises,
Des images d’alors figées dans des soupirs,
Elle avait été rêve et de moi fur éprise.
J'ai maudit à mes jeux, mes yeux de sanguinaire,
Tour à tour j'ai aimé, puis réunies j'ai pris
...Peut-être par les ans deviendront-elles oubli
Mais leurs étreintes laisseront cicatrices en mes chairs.
Les moissons passeront et les flocons de froid
Parsèmeront mes cheveux, et pourtant la clarté
D'une bougie usée chantera « j'ai aimé »,
Et mes amours d' antan seront mes joies d’alors.
Perversions d'un rêveur lié à passion de femmes
Pas de choix dans mon coeur et je n'ai jamais su
Sur laquelle de ces muses jeter mon dévolu,
J'ai préféré périr en condamnant mon âme.
RACONTE-MOI LES ANTILLES
Dis, petite fille, raconte-moi ton pays !
Parle-moi des légendes et parle-moi du temps
Celui où tes yeux noirs n’avaient pas de soucis,
Et où ta chevelure flottait parfois au vent.
Dis, petite fille, est-il vrai que là-bas
Le soleil est plus gros, plus rouge et puis plus chaud ?
Que tes dents quelquefois, mordent les ananas ?
Que tu ignores tout de mes anciens châteaux ?
Dis, petite fille, la mer est-elle si bleue,
La mer est-elle si chaude, et ses vagues si fraîches
Qu’elle apaise ta peau, l' empêche d' être sèche,
Et te rend si jolie au fond de mes yeux bleus ?
Dis, petite fille, cette île n’a pas d’âge ?
Raconte encore tout bas que le cri des Aras
T’endors quelquefois quand tu es sur les plages,
Un peu nue, mais voilée, de ta peau trop ambrée.
Dis, petite fille. ..Allez ne sois pas fière !
Tes coquillages ont-ils la couleur de l'azur ?
Est-il vrai que là-bas, tu ignores les hivers
Qui laissent en mon pays de cruelles gerçures ?
Allez, petite fille, tes yeux sont rêveurs !
Ta pensée est là-bas, et je ne peux te suivre. ..
Et pourtant je voudrais voir tes précieux ailleurs,
Il doit faire bon aimer, il doit faire bon y vivre !
Tu sais, petite fille, en ville les gens sont gris.
Le tonnerre et la pluie s'y mélangent à mes larmes
Qui quelquefois s'échappent, de mes yeux, quand ils prient,
Qui ont vu bien le mal, dans 1 'homme et dans ses armes.
Dis, petite fille, donne-moi donc la main,
Et près du feu raconte! Raconte avec douceur
Que la magie subsiste quand la journée s'éteint,
Et que parfois, la nuit, tu affrontes tes peurs.
Ce soir, parle-moi encore, petite fille !
Parle-moi de ces fleurs et des odeurs d'orages.
Parle-moi des aurores qu'on ne voit qu'aux ANTILLES,
Et laisse-moi toucher tes bien troublants mirages.
MES LIVRES
Nostalgiques matins où l'hiver a sonné,
Je tremble plus souvent car mes mai11s sont transies.
Mes doigts cherchent, fébriles, ce doux papier vieilli
Qui renferme en son sein de bien troublants secrets.
Des mots et des couleurs, des phrases et des lumières,
L'azur d’un ciel serein dans de fastes visions,
Et toujours, l'oeil avide, je récolte moissons
De ces chim1ères d'encre qui font l'imaginaire.
Je sens tes pages vivre, elles craquent, et elles frissonnent.
Leur aspect est pureté et leur âpre douceur
A pour moi le parfum, la saveur des fleurs
Que je cueille parfois, sur des chemins d’automne.
Ils sont mon univers, la part de tous mes rêves,
Le tissu de mon âme, le sang de ma naissance
Qui naît en vagues lourdes et écume mes sens
Pour qu’affamé, je prenne, cette si douce sève.
Leurs cuirs patinés et leurs tranches dorées
Qu'usent un peu tous les ans, sur mes vastes étagères,
Sont les caresses tendres, le goût un peu amer
De mes passions discrètes que je lis en pensées.
C'est un acte d’amour , telle une liaison,
Une fusion sublime, à travers un instant.
L'auteur dans son cercueil redevient un vivant,
Nous partageons ses rêves, ensembles, à l'unisson.
Un fauteuil en cuir brun, la flamme d'un foyer
Inonde un peu les murs et les vastes tentures,
Et je ne sens ni vent dans ses froides morsures,
Je ne sens que la brise sur les mots de l'été.
Des images d'ailleurs, un pays, la Norvège.
Le bois souvent charrié en arbres millénaires
Sur des fleuves glacés au fin fond de la terre,
Là où la nuit persiste, et rend sombre la neige.
Arrachés de ce froid et des forêts lointaines,
Canada virginal dans tes aurores bénies,
Où l'on perçoit encore l'odeur des paradis
Quand tes fleuves au soleil sont rouges et semblent veines.
Livres, vous êtes mes amis, vous êtes aussi la graine
Qui a fait naître en moi ce respect du passé
La passion de la vie et l'amour des beautés,
Livres, vous êtes à moi, je vous garde et vous aime.
SIXIEME CYCLE
RENAISSANCES ET
INTERROGATIONS
DE L'ENCRE SUR UN VENTRE
Le poète comme le lac a besoin de tourments,
De rafales du vent sur son teint engourdi,
Des brumes de rosées qui percent les oublis,
Afin que germe en lui, l'essor d'un feu ardent.
La mer et ses rivages, semblables aux aquarelles,
Est volcan d’où jaillit le sein de mes printemps
Sus ses trônes de vagues, s’assoient des dieux déments
Qui deviennent furies et sortent de leurs stèles.
J'ai besoin de la mort, du chaos dans son deuil,
Afin que mes viscères engendrent des labeurs
Et que sourdes angoisses agitent mon sommeil,
Pour que des traits jaillissent sous l’afflux des douleurs.
Le Crayon est une arme, la haine la soutient.
L'amour le fait vibrer sur l'onde des papiers.
Il griffe les sillons et s’abreuve à ma main.
Cicatrices de lin sur un vélin violé.
Le corps sombre, orgueilleux d'un nu trop familier,
s 'y couche alors enfin, je rêve de pressions
Un ventre sur des seins, une ondée de rosée
Qui écume en fontaine sous poussées de passion.
Mes lèvres sont buvards, j 'y étanche ta sueur.
Et si des reins se lovent, reptiliens sur mon corps,
C’est ceux de mon esquisse, se jouant de mes pudeurs,
Qui de ses cuisses d'or me réinvite à l'effort.
BLONDE APPARlTION
La nuit durait longtemps sur les landes de deuils,
La pluie et les ondées embuaient quelques sanglots,
D'un coeur déjà meurtri par des frissons d'orgueil
Et qui noyait ses ires dans de ténébreux: flots.
Et puis un soleil mauve sur des neiges empourprées
S'est levé faiblement dans un sourire timide.
Il a lavé le sang qui coulait sur mes plaies,
Puis éclairé un peu mon regard bien livide.
Une femme, une enfant, hâlée de cheveux: clairs
A bercé quelques rêves dans des odeurs de fruits.
Sa voix un peu taquine et sa présence fière,
S'est joué un peu de moi, comme on gagne un pari.
J'aurais pu la nommer, LILITH, mais son nom
Rimait avec mutine, chantait avec ondine.
Elle était un peu biche, parfois même un peu faon,
Mais ses gestes gracieux: étaient ceux des ballerines.
Ensorceleuse fée, elle a baigné mes sens,
Emoussé les rasoirs qui flirtaient à mes veines
De sa baguette d'If, a rompu mes errances,
Et fleuri de son rire mes hargnes et mes haines.
Dans ma quête de femme, j'ai vu ses grands yeux d'ambre,
Elle était la raison et la folie bien née.
Elle effaça pour moi, les blessures et les cendres
Qui avaient vu ma mort, par les oublis errer.
Mon coeur à ma surprise s'est remis à trembler,
Son rythme inélégant m'indiqua que passion,
Submergeait mes sagesses en rosées insensées
Qui rouillaient par patience, mes sordides prisons.
Las ! La dame est rebelle, et de moi n'ose encore
Recevoir quelques fleurs, masquées dans des sceaux tendres.
Elle ne donne que mots, parfois un peu son corps
Qui par ses feux m'oblige, à être salamandre.
Gargouilles du passé, effroi des souvenirs. ..
Ils sont là; nauséeux, prêts à saigner mon cou,
A dérober mes joies, et à salir mes rires,
Pour qu'à nouveau je hurle et redevienne loup.
Dois-je aimer à nouveau, mais connaître la peur,
D'un départ, d'un dédain, d'un oubli un peu vague.
Vais-je entendre de ressort, le son de rires moqueurs
Qui lacèrent quelquefois le coeur comme une dague ?
Séduisante ingénue, mais femme malgré tout,
Elle sait comment faire naître l'agonie dans des affres.
Diluer des souvenirs qui s'estompent un peu flous,
Mais qui laissent en mon sein la traînée de balafres.
J'ai le genou à terre et j'offre mon épée.
Mes yeux s'abreuvent en elle, et qu'importe la flamme,
Si elle me brûle un peu, elle demeure un été
Qui perdra mon esprit et souillera mon âme !
SUPERPOSITION
Elle est là; elle est belle, salvatrice en futur
Ses doux gestes fascinent, te reforcent à séduire.
Ses cheveux ont ~u1eur de charbon le plus pur
Et pourtant dans ton âme tu ne penses qu’à fuir.
Superposition de celle qu' on attend pas.
Tu la vois un peu trouble, mais défi du passé,
Elle inonde tes yeux, t'empêche de rêver,
Tu sais qu’elle est en toi et brouille un peu tes pas.
Effervescente brune, slave des jours enfuis,
Une brume, un halot, des sourires de mépris.
Mais depuis ces jadis, aucune autre en ton coeur
N'a pu penser tes plaies et t'amener chaleur.
Superposition de celle pour qui tu fus
Un rêve, un ménestrel, un chevalier maudit,
Un archange des feux, et tes yeux t'ont banni
De tout espoir d'amour, de tout amour perdu.
Tes déchirures de rêve t'on fait ramper de peur.
Tes poings ont tant saigné de coups frappés aux cieux,
Que le temps a flétri tes maux et tes terreurs,
Et qu'aujourd'hui tu penses parfois à d'autres yeux.
Superposition de celle qui est toujours.
Si le temps a passé, il reste des pressions,
Des souvenirs de reins, dans langueurs d'effusion,
Mais des femmes futures. ..Elle sera de retour.
IMPUDEURS
Le dos en promesses d'un soir
Des caresses interdites dans le noir.
J'avais plié ses cambrures impudiques
Sous mes désir$, perversions mythiques. ..
QUAND L'OUBLI NE VIENT PAS
Sous une lumière d'airain au son d'une foule d'or,
Une page s'est ouverte nostalgique d'un autre âge.
Le temps, sordide horloge l'a égrené à vie,
L'alourdissant par trop qu'elle ne puisse être lue...
Des larmes ont jaillies après l 'hagard chagrin,
Et puis les érosions de souffrance alanguies
Ont drainé rage et haine dans des bris convulsifs,
Qui masquèrent les torpeurs et les remords saillants.
Tes revanches trop hostiles et tes jours de tortures
Eclatèrent en reflux, en lumières rédemptrices.
Fiche ta voix candeur au sommet d'une Etoile,
Hurle encore son prénom et viole son souvenir !
La Mort n'est pas ta voie, même si tu rêves d'elle.
Son rasoir qui te nargue et te propose abîmes
T'amènerais prison, et l'image de ta belle
Hanterai ton linceul t'empêchant de renaître.
Elle reviendra amère, la joie des renaissances.
Des rides subsisteront déformant ton sourire,
Et le temps effacé d'un choc inaccessible
Eterniseront tes joies éphémères et vénales. ..
SEPTIEME CYCLE
INITIATION ET QUETE
MONTAGNES SANGLANTES
J'ai gravi des rochers dans de folles ambitions
Et rêvé de silences qui heurtaient les parois.
Le courroux des or~es a blanchi mes émois
Et laissé souvenirs de sanglantes visions.
Aurores réinventées par des dieux de folies,
Qui de leurs mains façonnent un décor outrageant.
Les lumières d'arc-en-ciel s'émoussent en glissant,
Ophidiennes, sur un mont inviolé et blanchi.
Nuages ensanglantés qui baignent au loin les cimes,
Les noient dans les impacts de blessures d'un autre âge,
Par le temps, infligées, qui creusent quelques sillages
Et semblent s'écouler en larmes douces et chagrines.
Se jeter dans un vide où sommeille une aiguille,
Se ficher dans sa pierre en lui donnant mon sang,
Qu'il s'écoule en cristaux dans des vents trop violents
Et soulage en parfum. Le coeur givré des filles.
VOYAGEUR DE L'INCONSCIENT
J'étais païen, j'étais un homme,
Celui que la religion bannit,
Et si ma vie aujourd’hui se ternit,
C'est d'avoir côtoyé les gnomes.
J'ai contemplé des lieux désuets,
Adoré sous l'eau les scarilles.
Appris avec les farfadets
Comment aimer, séduire les filles.
J'ai lu des ouvrages interdits
Ceux dont les pages tombent en poussière
Quand les chapitres sont finis,
Et laissent en gorge goût de prières.
J'ai tracé sur des sols rougis
Par des sacrifices bien vains,
Des lettres des signes et des écrits,
Qui laissèrent des plaies à mes mains.
Mes yeux ont contemplé Orion ;
Des galaxies, des nébuleuses,
Je n'étais alors que ce pion
Qui pensait folies insidieuses.
J'ai dansé la « ronde des fées »,
Vieilli près des ternes GALLOIS
J’ai été Celte, un fier guerrier,
Mais trompé la confiance des rois.
Il y a eu Faérie sous la pluie,
Et la vision des ogres en ripaille.
Les larmes de mes Walkyries
Qui pleurèrent sur mes noires batailles.
Et puis j' ai compris le silence,
Je suis parti, loup dans les bois.
J'ai hurlé la nuit ma souffrance
En carnassier privé de toi.
La peur et les cagoules blanches
Ont protégé quelques années,
Même si souvent sur des hanches,
Je posais mon regard d'été.
J'ai lutté contre mon ventre fou.
J'ai renié le sexe et la mort.
J'ai traîné ma vie dans la boue,
Et me suis noyé aux aurores.
Aujourd’hui je suis vieux et maudit.
Je meurs un peu, sourire en coin.
Mais ce n ' est que début, un sursis,
Et de mes vies je n'oublie rien.
Ce soir des entrailles de femme
Vont accoucher un nouveau jour.
Je sortirai de ces parois
En reniant mes anciens amours.
Un cri de vie, un vagissement,
Un destin sulfureux à vivre. ..
Recommencer en fou dément,
A oser rêver et sourire! ! I
LE CELTE
Impression lancinante, je suis Celte ici bas,
De ces forêts jamais où ne perce soleil.
Où suintent les légendes de Fées et de merveilles,
Et où les portes s’ouvrent, à l'aube des trépas.
Les Mythes y prolifèrent, comme feuilles dans les arbres.
L'obscurité, la pluie, y règnent en souverains,
Et parfois dans le froid, ténébreux d'un matin
On entend la complainte, en psaumes, d'un pauvre barde.
Les siècles nous oublient et les guerres se succèdent.
Nos coeurs se sont meurtris, nos frères se sont cachés.
Seul le sang de nos femmes teinte encore les épées
Des barbares du sud, où soufflent les vents tièdes.
Nous sommes le souvenir, aucun mot ne nous cerne.
Nous vivons la magie à l'ombre de nos charmes,
Et les chênes nous donnent, Energie à nos âmes.
Qu'importe si nos corps nus finissent dans des Cairns.
Le temps s'est écoulé et ses siècles faussés
Ont oubliés nos vies et gardés dans des livres
Des rayons de conscience, parsemés par le givre,
Qui ont fait nous confondre à des peuples passés.
Les traces de nos espoirs sont devenues Tumulus,
Mégalithe ou bien Tertres enfouis dans des collines,
Qu'on renié par excès les valeurs citadines,
Alors que nous étions, de loin, un peuple élu.
Nous avons voyagé, erré de par les temps,
Traversé des barrières d'océans et de monts.
Nous avons accosté et fondé bien des ports,
Repartant vers le Nord, migration de géants.
Nomades de l'infini je ne suis plus que pierre,
Où fichée en ma masse, une épée noire frémit,
Elle sera un beau jour, par un vrai roi, saisie,
Et chantera louanges et vertus d'une autre Ere.
Le Picte en moi se meurt, mes yeux se sont fermés.
Toi Gaël ! Et toi Scott ! Défend tes fiers aïeux.
Ils savaient en ce temps, respecter tous nos dieux
Et le sang des combats que nous avons versés.
CALDEFOUCH ! Entend~moi ! Résonne encore un peu !
Je veux revoir STONEHENGE, m'abriter sous ses rocs.
Sentir BEL et MITRA assourdir de leurs chocs
Les ruines de ce monde qui renaîtra en feu! ! !
HUITIEME CYCLE
SUR LES TRACES DES MUSES
DES IRES DE BRUNE
Je l'ai rêvée, je l'ai vécue, nudité éthérée sur papier,
Et puis dans l'aube d'une clarté d'été
C'est elle qui d'un sourire m'a surpris en défaut,
M'a fait vibrer un peu tel au vent le roseau.
J'ai décidé pour elle de changer les couleurs
Des vies qui me noyaient, des vies qui me suçaient.
J'ai voulu renier mort et changer les odeurs
Que je créerai pour elle comme parfum désuet.
Brune et frêle, et pourtant quand ses ires sont venues,
J'aurais aimé rougir car je n'y ai pas cru.
Je n'ai su que pleurer implorer des pitiés.
Elle méprisait d'un mot mes silences éhontés.
J'aime encore en mémoire ses gestes inachevés,
La couleur de ses yeux ses épaules sucrées.
Elle avait su donner en moi des forces vives
Qui m'a donné l'envie d'approcher de ses rives.
Le temps n' a pas voulu que je frôle la belle
Mes paroles sont enfuies comme tristes hirondelles,
Dans son coeur aujourd'hui l'envie d'un nouveau jour
Rimant avec plaisir flirtant avec amour.
Parangon de vertu ou traîtresse d'Amour,
Peut-être suis-je aussi le loup fou sans retour
Je mérite sans doute ses blessures chamelles
Qui me font avoir peur de ne rêver plus d'elle. ...
L'amertume de mon âge la raison de ma quête
Jalonnées en salons jonchant dans quelques fêtes
Mon halot irisé se morcelle en épines
Car las, je sais dès lors, j’ai perdu ma mutine.
Des espoirs de retours dans des mots de sentence
Des courroux alanguis sur mes sombres insolences ;
Pourtant je la recherche elle est telle une essence
Que j'utilise en moi forgeant ma renaissance.
Femme et fille du néant, un peu Russe, un peu Slave,
Elle était le volcan qui agitait mon corps.
Elle était la brûlure dont je ressortais fort
Pourquoi a-t-elle voulu que j'évite sa lave ?
ELLE, L'INACCESSIBLE
Tu es née muse en feu dans une crainte hostile,
L'impression de naissance d'un amour cicatrice
Où sommeillait en lui la peur de mots futiles
Alors que le désir rêvait de ton calice.
Ca commence en repli, en avance un peu gauche
Sur un tourment de pluie et d’envies impudiques
Le coeur s’éprend mais las, tous les souvenirs fauchent
Les pulsions qui se traînent dans des gestes cyniques.
En Diablesse, en Guerrière, tu es fière et hautaine
Tes puissances ont tranché les chaos de mes pleurs.
J'ai su trop tard cacher, mes nocturnes terreurs,
Et le fer de ma peau s'est mu en porcelaine.
J'ai frissonné d’envie sous tes chaînes de sable.
Tu les posais en fleur sur des rugueuses pierres,
Aujourd'hui elles me rongent et me taillent souvent
Et me font discerner la nymphe « muse en lierre ».
Et pourtant dans ton corps d'Ondine aux gestes d'ange,
C'est la guerre et la mort, le ventre en déraison.
Des barbares de nuées, des relents de revanche
Que tu veux taillader pour quitter tes prisons.
Fourbu et de guerre lasse, le geste indifférent
Sur le mâle qui devient, sinistre baladin.
Tu te ris des offrandes que j' offre à tes néants,
Et mon sang redevient un breuvage aux lutins.
L’attente indélébile de ma harpe candeur
Jouera aux lunes sombres pour des bals indécents,
Des psaumes inimitables seront chargés d’horreur.
Je te rêverai un peu dans mes noirs firmaments.
Peut-être un jour prochain quand le flou de ta vie,
Balayé par la hargne, du torrent des années,
Sentiras-tu ton coeur en écho, qui supplie,
Et ce désir timide, d'un fou à tes côtés.
INDECISIONS
Impression lancinante d'avancer dans des nuits
Où plus rien d’apparent n’éclaire le crépuscule.
Seul le cri d'un aras sur des plages de pluies
Semble se mélanger aux hiboux qui hululent.
Les sables engorgé dans de sombres automnes
Etouffent bien des rêves dans le tain des miroirs.
Le songe de mille oublis sur un coeur qui frissonne
Au rythme de mon sang qui s enfuit du rasoir ...
Une traînée d'ivresse, une brune en mirage,
Des envies de traîtresses dans des pulsions de haine,
D'amour, qui se ternissent dans quelques pieux voilages
Au chant clair d'une ondine qui murmure et blasphème.
Vies propres ou vies perdues, chaotiques, un peu vagues
Qui s'estompent en un songe où ne perce la joie,
Se rouillent quelque peu, comme ternit la bague
Qui offrait sur des ans l'espérance d'émois.
Mutine un peu trop sage dans mes stupres de fou,
Le phantasme violent d'odeurs bien tentatrices.
Les mains priant aux dieux quelques pâles artifices
Qui me laissent au regard des larmes un peu floues.
Les matins meurent parfois dans des frimas d’argent,
Tes cheveux me rappellent quelque ébauche un peu vive.
La ressemble trop à des suaires en tourments,
Et ta sombre silhouette demeure inattentive
Le son de ton nom bref qui rappelle un alcool,
Une bouche vermeille qui provoque chaleur,
Présence un peu divine qui me rend un peu fol
Et blanchit mes réflexes en m'apportant pâleur.
Noire magie d'un espoir, redoutable en mes sens
Qui laisse encore le temps d'espérer des ivresses,
Et si parfois ma voix t'invite à l'indécence
Je rêve au lit défait qui verrait nos caresses. ..
DES PAS DANS L’EAU DES LARMES
Quand l’amour te fait mal, que ton coeur est meurtri,
Va ! Parcours tous les automnes, flirte sur les sillages
Du froid et des brouillards, des turbulents orages
Qui s'enivrent en complainte et naissent sous les pluies.
Enfuis-toi dans leurs nimbes qui nettoieront tes plaies,
Mélangeront sur tes joues le relent de tes pleurs
Qui s'écoulent sans honte, sans bruit et sans pudeur,
Pour que nul dans tes yeux ne traque tes regrets.
Promène alors tes gestes dans le froid des matins
Quand un vol d’oies sauvages efface tes souvenirs.
Si le chant des mésanges te rappelle des rires
Tu pourras te parer des rosées de satin.
Le baume ensorcelant d'une ondée salvatrice
Amènera sur tes ans un bienfait de fraîcheur
Et tant pis si ce soir, tu pries pour tes douleurs,
Tu te protéges, en lâche, du mal et de ses vices.
Le tonnerre gronde enfin et soulage ton coeur.
Il en couvre le bruit, le battement trop fiévreux,
Tu ne fus que pantin, réduit à quelques jeux
Ta muse s'est lassée, tu ressens la fureur !
Tu vas jouer de ta lyre des airs de solitude,
Tu renieras les femmes en cherchant leur amour,
Tu forgeras citadelle et tu deviendras tour,
Emprisonnant tes plaintes, la mort et ses préludes.
La lueur des bougies, leurs flammes biseautées,
Un chant de nostalgie dans ton âme un peu terne
Animeront ton présent et creuseront des cernes
Sur ton regard bleuté, témoin d'un seul été.
AMERTUME
Sur des landes engourdies par des brumes insolentes
Mon regard s'est porté sur des temps révolus.
J'ai en moi mon passé, ténébreux il me hante
Il viole mes chimères mais demeure mon vécu.
Dans mes folies guerrières, mes ambitions de preux
J'ai renié quelques bibles qui dans leurs pieux adages
M'ont fait rêver de lieux, de bonheur sous des cieux,
Mais trompé en laissant la parure de mirages.
J'ai trompé constamment l'espérance des Rois,
Dansé des rondes obscènes sur les miroirs aux Fées,
Exploré et pillé de vieux tertre Gallois
J'ai terni mon honneur et souillé ma pureté.
La candeur des mutines, sur moi, bien trop volages
M'a fait quêter les Belles et leurs Amours blafards.
J'ai cherché dans mes vies, éparpillant mon âge
Pour qu'Elles viennent à mon âme, me guider telles un phare.
frivoles dans leurs passions, les Diablesses ont crevé
Mes yeux bleus tourmentés, laissant de l’amertume
Elles ont ri de mes peurs, mes espoirs ont fauchés
Pour que j'erre dans mon suaire, tristement sous la lune.
Mes Dieux se sont tournés, je les ai trop défiés
Sur des monts interdits, des montagnes trop hautes.
J'aurais voulu, pour moi, qu'ils créent des nudités
Qui allégeraient mes peines et pardonneraient mes fautes.
Hélas, je suis païen et les Ires des esprits
Ont frappé mon corps nu dans des rires de déments,
Ils m’ont fait, à genoux, me mettre pour que je prie,
Implorer leur pardon parvenu du néant.
La mort est ma compagne, mes haines sont voilées.
Mes yeux bleus ont percé des secrets en sanskrit,
La traînée des coulées, rougeâtres, à mes poignets
Est aussi comme un sceau qui a brûlé ma vie.
Aujourd'hui, c’est mon sang que curieux je regarde.
Cette tache écarlate qui sur mon sein grossit.
Elle est comme une étoile qui empourpre mes hardes,
Affaiblit mes genoux, draine mon énergie. ..
TROUBLES SAUVAGES
Haine inintelligible, quand le sang et les heures martèlent à ton
Tourment...
Des nuées obscurcies en halos de remords, viennent en mots
assassins, fiels amers, troubles sons.
Ils assènent des raisons, obscures, inconcevables et des bleus
regards purs épient tes découvertes. ..
Tu songes à ces lumières qui inondaient tes yeux.
Elles révélaient folies et maintes trahisons.
Tu souhaitais des carnages en poésies lubriques,
Des violences assassines en terreurs souterraines !
Quand ta peur d'impuissance, ta lâcheté impure t'obligeait à
plier, et ta fierté transie, et tes passions hautaines.
As-tu aimé un jour ?
Des caresses incertaines sur des Ondines en feu qui happaient
tes Amours et détruisaient ta foi.
Elles furent trop irréelles dans tes fusions d'orage.
Elles furent trop vulnérables dans tes pulsions barbares.
Si tes sanglots sanglants éclatèrent en diamants, leurs couleurs
de violence ont abîmé tes yeux en traçant autour d'eux, des
sillons d ' épouvante, des traces redoutables. ..
Et ton miroir avide, suçant tes dernières forces te renvoient en
revanche, un blafard inconnu, sordide, inachevé, dans des
brouillards d'enfant et des paniques d'homme.
Cynique et malfaisant, il renvoie sans pitié des noirceurs, des
reflets soupçonnés, mais pourtant éclipsés en contours nimbés
d'or.
Alors, parfois trop seul, solitaire bien trop nu, sans courage et
hagard, tu rêves de saigner ce bras blanc décharné, outil de tes
passions.
Exsangue et nerveux il te tente en tourments, tu penses le
trancher, Ô, fleuves d'amertume! Insolentes et rougies qui
palpitent , font souffrir quand tu dors sous la pluie.
POSSESSION
J'ai bu le sang des Belles dans de fières effusions,
Quand redoutables oiseaux, elles gravaient mes artères.
Le gargouillis rouillé du rasoir en poison
Qui se fichait au bras comme étincelle austère.
J'ai souillé de mes mains leur rêve cicatrice,
Ebranlé et fauché leurs rires d'innocence.
Elles semaient des jardins d'aurores et de calices,
Dans lesquels mes noirceurs s'imbibaient en errance.
Cheval fourbu d’efforts, épanché sur les morts.
Buvant le fiel des mers, sirupeux et sanglant.
L'outrage de ces Déesses fut violé par si fort,
Que sur leurs seins tachés j’ai gravé mes tourments.
Chaînes avides et goulues que tu supportes en vain,
Imbécile et sournois! Ton miroir est sordide !
Tu pleures, tu te lamentes en chevauchant des reins
Forçant à des cambrures traumatisées, avides. ..
Se morceler en larmes féroces et sanguinaires
Quand le corps d'une Ondine supplie maintes tortures.
Tu soumets aux caprices la femme un peu trop fière,
Et de tes spasmes humides elle s'offrira parure.
Engoulevents du néant, viols dans des lunes mauves,
Castratrice irréelle, apparue en ondées.
Sa sueur se colle à toi en caresses de fauve,
Et ta vigueur d'orage est mordue et happée.
La mer noire s'est calmée, tu te noies dans l'écume.
Tu es deux, tu es seul, un peu trop loup d'antan,
Tes dents de carnassier brilleront dans la brume,
Et tu souhaites mourir, peut-être en des bras blancs.
Sommeil inachevé de soif de satin
Des moiteurs parsemées des sursauts de ton corps.
Un regard qui pardonne, la quête d'une main,
Un Amour sur tes lèvres et le tout dernier port.
HAINE ET PASSION
Je te haïs, Femme impure,
Impudique égérie, ingénue de frissons.
Je te haïs mais j'endure
Le manque et ton absence, d’échéante illusion.
Sois maudite, Belle de nuit !
Ton ventre s'est repu de ma stupide essence.
Tu t'es jouée de ma vie,
J'ai enduré folies, guettant des renaissances.
Je te briserai, Rebelle !
Je plierai tes genoux, t'avilissant enfin.
Je deviendrai cruel"
T'obligerai à mes vices, en brisant ton destin.
Tu es nue, tu es vague.
Ta poitrine tourmente et ton corps m'ensorcelle,
Dans tes reins je divague.
Je cède du terrain, je dis que tu es belle. ..
Et tu parles d'amour,
Je pense à déchirures blanchâtres de dentelles.
Tes yeux sur moi sont lourds,
Je prie mes Dieux absurdes, frénétiques en leur ciel.
Des rêves dans ta voix,
J'abandonne mon âme, ma haine s'est striée.
Je me plie à ta loi,
Je subis mes faiblesses, renonce à mes fiertés.
Tu triomphes et souris.
Je suis mort sur ta couche, et ton coeur se nourrit.
Fille Vampire tu m'as pris.
Je te crains, je te hais, je t'aime et m'évanouis. ..
BONDAGE
Le cuir bien insolent te frappe et te désire
Fille de feu aux courbures de papier parfumé.
Je te domine enfin, violent et cérébral
Dans des gestes arrogants de pulsions rédemptrices.
A UNE JEUNE FEMME RUSSE
Etrange destinée où les Serments du coeur
S'attaquaient à des pas filandreux de déesse.
Chevelure de comète, constellation de hanches
Qui vibraient, ondoyaient, en défi sous la lune.
Le coeur s'est assombri dans des jeux de violence
Où les mots et les pleurs foudroyaient de pardons.
Le temps eut ses ébauches, reflétées en miroirs
Quand le soleil candide était violé de peur.
Le réveil en tornades, les frissons du courroux,
Les seins devenaient rêve, le ventre se refuse.
Les mains frôlent un désir où le phantasme avide
S ' ethére et s’effiloche au son de ses tourments.
Aimer, sans oublier, que la belle a ravi
Un temps qui s’est figé, immortel aux néants.
De demain surgira des rivales habiles
Se heurtant à des haines, écueils de souvenirs.
Terrible envie de mal, de mordre dans la mort,
D'ensanglanter un fruit surgi de quelques nuits.
Epier, rôder en vain dans des lieux trop connus
Qui filtreraient silhouette, dès lors trop méconnue.
Fils du temps des sorcières, où « Geis » et sortilèges
Ont séquestré tes rives par le biais d'une Fée -"
Sulfureuse égérie, brune du temps jadis,
Elle a saigné tes gestes, s'est repu de tes restes.
L'oubli dans le sordide où la ville araignée
Tisse son suaire de silence où s’emmêlent tes jours.
Arachnéenne épouse, elle trame des coulées
Où s’enfuient tes colères, et puis t’anéantis.
Quand la chaleur des morts frappera à ton huis,
Le passage des lumières t'offrira le repos.
Mais le parfum d'antan, l'amour de tes balades
Sera dans ton halo irisé de perdant.
Il est des vies chimères qu'on refuse de vivre,
Et pourtant, en souffrant, en moribond héros,
Je les veux: de nouveau, affronter en dément
Sachant que de blessures, s'estompera ma vie.
SEUL
Le départ d'un matin sur un quai embrumé,
Une larme de pluie, un relent de rancœur.
L'amour fracasse et las. ..On reste un peu hanté
Par l'impression d'un mot qui ressemble au bonheur...
HUITIEME CYCLE
RENOUVEAU
RENOUVEAU
Le vol d'un corbeau sombre
Entre des rochers noirs
Plantés comme des sexes excités
Par la couleur des nuits
D’un espace irréel chevauché par des brumes,
Linceuls palis des morts revenus un instant.
Les fougères aux dents vertes grimacent dans la brise, froide,
qui implore sous la haie des genets bien timides.
Le bruit de mille oiseaux, coucous,
Désenchantés, inéluctable chant,
Poésie des trépas, complainte de l'absurde
Frénétique oraison qui prend sa source claire
Dans le temps des prémices,
Dans l'aube des temps anciens.
Pépiements de colère, union brève et stellaire.
C'est comme un long voyage qui se bute à l'écueil
De l'oubli des mirages
De la traîne des rêves.
Alors sous la stèle trop sévère et érigée d'orgueil,
Crevant une aube timide,
Un disque de brûlure, empoisonné de sang.
Un coeur qui bat, frémit, dans le sang des vestales qui offrent
A des démons leur ventre rebondi…
Progéniture inconcevable
Regards froids dans les crépuscules
Etreinte de connaissances, de souffrances
Et de mélancolie qui se diluent
Dans le lait des femmes,
De leur amour et de leur viol.
O rouge éclat
Ô disque sordide
Frémissante turbulence
Chaîne de feu dévastatrice
Ronge la terre et ses péchés
Nettoie ma chair et mes rancœurs.
Revient tel un manteau de pourpre
Caresse mes épaules et mes reins
Donne ta lumière à mes sens, insolente,
Rends moi aveugle de ma destinée,
Crève mes yeux bleus de rêveur sanguinaire.
Laisse-moi rêver d’une enfant ici bas,
Abandonnée dans ses sphères étoilées,
Dans ses nimbes auréolées.
Donne-moi la force de vaincre et de protéger,
D’irradier la libellule faible et fragile
D’incendier la hulotte sauvage et nerveuse,
D’embrasser les reptiles sanguinaires et visqueux.
Alors, alors de ton disque des vélins blafards.
Fait-moi un dernier cadeau, un présent immaculé. ."
Fait-moi être un homme
Fait-moi être un père
Regarder droit les nuages
Avec mes yeux dans ton sillage
De brumes sanguines, effilochées,
Irisées de néants oubliés.
achevé en 1994