Latence
via-illusio
J'ai toujours pensé que je mourrais jeune, et d'une mort violente.
Ca m'apporte de l'espoir, du réconfort.
Bizarrement.
Un point à fixer, à l'horizon.
Une échéance dont l'avènement permet de se consacrer aux activités qu'offre le présent.
Activités limitées, activités encadrées, comme dans un pénitencier.
Prisonnier du temps.
Peine auto infligée.
Une vie entière à construire des châteaux de sables.
Compacts, mais friables.
Un coup œil vers la mer pensif, à chaque fois qu'elle lance un assaut.
Ses vagues contre mes châteaux.
La marée détruit mes tours.
Et je les reconstruit.
Plus hautes, plus larges, plus solides, moins esthétiques, plus durables, plus concrètes, plus pragmatiques.
Mais peu importe l'effort qu'on y met, ce n'est qu'un divertissement, pour combler l'éternité dans laquelle nous plonge la peur de cet océan.
Fascinant.
Terrifiant.
A chaque marée on croit que la vie s'arrête, à mesure que les parois de sable s'écroulent.
Elle continue.
Avec ou sans château.
De là nait le tourment.
Cette pression, qu'on se colle.
Ce balancier.
Complet ou adaptable.
Confort ou mouvement.
Le confort s'arrête au mouvement, le mouvement s'arrête au confort.
Les deux mènent à la mort, tout y mène.
Ce n'est pas triste.
Loin de là.
L'important c'est ce qu'on fait en attendant.
Des choix.
C'est ce que nous sommes.
Des choix et la latence qui les sépare.
C'est notre personnalité.
Notre faculté à choisir, où notre propension à attendre.
On peut passer une vie a attendre, la société offre assez de divertissement pour combler l'interminable.
Plus l'on fait de choix, plus on existe, et inversement.
Parfois c'est la vie qui nous place face à une unique alternative, poussant les plus oisifs à se décider.
Sortir de la passivité et du divertissement, c'est violent.
Mais le reste du temps n'est que latence.
Et plus on attend, plus on se persuade que quelquechose nous attend.
Rien.
Les choix engendrent les actions, les actions engendrent l'espoir...